Si Macky Sall et la famille Wade ont réussi quelque chose de solide à Touba, c’est bien le fait d’avoir créé la guerre entre talibés et marabouts Mbacké-Mbacké. Pour défendre leurs « amis » que sont Me Wade, son fils Karim et leurs collaborateurs Madické Niang, Samuel Sarr etc… ces chefs religieux, qui ont un ou deux pieds dans la politique, effectuent fréquemment des sorties au vitriol contre l’actuel chef de l’Etat. La riposte de leurs talibés, favorables à Macky ne s’est fait attendre, bafouant une orthodoxie jadis bien scellée par cet acte d’allégeance dénommé « jéébel ».
La politique et les mirages qu’elle offre semblent être en mesure de déplacer des montagnes ou de tarir des océans. Ce n’est pas ce qui se passe à Touba qui pourra apporter le démenti à cette thèse. En effet, à cause d’elle (la politique), le ciment qui scelle les relations entre talibés et marabouts est en train de perdre de sa solidité à cause des intérêts terrestres différents ou même opposés. N’est-ce pas un homme politique mouride très célèbre, appartenant au parti au pouvoir (pour ne pas dire coalition) qui disait sur une télévision de la place : « mon marabout n’ose pas me dire de voter pour un autre que Macky ? S’il le fait, je lui dis mes autres vérités ! ». Cette sortie n’est que la partie visible de l’iceberg, comparé à tout ce qui se dit maintenant dans la cité.
Chefs religieux avec 1 ou 2 pieds dans la politique
Ils sont nombreux ces chefs religieux Mbacké-Mbacké qui se sont lancés ouvertement dans la scène politique, défendant becs et ongles leurs parti ou leurs hommes politiques préférés. Certains sont mêmes, à cause de leurs activités politiques, devenus des élus locaux. C’est le cas de Serigne Gallass Kaltom Ibn Serigne Bara et de Sokhna Mame Khary Mbacké devenus députés, par la grâce de leur nom. C’est aussi le cas de Serigne Fallou Mbacké Ibn Serigne Mbacké Sokhna Lô, de Serigne Bara Dolly ou de son fils Serigne Cheikh Abdou etc… qui appartiennent au défunt régime libéral. Mais c’est surtout le cas des marabouts libéraux assimilés à des maitres-chanteurs par des responsables de l’Apr et qui se distinguent, généralement, par la virulence de leurs propos. Ces derniers, appartenant à une association composée de plus 200 Mbacké-Mbacké, se sont récemment résolus à déclencher une guerre contre Macky Sall, pour disent-ils, « défendre les dignitaires mourides du régime de Wade » comme Me Madické Niang, Samuel Sarr, Karim Wade etc… ou des hommes d’affaires comme Cheikh Amar, Serigne Mboup ou Mbackiyou Faye. Dans leur discours, Macky Sall est accusé « d’être un anti mouride, de combattre Touba, de chercher à banaliser et à ridiculiser les marabouts, de servir de répondant à des lobbies extérieures etc….). Mis à part ces « chefs religieux politiques confirmés », il y a un autre groupe de Mbacké-Mbacké qui n’ont qu’un pied dans la politique. Il s’agit de ceux qui n’effectuent pas de sorties médiatiques mais qui, à travers leurs actes, montrent qu’ils sont de véritables adversaires du régime (suivez mon regard). Ces marabouts, dont on dit qu’ils entraient dans les grâces du Président Wade, ont tenu à porter, en guise de solidarité, le combat pour lui au niveau de la cité religieuse de Touba. Le fait qu’ils soutiennent ce dernier de manière plus ou moins voilée, ne leur épargne guère les foudres de certains de leurs talibés qui leur reprochent de ne pas être à équidistance des hommes politiques.
Le discours déchainé des disciples
Depuis que les audits des dignitaires de l’ancien régime ont été entamés, des salves de critiques plus virulentes les unes que les autres provenant de Mbacké-Mbacké, sont ainsi déversées sur Macky Sall et ses collaborateurs. Ces attaques répétées, via la presse, a amené certains talibés à mettre de côté leur manteau de disciple. C’est le cas des jeunes de l’Apr. Abdoulaye Diop, Diène Guèye, lors d’une conférence de presse tenue dans la salle de réunion de la mairie de Mbacké, ont traités de tous les noms d’oiseau les marabouts comme Serigne Cheikh Mbacké, Serigne Souhaïbou Mbacké, les comparant à des maîtres chanteurs. Pire, ces jeunes ont juré de combattre « ces Mbacké-Mbacké jusqu’à ce qu’ils retournent dans leurs daaras ». Dans la même foulée, une autre sortie à travers la presse à Ngouye Mbind – (quartier général du Khalif) est faite par le Dr Sylla. Cette réunion a été l’occasion pour ces responsables de l’Apr de servir un cinglant réquisitoire à ces « chefs religieux qui ont troqué leurs chapelets à des billets de banque ». Plus respectueux à leur endroit, Dr Sylla promet de se dresser en sentinelle pour défendre Macky Sall, « fussent-ils des Mbacké-Mbacké ». Cette nouvelle posture crée dans la cité un malaise et pollue une atmosphère jadis apaisée entre marabouts et talibés. La question qu’il urge de se poser est de savoir si Macky et Wade valent que des relations basées sur la religion se détruisent si effroyablement ?
Les Mbacké-Mbacké épargnés
Ils sont encore nombreux, ces chefs religieux qui bénéficient encore du respect et de l’estime des talibés. Il est facile de les reconnaitre. En fait, ils ne font pas de la politique, ils ne se frottent aux hommes politiques, ils n’acceptent jamais les mallettes des politiques, ils ne commentent jamais l’actualité, ils sont confinés dans les daaras, dispensant enseignements coraniques et éduquant les enfants et on ne les voit qu’en période de magal. Ces types de guides religieux existent encore et c’est eux, à tort ou à raison, qui sont épargnés par les militants de l’Apr.
Mama Moustapha MBAYE (Correspondance)
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