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MBAYE DIEYE FAYE : «Mon histoire avec Youssou Ndour…»

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Son nom se conjugue avec le Super Etoile. Mbaye Dièye Faye a été témoin de toutes les aventures de la mythique formation musicale de son «jumeau» Youssou Ndour, du début des années 70 jusqu’à présent. L’inoxydable percussionniste de génie en redemande encore et encore. Sur ses débuts avec le Super étoile, les moments de galère, le secret de son amitié avec Youssou Ndour et sur d’autres sujets relatifs à l’évolution de la musique sénégalaise, Mbaye Dièye Faye dit tout à Rewmi Quotidien.

Rewmi Quotidien : Quoi de neuf chez Mbaye Dièye avec cette nouvelle année qui commence ?

Mbaye Dièye Faye : Nous revenons d’une tournée en Europe. Je l’ai faite en compagnie d’Alioune Mbaye Nder. J’ai dû écourter la tournée car j’ai un tout nouvel album qui doit sortir. L’album est prêt depuis car nous avons été en studio au mois de Ramadan. Tout est fin prêt il ne reste plus que des détails avant la sortie de l’album. J’ai sorti un single, c’est le morceau que j’ai fait avec mon petit frère Baye Demba. La vidéo apparait d’ailleurs en ce moment.

Quand avez rencontré Youssou Ndour pour la première fois ?

En 1972. Je peux écrire un livre sur You, comme il peut écrire un livre sur moi. C’était lui, moi, Ouzin Ndiaye, Marc Sambou, etc… Nous étions au début une troupe théâtrale avec Rama Thiam, Sidy Niang, Bass Diakhaté. Par la suite on a formé Diamono 1. A l’époque chaque soirée nous percevions 1000 francs. Mais nous n’étions pas trop intéressés par l’argent, plutôt par la passion. Nous étions en phase d’apprentissage. Par la suite You a formé le Super étoile au moment où j’étais à Number One. You a songé à moi pour être son percussionniste. J’ai demandé aux gens de Number One de revaloriser mon salaire mais ils ne m’ont pas écouté. Je suis parti rejoindre You qui m’avait proposé 90 mille francs. C’est après que Number One est revenu à la charge en me proposant 120.000 mais j’avais déjà donné ma parole à You. C’est comme ça que l’aventure a débuté avec You.

Pouvez-vous nous parler de vos premières tournées en Europe qui vous ont révélé à la face du monde ?

Feu Mamadou Konté nous avait engagés pour un concert en France dans les années 80. En ce moment on cartonnait au Sénégal, mais nous n’étions pas encore connus à Paris. Konté nous a proposé de faire la première partie des Osi Bisa, un groupe Africain créé par des Ghanéens mais qui comprenait des musiciens d’autres nationalités comme des Zaïrois. Nous avons dit niet car on a fait comprendre au promoteur du spectacle que nous étions numéro un chez nous, donc il était hors de question qu’on joue la première partie. Après moult conciliabules on a finalement cédé. Mais lorsque les musiciens d’Osi Bisa sont montés pour jouer, nous avons su que le public s’est déplacé pour eux. Peut-être nous étions une sorte de découverte mais c’était Osi Bisa la grande attraction. On a décidé de suivre leur spectacle et voir ce que ça va donner. Moi personnellement j’étais sous le charme. Je n’arrêtais pas de regarder les yeux écarquillés le percussionniste qui était impressionnant à tout point de vue. J’étais fan en quelque sort,e comme si je n’étais pas musicien comme lui.

Avez-vous des souvenirs de quelques moments de galère à vos débuts ?

Un jour, nous devions jouer a Abidjan on n’avait pas d’avion. Nous avons quitté Niamey pour rejoindre Bouaké avec des 4X4. Celui à bord duquel je me trouvais n’avait pas d’essuie glace, les vitres ne pouvaient pas se fermer or il pleuvait des cordes. On croyait qu’on allait mourir, mais à notre arrivée c’était un ouf de soulagement. On avait du mal à croire que nous étions toujours vivants.

Comment êtes-vous parvenu à bâtir la notoriété du Super étoile ?

A l’époque, ce n’est pas l’argent qui nous intéressait. Nous étions trop jeunes et nous étions mus par une seule et unique volonté, celle d’apprendre d’abord la musique et de la maitriser. On a bavé. Le jour où j’ai dit pour la première fois à mon père que je voulais faire de la musique, il m’a giflé. J’ai fui de la maison avant de revenir en catimini prendre un tam-tam et repartir. Youssou également n’avait pas l’aval de son père. Lorsque nous partions en Gambie pour la première fois, il m’a confié la valise qui contenait ses bagages de peur que son père soit au courant. Nous avons débarqué chez un ami, la maison était presque à ciel ouvert. Nous dormions presque à la belle étoile. Par la suite, je suis parti voir mon père qui m’a donné sa bénédiction et je lui ai promis que j’allais devenir quelqu’un dans la musique.

Quelle est la scène qui vous le plus marqué depuis le début de votre carrière ?

C’était un concert d’Amnesty international avec Youssou Ndour et le Super étoile, Sting, Bruce Springsteen, Peter Gabriel, Tracy Chapman au stade national d’Argentine où on a joué le mondial. A l’époque, moi et Youssou étions supporters de la sélection argentine avec un certain Diego Maradona au sommet de son art. Jouer dans ce stade était comme un conte de fée et j’ai pris sur moi le défi de mettre le public de ce stade sous mes pieds, de la même façon que Diego le faisait avec ses arabesques. Ce jour là, devant 150.000 spectateurs le Super étoile a ébloui le public grâce à une performance de haute facture. Je n’oublierais jamais ce jour là. C’était fou pour tout le groupe. Réussir ce show en tant que Sénégalais devant des européens et des américains enchantés par notre musique, c’était exceptionnel. C’était comme dans un rêve c’était la première fois que je voyais ça. Il y’avait au total 250 personnes pour cette tournée. Les organisateurs avaient affrété deux Boeings. On ne touchait pas à nos bagages. Arrivés à l’aéroport, on retrouve nos bagages directement dans nos chambres d’hôtel. Tout le monde est traité sur le même pied d’égalité, on ne faisait pas de distinction entre Sting et Youssou Ndour ou Youssou Ndour et Bruce Springsteen. C’est une tournée qui a marqué le Super étoile et depuis, nous avons appris à jouer avec les plus grandes formations musicales, avec les meilleurs musiciens du monde sans nourrir le moindre complexe.

Votre compagnonnage avec You titille les 30 ans. Quel est le secret de votre amitié indéfectible ?

Moi et Youssou nous nous respectons à tel point que chacun n’ose pas regarder son prochain dans le blanc de l’œil, «kou nek dafa am kersa morom». Il y’a une très grande complicité entre nous. Il ne nous est jamais arrivé d’être à couteaux tirés car on se connait.

Comment êtes vous parvenu à cultiver cette complicité ?

Il m’arrive qu’ion m’interpelle sur les tournées que je fais laissant le Super étoile, pour savoir si ca ne cause pas des préjudices au groupe. Mais c’est tout à fait normal que j’aie mon propre groupe et que je fasse des tournées. Youssou et moi on se comprend sur ça car c’est un professionnel comme moi aussi je le suis. A maintes reprises, des gens ont cherché à nous séparer You et moi. Ils n’y sont pas parvenus car nous avons été très forts, nous n’avons pas prêté le flanc. On a fait la sourde oreille car si nous avions écotés ces gens là, on n’aurait plus parlé de Mbaye Dièye et de Youssou Ndour. Ce n’est pas en occupant les médias et l’internet pour salir mon nom que forcément tu parviendras à me trainer dans la boue. Car les Sénégalais savent qui je suis. J’ai un gros cœur, je ne suis pas un diable. Même les bébés savent qui est Mbaye Dieye Faye. Je suis l’ami de tout le monde. Personne ne peut pas salir mon nom, encore moins ternir mon image. Je suis issu d’une famille respectable et respectée au Sénégal. Il existera toujours des esprits malintentionnés, il faut qu’on apprenne à avoir un esprit positif, «ñu yenante jamm». Les gens sont devenus de plus en plus méchants et ça c’est un frein au développement de notre pays.

Vous êtes très adulé par les femmes. Votre épouse ne vous fait pas des scènes de jalousie ?

Je suis un gentleman. C’est vrai que je suis plus aimé par la gent féminine mais la raison est toute simple : Je sui batteur de tam-tam et je suis très sollicité par les femmes pour animer des «tannebeer». Parlant de mon épouse, je ne cesserai de lui rendre hommage. C’est ma dame de fer.

Nous sommes ensemble depuis très longtemps, à l’époque je n’étais pas le Mbaye Dièye que je suis aujourd’hui. Elle m’a toujours aimé d’un amour sincère. Je me rappelle le jour où elle débarquait pour la première fois chez moi. Ce jour là, il pleuvait, elle était mouillée mais elle ne voulait pas que le sache. Enceinte de huit mois, elle marchait des kilomètres pour aller préparer le repas familial avec du bois en plus. Elle a beaucoup fait pour moi. C’est pourquoi il m’arrive souvent de la chanter sur scène. Des femmes m’interpellent tout le temps et me disent qu’elles voudraient avoir un mari aussi amoureux comme je le suis avec Mame Ndiaye.

Vous êtes batteur de tam-tam. Comment voyez vous la danse et la jeune génération de danseuses comparée à celle des Ndèye Khady Niang dans les années 80 ?

Je commence par les percussionnistes qui pullulent. Les gens n’ont plus la culture de la recherche, on joue au tam-tam parce que c’est la mode ou pour voyager. C’est pareil pour la danse. Tout le monde danse, on ne reconnait pas les danseuses authentiques des amatrices. Les choses doivent se faire dans les règles de l’art il y’a trop de danseuses qui se disent pro et qui ne le sont pas. Et puis il y’a trop d’extravagance. Danser ne rime pas avec perversion. Une danseuse comme Ndèye Khady Niang n’existe plus. C’était une star, une icone de la danse. Elle a été la première à moderniser la danse, elle maitrisait la danse dans toutes ses facettes. Dieynaba Niang, Yaye Oumi Ndoye, Oumi Samb étaient aussi des danseuses hors pair. C’est différent de la jeune génération.

Votre particularité c’est votre habillement raffiné. Combien coûte votre costume le plus cher ?

C’est normal nous sommes des artistes. «Ay doomou geweul lagnou». Nous sommes des gentlemen. Mon costume le plus cher coûte 20.000 (rires a gorges déployées). Tous les musiciens et danseurs se mettent sur leur trente et un. Et j’ai constaté que mon clip, blokass, a beaucoup contribué à cette nouvelle tendance.

Le mot de la fin ?

Je remercie tout le personnel du journal Rewmi mais surtout son gérant Mbagnick Diop qui est un très grand ami. Ses détracteurs ne sont pas au bout de leur peine, qu’ils le laissent comme il est sinon ils vont se fatiguer pour rien. Mbagnick a du mérite, le Sénégal a besoin de lui, c’est un patriote, un bosseur qui a beaucoup fait pour son pays. Je lui tire mon chapeau.
Entretien réalisé par

Lamine Mbaye

rewmi.com

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