La candidature d’Abdoulaye Wade à l’élection présidentielle de 2012 relève surtout d’une question de ‘’conformité à la constitution’’ et non de ‘’recevabilité’’ ou d’‘’irrecevabilité’’, a soutenu le professeur de droit Ismaïla Madior Fall.
‘’Sur la candidature du président en fonction à la prochaine élection de 2012, on parle de recevabilité ou d’irrecevabilité. Mais, c’est surtout une question de conformité à la constitution’’, a-t-il souligné samedi soir.
Le professeur Fall s’exprimait lors d’un diner-débat sur le thème : ‘’Perspectives 2012 : la question des candidatures et le jeu des alliances’’, organisé par Vision socialiste, la structure regroupant les cadres du Parti socialiste (opposition).
‘’Autrement dit, en vertu de la nouvelle constitution du 22 février 2001, est-ce que le président de la République peut encore faire acte de candidature à la prochaine élection présidentielle ?’’, s’interroge le juriste.
Pour l’enseignant en droit constitutionnel à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), la question se pose au regard de deux dispositions de la constitution, notamment les articles 27 et 104.
Selon lui, l’article 27 stipule que ‘’le président de la République est élu pour un mandat de 5 ans’’, en indiquant que ‘’le président Wade a eu son mandat renouvelable une seule fois’’.
Pour le constitutionnaliste, le président Wade a été élu en en 2000 pour un mandat de 7 ans. Entre temps, la durée du mandat à été réduite à cinq ans. Donc, a-t-il indiqué, ‘’il poursuit son mandat jusqu’à son terme et cela veut dire qu’il ne doit pas faire cinq ans, il doit faire sept ans’’.
‘’Pour la durée du mandat, c’est clair, il n’est pas question de lui appliquer le nouveau mandat de cinq ans. Le peuple sénégalais qui l’avait élu pour sept ans, on ne doit pas lui emmener un nouveau président sous le prétexte qu’il y a une nouvelle constitution’’, a estimé le professeur Fall.
‘’Sous prétexte que les dispositions de la constitution ne sont pas claires, on a eu droit à deux interprétations : la première qui défend la thèse de la recevabilité du président candidat, considérant que le président a fait un premier mandat en 2000’’, a-t-il fait observer.
‘’La constitution date de février 2001. Comment peut-elle être rétroactive pour la période antérieure ?’’, s’est interrogé le constitutionnaliste, en ajoutant que d’autres défendent que dans toutes les dispositions de la constitution, le constituant a bien intégrer la question de la limitation des mandats.
‘’La question de la limitation des mandats est une chose sérieuse, c’est la disposition la plus sacralisée dans la constitution. D’ailleurs, c’est la seule disposition dont la modification requiert un référendum’’, a-t-il insisté.
L’universitaire a déploré ‘’une instabilité’’ de la durée du mandat du président de la République au Sénégal. II estime qu’en 2000, il y a eu ‘’une nouvelle philosophie politique ». Il a relevé qu’il n’est plus question de s’éterniser au pouvoir. Deux mandats semblent être conformes à l’aspiration démocratique des Sénégalais.
‘’La déclaration interprétative du président Wade est un élément juridique. Son témoignage est important, parce qu’il est le fondateur de la constitution de 2001, il est la clé de voûte de la constitution. Le juge ne peut pas ignorer cette déclaration’’, a-t-il fait remarquer.
‘’Le juge suivra-t-il ou défiera-t-il la doctrine majoritaire ? Il reste à savoir. Mais, tout compte fait, ce plaidoyer qui s’articule autour du droit pour faire évaluer la candidature du président sortant ne participe pas à la stabilité du pays (à un an du scrutin)’’, a plaidé le constitutionnaliste.
Selon lui, la pression sur le Conseil constitutionnel est elle que si elle déclare l’irrecevabilité du président sortant, c’est le pays qui va être chaos. ‘’Devant un tel risque, soutient Ismaïla Madior Fall, le président Wade doit renoncer à sa candidature pour une alternative très forte.’’
APS