XALIMANEWS : Les 65 000 emplois pour les jeunes à créer dans les semaines à venir sont des emplois précaires, fait savoir l’économiste et enseignant à l’Ucad Meissa Babou. Il estime que le chef de l’Etat n’a pas pris suffisamment de recul, ni demandé une évaluation, un diagnostic des structures existantes avant de faire de nouvelles propositions. Ce qui à son avis pourrait se retourner contre lui.
De l’analyse de l’économiste et enseignant à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) Meissa Babou en rapport aux échecs des politiques d’emplois les raisons relèvent souvent du stimulus réponse «organisation et coordination du secteur public dans toutes ses entités» et non exclusivement financière. Sur les 65 000 emplois annoncés par le chef de l’Etat, l’économiste qualifie lesdits emplois de précaires. Sur ce, il ne cache pas sa grande déception de la rencontre de Diamniadio, qui pour lui, aurait pu servir de cadre de réflexion, d’analyse et propositions d’experts au problème d’emplois.
Hélas regrette-t-il : «Je m’attendais à un changement de méthode, en mutualisant les structures de formation d’une part et les structures de financement d’autre part pour avoir plus de lisibilité des actions en matière de politiques d’emplois».
A défaut de cette mutualisation dira-t-il : «Je crains que la vieille recette soit reconduite pour donner les mêmes mauvais résultats». Rejetant tout nihilisme, il salue la volonté du chef de l’Etat de donner des réponses adéquates et pragmatiques à ces questions mais qui souvent pense que la réponse est d’ordre financière, alors que souvent elle est d’ordre organisationnel et de réforme administrative. Pour lui : «On ne peut pas faire du neuf avec du vieux».
Sur l’annonce des 65 000 emplois à créer, qu’il qualifie d’emplois précaires, il dira : «il y a une enveloppe de 80 milliards à dégager sur deux à trois ans, le temps de dérouler les élections (locales, législatives et présidentielle), mais ce sera forcément des emplois précaires dans plusieurs ministères dont celui de l’environnement qui prévoit un programme de reboisement». Ledit programme va démarrer à compter du «1er mai avec 10 000 personnes selon le ministre de l’environnement», relève-t-il. Il rajoute : «il en sera également de même peut-être dans les autres ministères». Toutefois, il précise que «ces 65 000 emplois contractuels ne font pas parti du programme de financement de 450 milliards à travers les structures de financement». Sur ces 450 milliards du programme d’urgence dont 150 milliards pour 2021 seront tirés du budget pour financer les jeunes. Il affirme : « Qu’il est prévu une approche inclusive à travers l’ouverture de bureaux départementaux pour mieux prendre en charge la question à bras le corps et de manière fast-tract». A l’entendre «très souvent ces taches sont confiées à des jeunes politiques qui n’ont pas d’expériences en la matière».
Pour s’en convaincre, il cite le Programme des domaines agricoles communautaire (Prodac), qui selon lui «depuis 2014 est là avec un financement d’environ 100 milliards sans les résultats escomptés». Sur ce, il se veut formel : «le président Sall n’a pas pris de recul, ni demandé une évaluation, un diagnostic des structures existantes avant de faire de nouvelles propositions».
Il persiste : «Ce n’était pas la bonne démarche. On est dans une précipitation, et d’effets d’annonce et ceci risque de retourner contre le président lui-même». Pour lui : «il y a des préalables, ce que le président n’a pas fait. Parce qu’on ne peut pas se lever un bon matin et dire aux jeunes venaient prendre un million, deux millions ou trois millions comme ça». Etayant son propos, il rappelle que le président Abdou Diouf en son temps finançait les diplômés de l’enseignement supérieur par exemple des économistes, des juristes…
Et il les regroupait en trois pour les financer à hauteur de 50, voire 60 millions mais également, en les accompagnants. Et ces gens-là montaient une véritable entreprise. Il n’y avait pas d’argent liquide mais un crédit-bail». «La réponse normale, c’est la réponse économique et non une réponse de décret » s’en désole-t-il. Il poursuit : «Et puisque c’est l’économie qui crée de l’emploi donc, il faut nécessairement un environnement favorable aux entreprises sénégalaises pour absorber les nombreux demandeurs d’emploi sur le marché».
A l’entendre : «l’Economie tourne mal parce qu’elle est extravertie et que les entreprises sénégalaises ne gagnent pas les parts de marchés pour donner de l’emploi aux jeunes… ».