XALIMANEWS- Un malade du covid-19 en réanimation coute 500mille francs CFA par heure. La révélation est du Dr Mamadou Diarra Bèye, urgentiste et directeur du Samu national.
L’équation de la prise en charge de personnes atteintes de Covid-19 est complexe et nécessite quelquefois des moyens assez conséquents. Mais, le vrai challenge, selon le Pr. Oumar Kane, chef du Service Anesthésie et Réanimation de l’hôpital de Fann, reste la prise en charge des cas graves qui demandent une assistance particulière et des soins intensifs permanents. Dans la même foulée, le Pr. Mamadou Diarra Bèye du Samu national a tenu à préciser qu’un cas simple de Covid-19 peut évoluer vers un cas grave, voire sévère. |
Le taux de la létalité des cas graves du nouveau coronavirus est très élevé, compte tenu d’un tableau clinique de détresse très grave que présentent ces malades. « C’est une maladie qui touche le système respiratoire, donc qui fait que le malade n’a plus assez d’oxygène dans son organisme. Et on sait que tous les organes, pour fonctionner ou pour le métabolisme, ont besoin d’oxygène. Donc, si le poumon n’apporte pas assez d’oxygène dans l’organisme, tous ces organes qui ont besoin d’oxygène ne vont plus marcher correctement. Et du coup, ce sont des patients qui sont en stade très avancé et vont faire une défaillance multi viscérale. Donc, il y aura presque tous les organes qui vont être en souffrance », explique le Pr. Oumar Kane, Chef du Service Anesthésie-Réanimation de l’Hôpital de Fann. Ainsi, pour répondre à ces multi-défaillances des organes, plusieurs appareils, instruments et médicaments sont mis à contribution pour maintenir le malade en vie. « Quand on comprend bien la réanimation, c’est la suppléance des organes qui dysfonctionne. Donc, on utilise des appareils, des instruments pour suppléer ces organes qui dysfonctionnent, qui ne marchent pas bien. Et, si nous avons deux à quatre organes qui ne marchent pas bien en même temps, ça devient très lourd ! Quand ils sont graves, il sont vraiment graves », a ajouté le Pr. Oumar Kane. Venant en appui au Pr. Oumar Kane sur la complication des cas graves et sévères, le directeur du Samu national, le professeur Mamadou Diarra Bèye, ajoutera : « ce qui fait la gravité de cette infection, c’est que les patients vont présenter non seulement un problème respiratoire mais aussi ils peuvent dans l’évolution de la maladie, présenter des défaillances d’autres organes qui sont des organes indispensables à la vie. Raison pour laquelle de temps en temps, le patient ne parvient pas à assurer ses fonctions d’épuration du rein ». Et de poursuivre : « d’où le besoin de dialyse, de certains médicaments pour lui permettre de survivre. On a noté de temps en temps également, une exagération des phénomènes de coagulation, des phénomènes de thromboses, des caillots qu’on peut noter un peu partout. Donc, de plus en plus dans les recommandations, on demande de mettre les malades sous anti coagulant au départ préventif. Les études sont en train de voir s’il ne faut pas mettre systématiquement un traitement anti coagulant de façon curative. Ceci dit, dans l’évolution de la maladie, il y a beaucoup de choses qui se passent, il y a beaucoup de choses qu’on n’a pas encore fini de comprendre». Par ailleurs, un cas simple peut au bout de quelques jours évoluer vers un cas grave, voire sévère. « De façon imprévisible, il a été noté que ces cas qu’on appelle des cas simples, peuvent évoluer vers la guérison ou peuvent au-delà du 5e jour s’aggraver et aller dans le cadre d’une évolution propre qui n’aura parfois plus rien à voir même avec le virus lui-même », a déclaré Pr. Mamadou Diarra Bèye, directeur du Samu National. Et de poursuivre : « c’est d’autant plus fréquent quand la personne infectée présente des tares. Mais nous avons vu des aggravations secondaires où il n’y avait pas de cas particulier » Réanimation et Gestion des personnels « Il arrive que les malades soient sous un apport d’oxygène considérable, plus de 10 litres par minute. On a eu deux à trois patients qui étaient presque sous 15 litres d’oxygène par minute, pendant des jours et des jours, et qui passent le cap de guéris secondairement », a expliqué le directeur du Samu National. Mais dans certains cas d’aggravation, explique-t-il, c’est le système immunitaire du malade lui-même qui s’attaque au malade par un syndrome d’inflammation sévère. « Mais il arrive qu’au-delà de l’infection elle-même, le virus à l’intérieur de l’organisme active ce qu’on appelle une immunité. Cette immunité va se déclencher par un syndrome inflammatoire suite à la présence des médiateurs qui sont libérés dans le sang, qu’on appelle des cytokines. Il arrive de temps en temps que la réponse développée par l’organisme soit excessive et quand c’est le cas, c’est cette réponse qui s’attaque lui-même aux patients », a expliqué le Pr. Mamadou Diarra Bèye. Et d’ajouter : « c’est dans ces cas que le tableau des détresses respiratoires connait une aggravation, sous le tableau d’une très grosse insuffisance respiratoire qui nécessitera une ventilation artificielle et des moyens de réanimation très poussés». Le Pr Bèye va révéler par la suite que le Sénégal a eu beaucoup de malades en réanimation et pour ce qui ressort de l’analyse des cas de décès, il s’agit selon lui des personnes âgées ayant des maladies sous-jacentes avant d’être atteintes par le Covid-19. « On a eu beaucoup de malades qui ont eu besoin de réanimation, mais on n’en a pas beaucoup parlé. On a surtout parlé des décès. Mais on a eu des malades qui même non hospitalisés en service de réanimation, étaient en soins intensifs et suivis de façon très rapprochée et étaient oxygénés. Il y en a eu à Diamniado, à l’hôpital Principal, à l’hôpital de Fann. Il y’en a qu’on a eu à transférer au niveau du service de réanimation de Cuemo », a-t-il déclaré. Et de poursuivre : « alors, quand on a suivi ces malades dont 08 ont nécessité des soins assez poussés, cinq décès ont été notés. Mais ce qu’on a noté dans l’évolution de la maladie pour ces cas qui sont décédés, ce sont des personnes âgées et aussi des personnes qui avaient avant Covid-19 des maladies sous-jacentes qui étaient assez graves ». Au cœur de la question de la prise en charge de ces cas graves et sévères, se trouvent celle des personnels médicaux et paramédicaux qui se surpassent pour soigner ces malades. « Il est vrai que les cas graves sont des patients très lourds et demandent beaucoup de soins intensifs. Actuellement, nous avons une équipe d’infirmières qui tourne toutes les 2 heures sur le site, et il y a 2 infirmières qui sont en permanence dans la salle, à côté de ce patient. En ce qui concerne les médecins, nous avons 2 médecins anesthésistes séniors qui sont en permanence sur le site parce qu’on sait que ces pathologies donnent des tableaux très graves, qui nécessite des soins très lourds », renseigne pour sa part le Pr. Oumar Kane. Et d’ajouter : « Au niveau de la réanimation, nous disposons de dix (10) lits qui sont équipés. Et rappelons que ce centre était initialement prévu pour la chirurgie cardiaque pédiatrique, qui est une chirurgie pointue, ce qui fait que la réanimation est très équipée. Et c’est ce qui nous permet actuellement de faire face aux situations les plus graves, tout en sachant que la maladie se complique parfois de tableau gravissime mais jusqu’à présent, nous parvenons à y faire face ». Revenant sur la question de la gestion des personnels soignants au niveau de cette unité de prise en charge des cas graves et sévères, Le Chef service Anesthésie et Réanimation de l’hôpital de Fann déclarera : « Nous avons mis en place une liste de garde. C’est une liste hebdomadaire. C’est les médecins anesthésistes qui ont voulu que ça se passe ainsi. Et donc ce sont des médecins qui restent à l’hôpital pendant toute une semaine avant de rentrer chez eux. Ce qui évite de rentrer régulièrement à la maison et d’exposer leur famille à l’infection. Nous avons donc ouvert une maison médicale où sont hébergés les médecins qui restent pour la semaine et aussi les personnels para médicaux». Avec sudonline |