La publication des procès-verbaux d’auditions de dignitaires de l’ancien régime et la valse d’indignations et de désapprobations qu’elle a suscitées au niveau des organismes de droits de l’homme, des enquêteurs et concernés eux-mêmes, ont poussé la chancellerie, via la direction des services judiciaires, à demander qu’il y soit mis un terme. Une circulaire signée en ce sens a été envoyée au procureur de la République, Ousmane Diagne, à ses collègues des régions pour faire arrêter et juger tout journaliste qui publiera, désormais, les procès-verbaux en question.
Avis sans frais à la presse sénégalaise à qui il est désormais interdit de publier les procès-verbaux d’auditions des dignitaires de l’ancien régime visés dans la traque aux biens mal acquis. Une source judiciaire sûre nous apprend que la direction des services judiciaires du ministère de la Justice a transmis, avant-hier, une circulaire adressée au procureur de la République, Ousmane Diagne et aux chefs de parquets des différentes juridictions du Sénégal, afin de procéder à l’interpellation de tout journaliste qui publiera les procès-verbaux d’auditions en cours à la section recherches de la gendarmerie. Dans le document en question, il a été demandé aux procureurs de traduire à leurs barres et de requérir des peines fermes contre les journalistes récalcitrants. Depuis le début des convocations de dignitaires de l’ancien régime au niveau de la section recherches de la gendarmerie, les organes de presse publient, à longueur de colonnes, les minutes présumées des auditions en cours. Beaucoup y vont avec leur passion, leur imprudence et leur inconstance.
Une circulaire adressée aux procureurs
Les preuves de culpabilité ou d’innocence des personnes concernées qui sont rapportées aujourd’hui ici sont systématiquement démenties ailleurs dès le lendemain ailleurs. Le secret de l’instruction et la présomption d’innocence qui sont des principes généraux du droit sont violés en permanence sans que l’autorité ne réagisse. C’est pour mettre fin à cette situation préjudiciable à l’Etat de droit que la circulaire a été prise. S’y ajoute également que les gendarmes qui mènent les enquêtes sont de plus en plus gênés par la violation de ce même secret de l’instruction qu’impose toute enquête de même que la surexploitation médiatique qui est faite de leurs procès-verbaux. Les personnes convoquées également, appuyées par les organismes de défense des droits de l’homme, sont aussi choquées par les PV travestis, transformés et détournés à des fins de communication politique. Mais force est de constater qu’au sujet de la publication des procès-verbaux d’auditions de dignitaires de l’ancien régime, les journalistes ne les fabriquent pas de toutes pièces. Ils les reçoivent de personnes tapies dans l’ombre, dans un pays où, à chaque fois que des enquêtes de cette nature sont agitées, la justice peine à se démarquer de l’exécutif qui lui communique, le plus souvent, les dossiers et les noms des personnes à poursuivre. Les sources des journalistes ne sont pas à l’abri des poursuites. La loi sur la répression de l’enrichissement illicite date de l’année de l’ascension du Président Abdou Diouf à la magistrature suprême. Elle n’a jamais été appliquée depuis son vote en 1981. A son arrivée au pouvoir, l’actuel Président de la République, Macky Sall, a annoncé sa réactivation, poussant ses adversaires à crier à une tentative de règlement de compte politico-politicien.
NDIOGOU CISSE
Le Pays au Quotidien