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MPLICATION DE DIRECTEURS D’HOPITAUX DANS DES SCANDALES La ronde des « intouchables »

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Malgré les nombreuses fautes de gestion impliquant des directeurs d’hôpitaux, le constat reste que les mis en cause sont rarement poursuivis.

La corruption, et le favoritisme, n’ont pas fini de gangrener le système de santé dans ses plus hautes sphères. Au moment même où la santé est malade de ses divers manques de matériel, de logistique, de médicaments, de soins, de personnel, etc., des personnes peu consciencieuses cherchent tout bonnement à se remplir les poches aux dépens des patients. En atteste, la réouverture du dossier de scandale financier à l’hôpital d’enfants Albert Royer ainsi que les détournements et la gestion peu orthodoxe laissés en guise d’héritage par les directeurs sortants à l’hôpital Fann et celui de Grand Yoff. Tous ces cas de mauvaise gestion ont tous comme suite l’impunité.

L’un des exemples les plus édifiants est certainement celui du dépassement budgétaire de 260 millions F Cfa dénoncé à l’Hôpital général de Grand-Yoff (Hoggy) où les vérificateurs de l’Inspection générale d’Etat (Ige) ont ouvert une enquête. Alors que seuls 78 millions F Cfa de la somme en question ont pu être justifiés, la vedette de ce pillage n’est personne d’autre que l’ancien directeur, le colonel Babacar Ngom. En effet, le rapport de l’Inspection d’Etat mouille l’ancien directeur de l’hôpital et des responsables syndicaux sur la gestion de l’établissement en général. D’après les conclusions qui ressortent du rapport des commissaires aux comptes, « en plus des dépassements budgétaires, les recrutements de 2010 ont montré, chez le personnel soignant, une absence totale de pièces justificatives. Et que 72% des recrues de l’exercice passé habitent à Ouakam, lieu de résidence de l’ancien Directeur général de l’Hôpital général de Grand Yoff. Avec à la clé, des salaires exorbitants et, de loin, immérités pour ses proches souvent mieux payés que la plupart des fonctionnaires ». Cependant, même si les mis en cause ont été interpellés par la Division des investigations criminelles (Dic), les conclusions des enquêteurs sont toujours attendues. Selon certaines sources, il semblerait que plusieurs personnes impliquées dont le Directeur ont derrière elles des « gros bonnets » qui les protégeraient.

POUR DÉTOURNEMENT DE FONDS ET MAUVAISE GESTION : La promotion

En réalité, malgré la récurrence des scandales, l’impunité des responsables reste le principal obstacle. Pire, à défaut d’être traduits en justice, ces « intouchables » bénéficient souvent d’une promotion et sont affectés dans d’autres structures. Il en est ainsi du scandale qui a éclaboussé l’hôpital de Fann. Un rapport du Forum civil intitulé « Gouvernance et corruption dans le système de santé au Sénégal » en août 2010, indique qu’« une telle démarche nous a conduit à saisir la particularité d’une structure hospitalière qui est dirigée d’une main de maître par un officier de l’armée. Par déformation professionnelle, il gère l’hôpital comme on gère une caserne avec tous les sous-entendus liés à la vie militaire.

Au total, il est certain que, dans cette structure, il y a une seule référence : c’est le directeur. Tous les autres sont soit des sujets, soit des collaborateurs. Cette rigueur militaire n’est qu’une façade et cache beaucoup d’imperfections et de dysfonctionnements quant à la gestion financière et administrative de l’hôpital ». Dans le domaine des passations de marchés, des dérives sont souvent également observées. Conséquence : les services administratifs et financiers sont souvent enjambés par la direction qui ordonne, dans nombre de cas, des commandes sans passer par les circuits officiels. Un cas d’école assez illustratif qui rappelle, sans doute, le scandale financier au Chu de Fann, révélé récemment par La Gazette dans son édition n°97.

Dans ce dossier traitant de graves irrégularités, le Colonel Daouda Diène, alors directeur de la structure, est également au début et à la fin de la magouille. La Gazette informait ainsi qu’une enveloppe de 228 millions FCFA, sur un budget de 235 millions, avait été payée au maître d’ouvrage pour couvrir les travaux d’extension du service de la neurologie, sans que les constructions ne soient achevées et livrées à ce jour. Pourtant, le Colonel Diène (à la retraite) ainsi que ses acolytes, n’ont été inquiétés à aucun moment par une quelconque institution de contrôle.

Il y a également le cas de l’hôpital Abass Ndao, pendant plusieurs années, plongé dans une léthargie avec une dette qui a, par moments, avoisiné le milliard. Selon les syndicalistes de la structure, la situation chaotique traversée par l’hôpital est la résultante de la « mauvaise gestion » héritée des directeurs Thierno Seydou Ndiaye, Lamine Thiam, Mourad Dièye Guèye. Ces derniers ont tous été contestés et la structure s’est retrouvée sans directeur pendant plusieurs mois. En mai 2010, la direction du centre antidiabétique tenue par le Professeur Saïd Nourou Diop a été accusée de « détournement de deniers publics » par l’intersyndicale de l’hôpital qui décrie une « sorte d’accaparement du pouvoir » et de toutes les prérogatives qui lui sont attachées, arguant que « toutes les recettes générées par l’activité médicale de ce second laboratoire doivent être versées à l’Agent comptable particulier de l’hôpital et non gérées par une association de pathogènes ».

Mais l’affaire qui a été la mieux étouffée reste celle de l’hôpital d’enfants Albert Royer qui a été « réglée » en catimini avant que la presse ne s’en saisisse. Dans ce dossier où neuf agents ont été épinglés dans un détournement de plusieurs millions, le directeur n’avait alors opté que pour des mesures « conservatoires ». Les menaces de ces agents de passer au grand déballage et de dénoncer tous leurs complices incluant de gros bonnets, ont-elles alors fait reculer le directeur ? En tous les cas, au lieu d’appliquer les sanctions à la hauteur de la faute, les mis en cause ont simplement été mutés vers d’autres structures en attendant de les faire rembourser en procédant à des retenues mensuelles sur leurs salaires. Plus cocasse dans cette histoire, le directeur qui a alors failli à ses responsabilités a reçu une promotion pour avoir été affecté à Hoggy. Ainsi, les fautifs ne sont toujours pas sanctionnés même si le ministère de la Santé et de la Prévention a récemment saisi l’Inspection des affaires administratives et financières (Iaaf) pour tirer cette affaire au clair.

En outre, le rapport du Forum civil fait également part de « dysfonctionnements managériaux » dans un autre hôpital de la place où il est « noté un système marqué par la centralisation du pouvoir autour du directeur. Ce dernier peut, à l’occasion, déléguer une fraction de ce pouvoir à tel ou tel autre élément de la structure en mettant en relief les rapports de parenté ou d’amitié. Sur le plan managérial donc, on assiste à des dysfonctionnements qui tiennent essentiellement à la volonté du directeur à mettre en avant les alliances de parenté et d’amitié et à reléguer au second plan les normes professionnelles. Un décor qui, pour sûr ne ferait que favoriser la généralisation voire la légitimation des pratiques corruptives ».

Toutefois, il ne s’agit pas de généraliser cette attitude condamnable à tout le personnel managérial. Car, certains directeurs d’hôpitaux, souvent coincés entre le corps médical, les syndicats, les mutuelles etc., demeurent intègres et continuent à honorer leur métier. La corruption n’épargne presque aucun niveau du secteur de la santé. Cela va du trafic des médicaments aux faux certificats médicaux en passant par les détournements du matériel médical et de biens alimentaires. En tous les cas, il est à rappeler que les préjudices occasionnés par les transactions et autres pratiques corruptives opérées ou cautionnées par des directeurs d’hôpitaux, atteignent des proportions élevées et entament sérieusement les finances des structures ainsi que le climat social.

Papa Adama TOURÉ

lagazette.sn

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