Ce fut en 1976 que le président Léopold Sédar Senghor instaura pour la première fois le multipartisme au Sénégal mais en le limitant seulement à quatre. Cinq ans plus tard, son dauphin Abdou Diouf procéda l’élargissement pour permettre un multipartisme intégral. Ainsi, chaque groupe de citoyens sénégalais pouvait s’organiser et créer son parti politique. Ce phénomène a aujourd’hui atteint son paroxysme et notre pays s’est retrouvé en 2014 avec 228 partis politiques. Un chiffre rocambolesque qui devrait nous inquiéter si l’on se retourne vers le sens, l’objectif et les missions des partis politiques.
Le rôle essentiel des partis politiques est de participer à l’animation de la vie politique. Ils ont pour objectif de conquérir le pouvoir et de l’exercer en mettant en œuvre la politique annoncée. Les partis politiques sont les représentants intermédiaires des populations avec les gouvernants. Les partis au pouvoir ont le devoir d’appliquer les propositions qui les ont fait élire pendant que ceux de l’opposition doivent veiller à l’application des promesses électorales et alerter quand c’est nécessaire de ce qu’ils considéreront comme une dérive. Les partis politiques sont les animateurs du débat politique et très souvent, ils influent sur l’opinion publique. Ainsi, toute démocratie a besoin de favoriser le multipartisme afin de permettre à chaque citoyen de militer selon son idéologie ou sa conviction.
Cependant, aussi important que puisse être le multipartisme dans un pays, il n’en demeure pas mois que s’il n’est pas bien organisé il risque de créer l’anarchie et la démocratie perdrait ainsi tout son sens.
Aujourd’hui, dans notre pays, la notion de démocratie est galvaudée et le sens du parti politique est déformé. La politique est considérée par certains comme un métier et ces derniers pensent que la création de partis politique est la clé de la reconnaissance et de la légitimité. Aujourd’hui, les partis se créent non par regroupement idéologiques mais par un simple hasard. Les mécontents d’un parti en sortent pour tracer leur propre chemin, ceux qui sont à la recherche de notoriété veulent créer des partis politiques. Les mécanismes de créations de partis sont caducs et inadaptés aux réalités actuelles. La plupart des partis qui se créent ne compte pas beaucoup de militants. Il n’y’a que les leaders qui sont connus et ces partis dits ‘télé centres’ ne parviennent même pas à rassembler une centaine de militants convaincus et ayant un idéal commun. Soyons sérieux et regardons les choses en face. Il ne suffit pas de multiplier les partis pour prouver que nous sommes démocratiquement matures. Si nous pensons ainsi, nous devons alors réapprendre la notion de démocratie.
Soyons plus sérieux et plus matures que cela car 228 partis politiques pour notre pays c’est du bluff et de la cacophonie. Cette floraison de partis donne une mauvaise impression sur la politique et sur ces acteurs. Au lieu d’unir et de construire, les partis politiques sont aujourd’hui sources de violences. Il n’y’a plus de formation et le tissu social ne cesse de se détériorer à travers les partis. Les citoyens ne se retrouvent plus dans les partis. Les taux d’abstention sont de plus en plus importants pendant les élections. Le peuple ne croit plus aux partis et il urge de trouver des stratégies qui permettront de stopper cette floraison. Ceci renvoie à la question des financements de ces partis politiques qui semble être taboue au Sénegal. D’où viennent les financements des partis politiques ?
De façon responsable, nous devrions nous unir autour de l’essentiel. Nous aurions plus intérêt à retourner vers les cadres idéologiques. Avoir de grands partis forts à la place de ces petits partis qui ne comptent que sur les coalitions pour avoir leur part du gâteau. Pourquoi ne pas regrouper ces 228 partis suivants leurs idéologies respectifs et en faire de grands partis unis, fort et représentatif ? Pourquoi tout le monde veut être chef de parti ? Est-ce cela la démocratie ?
Je pense que non. Le constat est la, ce ne sont surement pas les partis politiques qui ont été les acteurs du 23 Juin même si certains d’entre eux y ont activement participé. Pire, les maux dont souffre aujourd’hui le Sénégal sont essentiellement causés par ces partis car en réalité, nous ne savons même pas quel est le parti qui nous gouverne. La coalition qui nous dirige est un fourre tout qui porte en son sein toutes les idéologies et qui a fini de créer un cocktail dangereux qui menace d’exploser.
Revenons sur nos pas et tentons d’attraper la balle au rebond, penchons nous sérieusement sur cette question du multipartisme qui est en train de tuer notre démocratie. La qualité vaut plus que la quantité. L’intérêt de la nation ne dépend pas du nombre de partis que nous avons mais il va au-delà. L’intérêt du peuple dépend de ce que nous faisons de cet outil démocratique qu’est le parti politique
« Croire en la démocratie implique que l’on croie d’abord à des choses plus hautes que la démocratie. » Ludwig von Mises
Aminata Ndiaye
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