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Pr MARIEME BADIANE, Chef du département d’anglais de l’Ucad âme sensible

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Comment ce professeur d’université dégoulinant de douceur maternelle s’est retrouvé dans le monde « fétide » de la politique ? La clé de l’énigme se trouve dans les valeurs portées par son président Macky Sall de l’Apr.

Elle est entrée en politique comme on entre en mariage. La force irrépressible des passions. Universitaire, actuel chef du département d’anglais de la faculté des lettres de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad), Marième Badiane s’est mariée un peu tard à ce monde impitoyable. Mais, elle a réussi l’essentiel dans ce registre. Parce qu’elle s’est bien « mariée ». Comme on dit chez nous, chaque fois que le conjoint a une bonne position sociale. Certes, « La Force irrépressible des passions » laisse peu de place à la raison. Et fait faire sur un coup de tête des « folies ». Nombre de ses étudiants découvrent, en effet, quelque peu effarés que leur ancien professeur est…la présidente du Mouvement national des femmes de l’Apr. Sensible, pleine de douceur maternelle, Mme Bâ, pour ses étudiants, a dû se faire violence pour entrer dans ce monde de requins. « On l’attendait ailleurs », pour user d’un langage trivial. Car cette dame si fragile, qui pleure vite, n’a pas la gangue dure, ni le cœur d’un héros de film d’action. D’ailleurs, elle confesse avoir décliné plus d’une offre politique. Et renoncé tout le temps à assumer les charges de chef de département. « Mes enfants d’abord » a été sa ligne de conduite. « C’est une très bonne maman », « Elle est extraordinaire ! », « C’est la maman des étudiants », « C’est notre recteur ! ». Un torrent d’éloges qui trahit sa réputation de « mère-poule » dans un milieu rebelle comme l’université. Et passe pour l’antithèse du mental d’acier qui navigue, pourtant, en elle.

Ne vous fiez pas à la tonalité attendrie de sa voix ! Ni aux larmes de collégienne qu’elle versait après avoir lu Jane Eyre. « J’ai séché mes larmes », prévient-elle. La terrible persécution vécue par son mentor, Macky Sall, président de l’Apr, est passée par là. Elle, qui a craqué le jour où elle a trouvé l’ex-président de l’Assemblée nationale, débarqué du perchoir, en train de faire ses cartons. Elle a retenu des images chocs de cet épisode fétide de la politique. C’est le cas lorsque Macky, amaigri, les mains ouvertes lui disant, dans son bureau : « heureusement, je n’ai pas pris leur argent ! » La persécution d’un homme « juste, travailleur et honnête » l’arrache de la neutralité. Marième Badiane bascule dans la politique militante. Et exhume le fonds argumentaire de son engagement.

Jeune professeur à l’Ucad, elle découvre son leader sur les bancs de l’Institut des sciences de la terre (Ist) où elle donne des cours complémentaires. Un euphémisme pour dire qu’elle se livrait ainsi au travail au noir. « Mon mari décédé, je suis seule à la barre », justifie-t-elle. « Courtois, discipliné, correct et brillant », Macky, reconnaissant ne cessait, une fois le Pds aux affaires, d’appeler son ancien prof. Ce dernier résiste jusqu’au jour où, partie féliciter son ancien étudiant promu Premier ministre, il se voit supplier d’accepter le poste de conseillère à la primature. Elle s’applique à merveille dans sa nouvelle fonction, s’attire l’admiration du Pm et rate de peu, au lendemain des Législatives de 2007, d’entrer dans le gouvernement. A l’Apr où elle est cooptée au poste de présidente du Mouvement national des femmes, Marième Badiane est sur le pied de guerre. « C’est le côté sale de la politique que nous voulons laver. C’est bien possible avec Macky Sall. C’est un garçon pétri de qualités et travailleur ». Voilée, le visage barré de lunettes correctrices, Mme Bâ, a un caractère en tiroirs.

« C’est le côté sale de la politique que nous voulons laver. C’est bien possible avec Macky Sall. C’est un garçon pétri de qualités et travailleur »

Normalienne, Marième Badiane a travaillé dur chez sa tante. Cette seconde maman, sœur cadette de sa mère, n’avait que des garçons. Un don de Dieu qui arrache des convoitises ailleurs « écrase » cette femme de servitudes ménagères. Marième dont la mère n’avait mis au monde que des filles est alors envoyée suppléer sa tante dans les travaux domestiques. Elle s’en acquitte telle une contrainte religieuse. « Je ne voulais pas qu’elle touche à quoi que ce soit », se souvient-elle. Ce caractère forgé dans la pugnacité est une sorte de viatique chez elle.

Son premier choc avec l’anglais en témoigne. Le 09/20 qu’elle récolte à la première composition en classe de 6è cisaille son enthousiasme. Elle en est meurtrie et dans sa cervelle résonne encore les mots de compassion de son condisciple Ndèye Diodio Badiane. Mais, dès la classe de 5è, elle s’en relève pour de bon. Et brille de mille feux dans la langue de Shakespeare. Marième Badiane est née le 24 septembre 1946 à Dakar. Son père, instituteur, a pesé de toute son influence dans son cursus scolaire. Admise à l’entrée en 6è et à l’Ecole normale des jeunes filles de Rufisque, elle choisit cette dernière qui conduit à l’enseignement. C’était l’époque où les instituteurs suscitaient tant d’admiration. Après le Bepc (classe de 3è), elle fait cap sur Saint-Louis au lycée Ameth Fall, puis revient à Thiès où toutes les « normaliennes » sont regroupées à l’Ecole normale des jeunes filles. En 1967, Marième décroche son bac philosophie. Classée deuxième, les portes de l’université lui sont alors ouvertes. Tout comme celui du premier mariage. Là, c’est tout un ravissement de l’entendre répandre tant de sensibilité et d’affection à la Shakespeare sur ce premier prince, aujourd’hui disparu. « Un grand monsieur ! », concède-t-elle à lâcher dans un élan trop enflammé. Puis, freine net des quatre fers. Le climat s’alourdit subitement dans son salon où le marron, couleur de son parti l’Apr, règne en maître. Heureusement, elle ne pleure pas. Des larmes qu’elle a dû réprimer grâce, sans doute, au silence de quelques secondes qu’elle s’est imposée. Quelques souvenirs déchirants coulent, tout de même, de sa mémoire. Et elle évoque furtivement ces virées à Soumbédioune durant lesquelles, son mari, pour lui épargner d’être happée par le sable marin collant allait lui-même chez les poissonniers. C’est encore ce mari qui coupait son sommeil et la contraignait à aller à la fac. Alors qu’elle accusait les spleens de la grossesse et se plaisait à prolonger son sommeil. Ou lui arrachait les bottes quand elle revenait de la fac, en France. C’est cet époux, M. Ndiaye, qui lui a donné son premier patronyme d’enseignant à l’Université. Qui sait, c’est peut-être aussi cet homme qui a bâti la philosophie qu’elle a de l’époux. « Le mari ? C’est insaisissable ! Il est plus fort que le père et la mère. On lui souhaite une réussite sociale qu’on ne souhaite pas à ses parents ou à ses frères », lance-t-elle. Pourtant, que d’atermoiements quand la question de son mariage s’est posée.

« Le mari ? C’est insaisissable ! Il est plus fort que le père et la mère. On lui souhaite une réussite sociale qu’on ne souhaite pas à ses parents ou à ses frères »

« Au départ, mon père était réticent. Il a, à demi-mots, refusé. Ce mariage, c’est ma mère et ma tante qui y tenaient. Je ne disais rien face aux hésitations de mon père. Mais, c’est connu, « qui ne dit rien consent », se souvient le chef du département d’anglais de la faculté des lettres de l’Ucad. A coup sûr, ce père reconverti dans les affaires a dû flairer que sa fille avait une bonne carte à jouer dans les études. Mais, à l’université où elle débarque en 1968, un revers l’attend. Prise dans le tourbillon de la ferveur militante et contestataire estudiantine, elle fait le piquet de grève. Alors que son père ne cessait de l’en dissuader. Pour une étudiante-fonctionnaire, l’audace était périlleuse. Elle est alors renvoyée de l’université. La voilà à l’Ecole normale supérieure (actuelle Fastef) comme c’était la règle. Un nouveau challenge se dresse devant Marième. Devenue professeur au lycée John F. Kennedy, elle s’inscrit à la fac, allie les deux et finit par décrocher la licence. Sa résignation se mue en rédemption quand Marième doit suivre son mari affecté en France. Les portes de la Sorbonne s’ouvrent devant elle après un test réussi. Le professeur encadreur, établi à l’Institut d’anglais, sis à 5, rue de l’Ecole de Médecine dont la réputation faisait frémir lui avait demandé d’écrire dix pages en anglais sur son sujet.

Dans l’Hexagone s’engage une nouvelle vie quasiment sans pitié malgré une grossesse de deux mois.

Il fallait allier des cours qui allaient jusqu’à 22 h, un ventre qui ne cessait d’enfler et plus d’un kilomètre sous la neige. Dans le bus ou le métro, tard le soir, sur le chemin du retour en banlieue, elle s’armait de sachets où elle vomissait de temps en temps. La maîtrise en poche, elle s’inscrit en Dess en anglais spécialisé. Ces moments de souffrance ont pour elle une incarnation vivante. C’est Sadibou. Grand et bagarreur, ce garçon, devenu ingénieur, est né juste après qu’elle a soutenu son mémoire de Dess. Elle rêve alors d’un job à la Bceao. Mais son mari n’a pas fini. L’aventure continue. Elle s’inscrit en Dea littéraire. Puis, pour sa thèse, se fait convaincre par son encadreur qui lui demande de se détourner des sentiers battus. C’est un nouveau contraste qui s’immisce dans sa vie. Ame sensible et cœur fragile, Marième Badiane choisit une œuvre marginalisée, Jonathan Wild qui raconte l’histoire du plus célèbre bandit britannique du 18ème siècle. Là où on l’attendait dénouer par exemple le drame de Hamlet. En 1985, elle débarque à l’Ucad, décroche un poste d’assistant grâce à Moctar Bâ, « un père et un maître pour moi ». Après quelque 30 ans de carrière, Marième Badiane, très peu affectée par ses maternités d’enfer, mariée une troisième fois, a décidé de garder son nom de jeune fille. Comme elle garde depuis 27 ans la même cuisinière. Désormais à la retraite, elle caresse le rêve de pleurer au soir du 26 février 2012. Pas à cause de Jane Eyre. Mais du bonheur de voir Macky Sall élu Président. Good Luck âme sensible !

Hamidou SAGNA


2 Commentaires

  1. Parmi ts lé profs du département d’anglais c elle q j respecte le plus hommes et femmes confondus.Elle voue bcp d respect aux étudiants. Elle n connaitra q succés,Je ladore cette dame.
    Mais rectifié vs él né plus chef d département !

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