Directeur de la société Abs Sa, Pape Samba Diassé, un des co-prévenus de Karim Wade, a récusé, hier, le réquisitoire du Parquet spécial et l’arrêt de renvoi. L’ancien comptable de «Bourgi transit» a souligné que la société Abs Sa, dont il est propriétaire, n’est pas établi aux îles vierges britanniques et n’a pas de compte à Monaco.
Poursuivi pour aide et assistance dans la facilitation et la consommation des faits d’enrichissement illicite à Karim Wade, Pape Samba Diassé, un des co-prévenus de l’ancien tout-puissant ministre d’Etat, a nié, hier, tous les faits qui lui sont reprochés par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei).
Devant la barre, le directeur de Aéroport bus service (Abs Sa) a d’emblée tenu à faire une précision de taille : «C’est la société Abs coorporate, une société d’assistance technique et de vente des bus Cobus qui est basée aux îles vierges britanniques avec un compte à Monaco et non Abs Sa. Abs Sa, une société de transport des passagers à l’aéroport international de Dakar, dont je suis le propriétaire, n’est pas une filiale d’Abs coorporate. Cette société est née d’Abs Sa. Maintenant, si on dit que les deux sociétés ont la même comptabilité à Monaco, cela est relativement faux», a répondu Pape Samba Diassé, suite à une série de questions du Parquet spécial sur la constitution de ces deux sociétés.
Sur sa lancée, l’ancien comptable de «Bourgi transit» de souligner : «C’est Ibrahim Abou Khalil qui est le seul signataire du compte de Abs coorporate pour ce que j’en sais. Je détiens 50% et Abou Khalil 50%. Jamais, je n’ai servi de prête-nom à qui que ce soit».
Selon lui, «c’est Bibo qui a effectué toutes des démarches. Et ni Pape Mamadou Pouye ni Karim Wade ne sont actionnaires d’Abs Sa ou Abs coorporate. Je ne connais pas Karim Wade, je ne le connais que de nom, comme beaucoup de Sénégalais».
A propos de la ligne téléphonique sur laquelle le Parquet spécial a beaucoup insisté et qui aurait été utilisée dans les affaires de la société Daport, le prévenu a assuré que cela ne le concernait pas. «Moi, j’ai remis cette ligne à Bibo pour le compte d’Abs coorporate. Si la ligne est utilisée autrement, ce n’est pas mon problème. Et c’est lui qui m’a fait savoir que ce projet d’Abs coorporate ne l’intéresse plus. S’il se retire, alors je suis le seul propriétaire», at- il dit.
Quant à la constitution de la société Abs Sa, Pape Samba Diassé a revendiqué à 100% la propriété de cette société. «J’ai créé la société Abs Sa en 2002. Au départ, c’est 45% pour moi, 45% pour un Allemand répondant au nom de Wolfgang, porté par Véronique Manga, et 10% que m’a portés Fatou Babou. Et c’est moi qui ai libéré le capital au finish avec une augmentation de 240 millions de F Cfa. 30 millions de F Cfa que j’ai reçus de mon beau-frère, et le reste, c’est le fruit de mes propres économies. Transit, change et vente (Thiouraye)», a soutenu M. Diassé. Le co-prévenu de Karim Wade de marteler : «Je n’ai jamais misé sur personne dans ma vie. Je me suis fait tout seul, personne ne m’a aidé parmi tous ces gens-là. Telle est ma démarche, et jamais je ne changerai. Ce qui m’a amené à l’aéroport de Dakar, c’est parce que j’avais le produit. Car j’étais déjà avec Cobus».
Aussi, à l’image de Pape Mamadou Pouye, Pierre Agboba ou Mbaye Ndiaye, Pape Samba Diassé a également déploré les conditions dans lesquelles son audition s’est déroulée face à la commission d’enquête. «C’est depuis la gendarmerie que j’ai commencé à marcher avec une béquille. Je suis resté jusqu’à 1 h du matin sans boire ni manger et ni prendre mes médicaments. Alors que j’avais bien déclaré que j’étais gravement malade. Et quand je me suis levé, je suis tombé. Et voilà, depuis lors, je marche comme ça», a raconté Pape Samba Diassé à la Cour.
MERE DE LA DOMESTIQUE DE PAPE MAMADOU POUYE : Véronique Manga est propriétaire de 45% des actions de la société Abs Sa
Véronique Manga, celle-là même qui détient les 45% des actions de la société Abs Sa de Pape Samba Diassé, est la mère de la domestique de Pape Mamadou Pouye, un des co-prévenus de Karim Wade. C’est ce qu’a révélé, hier, le président de la Cour, Henri Grégoire Diop. Ce dernier qui n’a pas voulu s’épancher sur cette troublante coïncidence a demandé à Pape Samba Diassé d’éclairer sa lanterne.
Le directeur de Abs Sa a indiqué qu’il n’était pas au courant de ce lien. «Quand le marché a été lancé par l’Asecna, nous sommes partis prendre le cahier de charges pour tenter notre chance. Au début, j’étais actionnaire à 45% de cette société et 45% pour un Allemand répondant au nom de Wolfgang porté par Véronique Manga et 10% d’actions qu’a portés Fatou Babou. Mais, je ne suis pas au courant de ce lien», a répondu Pape Samba Diassé.
Et de poursuivre : «C’est une grande surprise. Je ne le savais pas. Cette question doit s’adresser à Wolfgang qui, depuis l’Allemagne, a fait une déposition, pour indiquer que Véronique Manga est sa copine. C’est lui qui a choisi de se faire représenter comme ça», a souligné l’expert-comptable.
D’après M. Diassé, c’est lui-même qui avait demandé à Wolfgang d’identifier une Sénégalaise pour porter ses actions. «C’est ainsi qu’il m’a donné le nom de sa copine, Véronique Manga. La raison est simple, moi, je voulais contrôler la société. Mais, je ne connais même pas Pape Mamadou Pouye. Je l’ai croisé une seule fois avec Bibo qui m’a dit qu’il est son collaborateur. Coïncidence ou réalité, en tout cas, je ne suis pas au courant», a conclu Pape Samba Diassé
AUDITION AVORTEE DE BIBO BOURGI DANS UNE CLINIQUE : Les avocats de Karim Wade se défoulent sur Henri Grégoire Diop
Les avocats de Karim Wade ont fustigé, hier, le fait que la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) se soit rendue dans la clinique où est interné Ibrahim Abou Khalil Bourgi dit Bibo dans le dessein de l’auditionner.
Me Madické Niang et ses collègues jugent cette démarche très grave vis-à-vis des droits de la défense. «La défense a été informée par la presse, que la Cour s’est déplacée pour aller entendre Ibrahim Abou Khalil Bourgi dit Bibo sur son lit d’hôpital. Nous voulons être édifiés sur une telle démarche. Mais, sachez que si cela est avéré, alors c’est une atteinte grave aux droits de la défense», martèle l’ancien chef de la diplomatie sénégalaise. De l’avis des conseils du fils de Me Wade, il n’y a pas de raison grave qui puisse justifier un déplacement dans une structure hospitalière pour écouter un prévenu gravement malade. «On n’aurait pu obtenir que chaque partie soit au moins représentée.
Nous avons tous besoin de l’écouter, de lui poser des questions. C’est très grave cette attitude que vous avez adoptée vis-à-vis de notre justice», a lancé Me Niang à l’endroit de la Cour.
D’ailleurs, a-t-il souligné : «C’est la première fois dans l’histoire du Sénégal qu’une Cour se déplace dans un hôpital pour procéder à l’interrogatoire d’un prévenu. S’il vous plaît, revenons au respect des droits humains que le Sénégal a bien ratifiés. C’est pourquoi nous voulons que vous nous donnez acte au plumitif que cette démarche est déplorable».
Prenant la parole, le président de la Cour a expliqué à Me Madické Niang qu’ils n’ont fait qu’appliquer strictement l’article 403 du Code de procédure pénale. «Si le tribunal ordonne par décision spéciale et motive que le prévenu, éventuellement, assisté de ses conseils, soit entendu, nulle part, il n’est mentionné les avocats des autres prévenus dans l’article 403. Ni la défense ni la partie civile et ni le Procureur spécial n’ont été avisés. Par contre, les avocats de Bibo étaient bien présents», a dit Henri Grégoire Diop.
Le Populaire via Seneplus