Ousmane Tanor Dieng aux sénégalais d’Espagne : «Wade vous a vendus pour 13 milliards»

Le Secrétaire général du Parti socialiste (Ps), Ousmane Tanor Dieng a profité d’une invitation en Espagne du Parti socialiste ouvrier espagnol (Psoe) du président du gouvernement Jose Rodriguez Zapatero, pour aller à la rencontre des Sénégalais vivant et travaillant en Espagne. Une rencontre mise à profit pour écouter les doléances des émigrés. Par Miguel PABLO

Image«Wade et son gouvernement vous ont vendus aux Espagnols.» Sans sourciller, Ousmane Tanor Dieng a lancé cette assertion à la figure des émigrés sénégalais de Ma­drid, venus à sa rencontre. Le Secrétaire général du Ps, présent en Espagne dans le cadre d’une invitation du Psoe espagnol en même temps que les Présidents du Cap-Vert, d’Ethiopie et des représentants de l’Anc, estime qu’en matière d’immigration, le Président Wade et son gouvernement acceptent toutes les propositions de l’Espagne ou de la France, pourvu qu’il y ait une contrepartie financière. «C’est inacceptable que Wade accepte, pour 13 milliards, le rapatriement de nos compatriotes vivant en Espagne et se trouvant sans papiers. C’est à la limite même cynique, quand on sait que tous ces jeunes rapatriés sont des soutiens de famille», a soutenu Ousmane Tanor Dieng. A ses yeux, le gouvernement aurait dû essayer de régulariser la situation de ceux qui sont déjà sur place avant d’accepter quoi que ce soit. Surtout que, certains, dit-il, ont dû débourser des sommes importantes pour se payer un voyage en Espagne. «Je ne comprends pas pourquoi Wade peut accepter toutes les propositions de la France et de l’Espagne en matière d’immigration. Certes, il est obnubilé par l’argent, mais ce n’est pas une raison pour sacrifier des milliers de familles. D’ailleurs, on ne sait même pas comment il a utilisé la contrepartie de 13 milliards versés par le gouvernement espagnol», a encore accusé Tanor Dieng. Ce dernier pense que les transferts d’argent des émigrés sont de loin plus importants que l’aide au développement.

LE RAS-LE-BOL DES EMIGRES
Rapatriements massifs, emprisonnement de jeunes sénégalais pour vente de produits contrefaits, interdiction des voitures de plus de dix ans, retard dans le paiement des transferts du fait des coupures in­tempestives d’électricité au Sénégal, la liste des complaintes est loin d’être exhaustive pour les émigrés sé­négalais en Espagne. Et quand Ousmane Tanor Dieng vient à leur rencontre, l’occasion est vite trouvée pour ruer sur les brancards. «Ab­dou­laye Wade nous a trahis ; on s’est battus pour le porter au pouvoir, mais 10 ans après l’espoir n’est plus permis. Il doit dégager le plancher», peste le jeune Oumar Ngalla Fall. Très amer contre le Président Wade et son gouvernement, il égrène tous les scandales qui ont jalonné les 10 ans de l’Alternance. Ensuite, M. Fall demandera au Socialiste ac­compagné de Cheikh Seck, son chargé des Sénégalais de l’extérieur d’œuvrer dans le cadre de Bennoo Siggil Senegaal afin de trouver une alternative à l’Alternance. El Hadji Fall et Ngagne Gning ont décrié la der­nière mesure de Wade, relative au durcissement des conditions pour faire entrer une voiture au Sénégal par la route. «Avec la crise de plus en plus dure, beaucoup n’ont pas de quoi acheter un billet d’avion. Venir au Sénégal par la route en traversant le Maroc et la Mauritanie était devenu notre bouée de sauvetage, mais Wade vient de nous l’interdire. Demander aux émigrés de laisser une caution de 2 millions à 2 millions 500 mille F Cfa pour pouvoir faire entrer une voiture de plus de 10 ans au Sénégal, c’est une interdiction pure et simple qui ne dit pas son nom», dénoncent-ils. Autre décision qui fait mal aux émigrés, c’est le rapatriement massif de leurs compatriotes. Ils ne comprennent pas que le gouvernement puisse l’accepter pour des jeunes dont le seul tort est de vouloir aspirer à un avenir meilleur et subvenir aux besoins de leur famille. «Même si le gouvernement du Sénégal ne le dit pas, tout le monde sait que l’Es­pagne lui a donné beaucoup d’argent pour qu’il accepte sans sourciller le rapatriement de nos compatriotes sans papiers», déclare Omar Dieng, qui déplore aussi l’emprisonnement de plusieurs centaines de jeunes Sénégalais victimes de la loi sur la propriété intellectuelle. «Beau­coup de nos frères sont dans les prisons espagnoles, condamnés à des peines allant de 6 à 12 mois et à des amendes de 1 000 à 5 000 euros pour avoir tout simplement vendu dans la rue des produits contrefaits», lance-t-il à l’endroit du res­ponsable du Ps.
Les émigrés de Madrid, présents à la rencontre d’avant-hier avec Tanor Dieng ont aussi dénoncé les coupures intempestives d’électricité qui sévissent actuellement au Sénégal. «Nous subissons aussi les effets de ces coupures, car si nous envoyons de l’argent à nos parents, ils mettent parfois une semaine avant d’entrer dans leurs fonds à cause de ces coupures», renseigne Mbaye Samb.
Sur toutes ces questions, M. Dieng dit avoir pris bonne note et promet de revenir à Madrid pour y tenir un plus grand rassemblement.

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