Il est midi pile. Les étudiants de l’Institut africain de Management (Iam) sortent par groupes des cours, vêtus de leurs uniformes verts. La veste ou la jupe assorties d’une cravate sur laquelle sont floquées les initiales de cette « business school » nichée dans le quartier cossu de Mermoz, est de rigueur. Depuis prés de vingt ans maintenant, l’Iam est devenu un creuset de formation d’une élite qui vient de tous les pays du continent. Plus d’une vingtaine de nationalités sont représentées dans cet établissement, où près de la moitié sont des étudiants d’origine étrangère. Ils proviennent en majorité des pays de l’Afrique de l’ouest – notamment la Mauritanie, le Mali, la Guinée – ainsi que des pays de l’Afrique centrale dont essentiellement le Gabon, le Cameroun et le Congo. Et l’Iam n’est pas le seul établissement dans ce cas. On peut en dire autant des universités Cheikh Anta Diop et Gaston Berger, de Ism, Sup de Co… et la liste est loin d’être close. C’est la meilleure preuve de la réputation de qualité de notre système d’enseignement supérieur public comme privé, en dépit des critiques les plus virulentes que l’on entend ça et là.
En effet, la majorité des étudiants a choisi la destination Dakar pour la poursuite de leurs études supérieures en tenant compte de plusieurs aspects, au premier rang desquels : la qualité de la formation et la reconnaissance des diplômes que l’on ne trouve pas forcément ailleurs en Afrique. La proximité du Sénégal par rapport à l’Europe, le coût acceptable des études par rapport à la qualité, sont également des motifs valables qui poussent certains étudiants et leurs familles à préférer Dakar pour leur formation. Ces deux derniers facteurs ont été déterminants dans le choix opéré par Mariata Dieng. Cette fille de petite de taille, les yeux pétillant d’intelligence, un sourire constant sur les lèvres, a choisi Dakar pour des raisons familiales. « Ma grande sœur étudiait déjà à Dakar », note-t-elle. Elle se destinait à faire des études de médecine à l’Université Cheikh Anta Diop. Mais, faute de place, Mariata Dieng s’est résolue à s’inscrire en banque et finance à l’Institut africain de management. « Il y a un rapport qualité prix qui est évident et qui a été déterminant dans mon choix. Il n’y a rien à dire par rapport à la qualité. Mais, les étudiants étrangers viennent surtout à Dakar pour la reconnaissance des diplômes du privé à l’international. La plupart des écoles ont des accréditations du Cames ou font de la co-diplomation », admet-t-elle.
Plan B
Pour Laeticia, grande de taille, la vingtaine passée, le fait de venir à Dakar n’a été qu’une sorte de plan B. « Mon premier choix était de partir en France pour mes études supérieures. Lorsque ce projet a échoué, Dakar a été mon plan B, dans la mesure où j’avais une idée de la qualité de la formation à Dakar. La bonne réputation de certaines écoles privées dépasse les frontières du Sénégal. Les diplômes sénégalais sont reconnus un peu partout », souligne-t-elle. Comme elle, beaucoup d’étudiants étrangers qui poursuivent leurs cursus à Dakar l’ont choisi par défaut. Une bonne partie d’entre eux rêvaient d’études supérieures aux Usa, au Canada ou en France. C’est donc contraints qu’ils ont jeté leur dévolu sur le Sénégal où, en plus, ils étaient sûrs de trouver une formation de qualité capable de leur garantir une brillante carrière. De plus, à Dakar, les étudiants étrangers ne sont pas dépaysés comme cela aurait été le cas s’ils étaient allés en Europe. « On n’a pas de problème d’intégration à Dakar. Si on n’a pas de parents ici, on y a au moins des compatriotes. C’est comme si l’on était chez nous. Le Sénégal et la Mauritanie c’est pareil », estime Mariata Dieng qui comprenait bien la langue wolof, avant même de venir. Mais pour les autres originaires des pays de l’Afrique centrale, l’intégration se fait toujours pas à pas. « Je ne me suis pas encore adaptée », dit Laeticia.
Faute d’école de vétérinaires en Côte d’ivoire, Emmanuel Dri Konan a débarqué en 2011 à l’Ecole inter-états des sciences et médecine vétérinaires de Dakar. Nullement dépaysé, il est d’avis que la différence entre le Sénégal et les autres pays, c’est au niveau de la qualité des professeurs. « En matière d’enseignement, le Sénégal ne peut pas être comparé aux autres pays. Le Sénégal est leader dans ce domaine. Les cadres de nos pays sont formés à Dakar. Pour des années encore, les étudiants étrangers viendront se former au Sénégal », croit-il savoir. Reste que tous les étudiants étrangers déplorent la cherté de la vie à Dakar. « Dakar est la ville la plus chère au monde. La location est hors de portée », regrettent en chœur les étudiants étrangers, qui, pour s’en sortir, reçoivent régulièrement de l’argent de leurs parents restés au pays. C’est le cas de cet étudiant marocain en deuxième année de médecine à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, qui ne bénéficie que d’une modeste bourse de 36 000 francs de l’Etat du Sénégal. Pour lui permettre de payer sa location de 60000 francs à la Gueule tapée et faire face aux autres dépenses, ses parents lui envoient chaque mois 150 000 francs. A l’en croire, chaque année plus de dix étudiants de son pays sont contraints d’abonner leurs études à Dakar, car ne pouvant plus faire face à ces charges si élevées.
Mamadou SARR
lagazette.sn
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