Le Sénégal dispose de nouveaux passeports diplomatiques soumis à de nouvelles règles d’attribution, par conséquent non-accessibles à tout le monde. L’annonce a été faite hier, par la ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, Aïssata Tall Sall, devant les députés, lors du vote du budget pour la gestion 2021 de son département.
Le gouvernement du Sénégal a finalement décidé de mettre de l’ordre dans la délivrance des passeports diplomatiques. Et l’effectivité des nouveaux passeports diplomatiques a été revendiquée par les parlementaires qui ont souhaité, hier, lors du vote du budget 2021 du ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, que les difficultés auxquelles ils sont confrontés dans l’acquisition de ce document soient réglées. Il a également été demandé au ministre la mise à disposition de note verbale pour faciliter l’utilisation des passeports diplomatiques et l’acquisition des passeports de service.
Répondant à leurs préoccupations, la ministre Aissata Tall Sall a souligné que ce sont des documents qui caractérisent l’identité et la notoriété du pays qui le délivre. De plus, elle a révélé que le Sénégal dispose de nouveaux passeports diplomatiques soumis à de ‘’nouvelles règles d’attribution, par conséquent non-accessibles à tout le monde’’.
Car, à ses yeux, ce nouveau passeport doit être ‘’fiabilisé et crédibilisé’’, notamment par ses titulaires.
Aussi, a-t-elle informé que ce nouveau passeport diplomatique est produit au pays par des Sénégalais et que les demandes de renouvellement dudit document seront traitées dans les 48 heures. Dans la même dynamique, elle a fait savoir que son département prendra des dispositions pour assurer la délivrance des notes verbales aux parlementaires qui en feront la demande. Puisque, dit-elle, en tant que détenteur légal d’un passeport diplomatique, il serait normal de bénéficier dudit document.
Recensement des Sénégalais de l’extérieur
La successeuse d’Amadou Ba à la tête de ce département a souligné, face aux parlementaires, que les priorités vont également porter sur quelques actions, dont l’urgence a été révélée au grand jour par la Covid-19. Il s’agit du recensement en cours des Sénégalais de l’extérieur, afin de savoir, avec la ‘’plus grande exactitude possible’’, combien sont-ils, où résident-ils et quelles sont leurs activités professionnelles. ‘’De telles données seront d’une grande utilité pour la formulation des politiques migratoires ainsi que pour la stratégie de veille à l’endroit de nos compatriotes vivant à l’étranger’’, dit-elle.
En ce qui concerne la délivrance des documents, la ministre des Affaires étrangères a admis que c’est un ‘’problème crucial’’ qui touche aussi bien les Sénégalais de l’extérieur que ceux résidant au Sénégal. Ainsi, elle a rassuré que ‘’tout le nécessaire a été mis en place’’ pour permettre à leurs compatriotes d’en disposer. De même, elle a indiqué qu’un ‘’travail remarquable’’ est en train d’être fait pour la sécurisation et la fiabilité de l’état civil.
Parmi les priorités de son ministère, Aïssata Tall Sall a relevé la dématérialisation et la simplification des procédures administratives au niveau des ambassades et consulats pour un ‘’service public simple, de proximité, moins coûteux et disponible à temps réel’’.
Et sur le recensement des Sénégalais de l’extérieur, elle a notifié l’obligation pour tout Sénégalais de s’enregistrer au niveau des ambassades. A ce propos, elle a informé que les services du secrétaire d’Etat auprès des Sénégalais de l’extérieur ont entrepris des démarches dans ce sens et que les résultats seront communiqués prochainement.
Plus 91 milliards d’autorisations d’engagement et 66 milliards de crédits de paiement
Il convient de souligner que pour la gestion 2021, le ministère des Affaires Etrangères et des Sénégalais de l’extérieur dispose d’une somme de 91 586 952 184 F CFA en autorisations d’engagement (AE) pour les programmes d’investissements. Les crédits de paiement (CP) destinés au fonctionnement de ce département sont fixés à 66 447 748 835 F CFA. Par rapport au budget, les députés ont demandé le renforcement du montant alloué au Fonds d’appui à l’investissement des Sénégalais de l’extérieur (Faise), dans l’accompagnement des Sénégalais.
Parallèlement, ils ont déploré la réduction des ressources du programme ‘’Promotion de la diplomatie économique’’ et invité la ministre à revoir les crédits alloués à la gestion des affaires consulaires, compte tenu de l’urgence dans l’amélioration de la situation des Sénégalais de la diaspora.
Relativement au Faise, Aïssata Tall Sall a reconnu qu’effectivement, la structure rencontre certaines difficultés relatives au financement. Par la même occasion, elle a salué les encouragements formulés à l’endroit de la directrice et dit avoir ‘’pris bonne note’’ des préoccupations et propositions des parlementaires pour le renforcement de ladite structure, au regard des résultats enregistré, dans le cadre de l’accompagnement des Sénégalais de la diaspora.
Poursuivant son propos, Mme Tall a informé que son département et le ministère de l’Economie vont ensemble, à travers d’autres canaux, notamment des programmes de financement tels que le DFC, trouver des fonds pour appuyer le Faise, afin qu’il puisse disposer de moyens additionnels de financement.
Pour sa part, le ministre des Finances et du Budget a aussi admis que les crédits alloués restent ‘’insuffisants’’, par moments, et ne sont pas totalement mobilisés. Il a aussi rappelé que cette structure a eu à bénéficier, depuis 2012, de plus de 10 milliards et que tous les montants investis l’ont été sur fonds perdus.
Ainsi, il a estimé que la politique de dotation du Faise doit être revue et invite son collègue à travailler dans ce sens.
D’après Abdoulaye Daouda Diallo, ce fonds présente des difficultés, car il ne réussit toujours pas, à l’instar de la Délégation pour l’entreprenariat rapide, à décrocher un appui des partenaires techniques et financiers. Le ministre des Finances affirme que ces derniers estiment que la structure est plutôt dans une ‘’politique de distribution et non pas dans la création de fonds revolving’’.
1,7 milliard de crédits pour le Faise
Cependant, Abdoulaye Daouda Diallo a signalé que les crédits alloués au Faise ont enregistré une hausse pour 2021. En effet, le budget est passé à 1,7 milliard de francs CFA avec 940 millions d’investissements et 750 millions pour le fonctionnement. Malgré cette hausse, le ministre a reconnu que depuis 2017, les mobilisations pour cette structure ont été par moments inférieures à 50 % notamment en 2018 où la mobilisation était de 600 millions F CFA sur les 1,4 milliard de F CFA de dotation initiale.
Il a, par ailleurs, relevé que des efforts ont été faits depuis 2019 avec plus de 50 % dans la mobilisation des ressources. A ce propos, il dira que 74 % ont été mobilisés en 2019 et 750 millions F CFA ont été mobilisés sur une dotation d’un milliard de F CFA en 2020. Il a rassuré que son département va renforcer ces efforts pour aider ce programme à atteindre les objectifs qui lui sont assignés.
Le ministre des Finances a, en outre, indiqué que le budget du programme ‘’Promotion de la diplomatie économique’’ a connu une baisse de 220 millions au profit du programme ‘’Coopération bilatérale et multilatérale’’. ‘’De manière générale, les dotations du ministère ont augmenté, surtout concernant les crédits alloués aux ambassades qui sont passés de 46 milliards à plus de 50 milliards’’, a-t-il ajouté.
Plus de 300 Sénégalais retenus à Ségou, au Mali
Relativement à la situation des Sénégalais de l’extérieur, les députés se sont appesantis sur les difficultés auxquelles ces derniers sont confrontés dans leurs pays d’accueil. Elles sont, généralement, liées à des lenteurs et lourdeurs administratives dans le renouvellement et l’acquisition de documents, notamment les actes d’état civil, ainsi qu’à l’absence d’assistance juridique. Par conséquent, ils ont invité la ministre de tutelle à accorder une ‘’attention particulière et un traitement diligent’’ à la situation des Sénégalais établis à l’étranger.
A cet effet, ils ont préconisé la réouverture du consulat du Mali et la mise en place d’une représentation consulaire à Barcelone, au regard de la forte communauté sénégalaise présente dans cette ville. Ils se sont également renseignés sur le projet de mise en place d’un consulat à Bordeaux.
Il faut noter que les parlementaires ont déploré les nombreux cas d’assassinat et de détention de leurs compatriotes à l’étranger. A ce propos, ils se sont informés sur la situation de plus de 300 Sénégalais retenus à Ségou, au Mali, et sur le nombre de Sénégalais incarcérés dans les prisons à l’étranger. Aussi, ont-ils préconisé le renforcement de la coopération judiciaire avec les pays tiers.
Dans cet ordre d’idées, il a été recommandé la mise en place d’une cellule de veille et d’alerte pour assister nos compatriotes vivant à l’étranger.
Face à ces interpellations, Aïssata Tall Sall a aussi déploré les conditions carcérales des Sénégalais condamnés à l’étranger et a indiqué que l’Etat a signé des accords d’extradition avec beaucoup de pays. Toutefois, elle a précisé qu’il faut des conventions particulières pour faire rapatrier les Sénégalais qui purgent des peines à l’étranger et a promis, à cet effet, que son département portera une attention particulière à ce problème.
Dès lors, elle est revenue sur les cas des consulats du Sénégal en Arabie saoudite et au Mali. A ce propos, elle a soutenu que le souhait du président de la République est de mettre les ambassades du Sénégal dans des immeubles appartenant au Sénégal, comme c’est le cas de l’ambassade du Sénégal à Abuja.
Par conséquent, elle a rassuré que des réflexions seront menées, d’une part, pour trouver des ‘’solutions idoines’’ au consulat du Sénégal à Djeddah et, d’autre part, pour la réouverture du consulat au Mali, compte tenu du travail remarquable de l’ambassade et de la présence de plus en plus élevée de Sénégalais dans ce pays. Elle a aussi fait part de la rationalisation des effectifs et des ressources du réseau diplomatique, qui va aller de pair avec l’édification de complexes diplomatiques dans la sous-région, notamment en Mauritanie et au Mali.
Emigration irrégulière
Evoquant le phénomène de l’émigration irrégulière qui est d’actualité, les députés ont exhorté la ministre à renforcer la communication et la sensibilisation autour du fléau et ses conséquences, ainsi que sur les mesures initiées par le gouvernement pour lutter contre cela.
A ce propos, Aïssata Tall Sall a informé que toute une industrie s’est développée autour de ce phénomène et a appelé à déconstruire le discours, à réprimer les passeurs et à soutenir par l’action.
A ce propos, elle a magnifié les efforts du président de la République, à travers la mise en place de structures, de programmes et de mécanismes, notamment la Der principalement dédiée aux femmes et aux jeunes. A cela s’ajoute, d’après elle, la surveillance des côtes sénégalaises.
Sur ce même registre, elle a signalé, d’une part, la signature d’une convention ‘’Campus France-Sénégal’’ avec la France, qui permet à des professeurs et étudiants européens de venir enseigner et étudier au Sénégal. D’autre part, de la mise en place, par le président de la République, d’un comité interministériel pour que tous les départements ministériels concernés par la migration irrégulière puissent mener des actions de persuasion, de dissuasion et de répression contre l’émigration irrégulière.
D’après elle, ce comité piloté par le ministère de l’Intérieur comprend les départements des Affaires étrangères, de la Jeunesse, des Forces armées et des Pêches.
MARIAMA DIEME