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«Mimi» pour toutes les urgences par Madiambal Diagne

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Le Président Macky Sall a longtemps renvoyé l’image du coureur cycliste qui a en ligne de mire l’arrivée et qui se penche sur le guidon de son vélo pour pédaler fort. Dans un tel contexte, le cycliste n’entend plus rien autour de lui sinon les seuls cris d’encouragement du public acquis à sa cause. Le coureur qui a la tête dans le guidon ne sait rien de ce qui se passe autour de lui. Face à l’immensité des tâches, leur multiplicité et leur complexité, le chef de l’Etat semblait absorbé par les réponses à apporter à chacune d’elles, au point de donner l’impression de manquer de recul pour se faire une bonne idée de la réalité qui l’entoure. On en arrivait à se demander si le Président savait ce qui se passait autour de lui.
Macky Sall semble s’être réveillé brusquement. Il a décidé de changer de Premier ministre et de donner un nouveau cap à son action gouvernementale. Les attentes sont nombreuses et fortes. La toute première rupture aura trait au style, c’est-à-dire de donner de l’allant à la nouvelle équipe, lui impulser plus de dynamisme et couper avec l’image d’un gouvernement ronronnant. D’autres urgences spécifiques sont à relever. La première de toutes sera de savoir qui remplacera Aminata Touré à ses anciennes fonctions de ministre de la Justice. La dame a suffisamment fait preuve de sa capacité à tenir ce département stratégique et surtout, de celle de pouvoir faire fi de toutes les formes de pression pour faire aboutir les procédures judiciaires enclenchées. Il faudrait donc nommer à sa place une personnalité à même de pouvoir donner des gages de sérieux et de rigueur. Ainsi, le Président Sall éviterait la critique qui l’accuserait de donner à Aminata Touré une promotion dans le dessein caché de l’éloigner du ministère de la Justice, afin de pouvoir plus facilement enterrer certaines affaires judiciaires qui pourraient le gêner.
L’autre urgence sera de mettre en place une équipe, au niveau du ministère de l’Economie et des Finances, capable de redresser la barre. On ne le dira jamais assez, l’économie du Sénégal est à vau-l’eau. La preuve ? Le Sénégal, qui est pourtant la deuxième économie de l’espace Uemoa, escompte l’un des taux de croissance les plus faibles de la zone avec des prévisions les plus optimistes qui ne dépassent pas 3%. La Côte d’ivoire, le Niger et le Burkina Faso ambitionnent chacun de réaliser plus de 9,5% de taux de croissance ! Le Mali, en dépit de sa situation politique et sécuritaire, fera mieux que 5,4% ; le Togo réalisera 4,2% et le Bénin 7%. En définitive, le Sénégal ne fera mieux que la «pôvre» Guinée Bissau qui se contentera d’une croissance entre 2,5 et 3%. Cette contre-performance du Sénégal tire vers le bas la croissance globale de la zone Uemoa, qui sera autour de 6,5%.
Le 4 septembre et jusqu’au 16 septembre 2013, une mission de revue de l’Ispe du Fonds monétaire international sera à Dakar. On attendrait que le Sénégal se dote d’un ministre de l’Economie et des Finance et d’un ministre du Budget qui pourraient rassurer et inspirer confiance aux partenaires au développement. Avec le duo Amadou Kane et Abdoulaye Daouda Diallo, tout portait à croire qu’à la fin de la mission du Fmi, le Sénégal serait renvoyé à ses copies pour n’espérer conclure un accord avec le Fmi qu’en marge des prochaines assemblées générales des institutions de Bretton Woods à Washington. Cela aurait été une ombre pour le passage du Sénégal devant le Groupe consultatif à Paris le 21 octobre 2013. Le cas échéant, Macky Sall, qui vise 5 300 milliards de francs Cfa à ce rendez-vous, récolterait difficilement plus de 1 700 milliards de francs Cfa, correspondant strictement aux engagements déjà rendus publics par les partenaires comme la Banque mondiale, l’Union européenne et l’Agence française de développement. La garantie du Fmi sera indispensable pour débrider la plupart des bailleurs de fonds. Le risque est alors grand de voir le gouvernement de Macky Sall faire moins que tous les gouvernements de Abdoulaye Wade devant le Groupe consultatif de Paris.
L’autre grand chantier devra être ouvert au niveau du ministère de l’Intérieur. Avec le scandale de la drogue qui a secoué la haute hiérarchie de la Police nationale, le général Pathé Seck a fait étalage de sa disqualification à continuer à gérer ce département. Le ministère de l’Intérieur a besoin d’une nouvelle âme et surtout d’une personnalité crédible, qui peut incarner l’autorité régalienne qui doit être l’essence des fonctions de ministre de l’Intérieur.
Sur le plan diplomatique, le choix déjà porté sur Mankeur Ndiaye ne serait pas à remettre en cause. Seulement, la diplomatie sénégalaise aurait grand besoin de se réajuster. Un geste que vient de poser le Président élu du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta (Ibk), révèle que le Sénégal est en train de perdre du terrain. Ibk semble snober le Sénégal officiel qui roulait pour son adversaire Soumaïla Cissé. Ainsi, réserve-t-il ses premières visites au Tchad, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, le Bénin, le Niger. Quel pays est plus lié au Mali que le Sénégal ? Le Président Macky Sall ne pourra se satisfaire qu’on lui fasse croire que Ibk lui réserverait le meilleur, c’est-à-dire la fin.
Macky Sall a voulu une gouvernance sobre. Il devra en persuader davantage ses collaborateurs. Un fait, cette fois-ci très anodin, mais qui ne manquera pas de rejaillir négativement sur l’image personnelle de Macky Sall, a été observé vendredi dernier à l’aéroport de Dakar. Le vol Paris-Dakar de la compagnie Air France a été dérouté sur Nouakchott pour permettre à l’avion présidentiel, la Pointe de Sarène, d’atterrir. Il y avait véritablement une autre façon de faire qui pouvait faire éviter au Sénégal de donner l’image d’un pays banania. Le Président Sall n’a certainement rien à voir avec cela, mais c’est lui qui en portera la signature. On aura aussi observé, ce même soir de vendredi dernier, pendant des heures, comme à chaque fois que le chef de l’Etat se déplace, des gendarmes qui jalonnaient, sous une pluie drue, le long de son itinéraire. On se demande s’ils n’avaient pas mieux à faire dans les brigades de gendarmerie et commissariats de police pour assurer par exemple la sécurité dans les quartiers ?
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