Il y a des jours comme ça. Des jours où on ne sait pas s’il faut s’indigner, se résigner ou tout simplement se dire que c’est la vie qui est comme ça et qu’il ne sert à rien d’essayer d’y changer quelque chose. Chacun la mène comme il veut, Dieu reconnaîtra bien les siens. Il y a des jours où le cours des événements nous pousse à une introspection et nous amène à remettre en cause bien des certitudes et idées reçues. C’est le cas, mardi dernier. Tout le pays avait comme arrêté sa respiration pour accueillir l’actrice indienne Pallavi Kulkarni dite « Vaidehi », personnage principal de la série du même nom. Un téléfilm qui passe régulièrement sur la chaîne privée 2Stv et qui fait pleurer dans les chaumières. Des centaines de fans avaient envahi l’aéroport Léopold Sédar Senghor de Dakar pour apercevoir la star du petit écran. Des élèves avaient même séché leur cours, marché sur des kilomètres, bravé la faim et la soif pour ne pas se faire raconter la venue de Vaidehi. Il y a eu des cris, de l’hystérie, un délire collectif, des pleurs et même des évanouissements. On aurait dit que ces jeunes filles et ces femmes, qui constituaient la majorité du public, étaient possédées par on ne sait quoi. C’était tellement loufoque que Vaidehi elle-même a reconnu devant les journalistes qu’elle n’a jamais vu un tel déferlement de passion pour sa modeste personne. Elle s’attendait certainement à voir quelques fans l’accueillir à sa descente d’avion, mais pas une telle foule. Par la magie du petit écran, des millions de Sénégalais ont vécu cet « événement » en direct. Certains ont été scandalisés, d’autres ont préféré en rigoler, d’autres, enfin, comme ces sociologues qui ont une explication à tout, ont estimé que tout cela n’est que l’expression d’un désœuvrement ou d’un manque de repères des jeunes sénégalais qui s’accrochent à tout pour exister, même si c’est par procuration. Les admirateurs et admiratrices de Vaidehi, eux, n’en ont cure de ces élucubrations intellectuelles ou de ces indignations moralisantes. Ne sont-ils pas libres de se passionner pour une actrice qui les fait rêver, qui les éloigne pendant une demi-heure de leur mal-vivre, de leurs tracas quotidiens faits de coupures de courant, de maisons inondées, de chômage, de peur de sortir la nuit à cause de l’insécurité… ? Et puis, c’est quoi cette propension des intellectuels à vouloir coûte que coûte régenter leurs vies ? Ne sont-ils pas eux-mêmes les plus acculturés, préférant citer Camus, Durkheim ou Platon à la place de Kocc Barma ou Ndamal Gossas ? Ou parlant et s’habillant « comme des Toubabs » tout en reprochant au « gens du peuple » de tomber en transes à la vue d’une star d’une série indienne à l’eau de rose ? Peut-être que tout cela n’est qu’une question de goûts et de couleurs, comme le dit si bien la maxime. Soyons clairs : je ne suis pas un admirateur de Vaidehi ou un passionné de telenovelas. Loin de là ! Seulement, il faut reconnaître que, la nature ayant horreur du vide, la série indienne made in Bollywood ne doit son succès au Sénégal et dans d’autre pays d’Afrique qu’à cause de la pauvreté et de la mauvaise qualité de notre offre audiovisuelle nationale. On peut bien rire des frasques de Sa Neekh et compagnie, mais ce téléfilm sénégalais ne peut pas résister face aux superproductions étrangères qui, même si elles ne sont pas des chefs d’œuvres sur le plan thématique, sont assez bien filmées, avec de gros moyens techniques et financiers. Ce raisonnement peut s’appliquer à d’autres secteurs comme le football par exemple. Ne doit-on pas se demander pourquoi les Sénégalais sont si friands de matches des championnats européens au moment où nos stades sont désespérément vides ? Un jeune de Dakar, Kaolack ou Ziguinchor peut citer, les yeux fermés, toutes les stars du Real de Madrid, mais serait incapable de vous dire le nom du meneur de jeu de la Jeanne d’Arc, du gardien de but du Diaraf ou du défenseur de la Linguère de Saint-Louis. Ok, peut-être que je suis en train de caricaturer, mais c’est ça le Sénégal d’aujourd’hui : on adore tout ce qui nous vient de l’extérieur et on prête peu d’attention à nos richesses, qu’elles soient culturelles, sociales, sportives, etc. Ce qui me gêne dans ce « phénomène Vaidehi », ce ne sont pas la passion et la mise en scène outrancière qui ont entouré son accueil. Ce sont plutôt tous ces moyens humains, logistiques et financiers qui ont été déployés juste pour faire venir une actrice au Sénégal. C’est bien sûr une formidable opération commerciale pour la chaîne de télévision initiatrice de l’événement. Mais toute cette logistique ne devrait-elle pas été déployée pour, par exemple, mobiliser les Sénégalais afin qu’ils se sentent plus concernés par le tremblement de terre qui a frappé les Haïtiens et causé près de 200 mille morts et des milliers de blessés ? En regardant les images sur l’accueil de Vaidehi, je n’ai pas pu m’empêcher de faire un parallèle entre les deux événements. Et je me suis dit que si les médias audiovisuels sénégalais avaient mis autant d’énergie et de moyens pour sensibiliser le public et organiser un Téléthon en faveur d’Haïti, peut-être qu’ils auraient pu récolter des centaines de millions de francs Cfa, comme l’a fait la chaîne musicale américaine Mtv, la semaine dernière. Mais qui sait, peut-être qu’une partie des recettes tirées de « l’opération Vaidehi » irait aux sinistrés haïtiens… |
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Question de Culture : entre Haiti et Vaidehi…Par Modou Mamoune FAYE
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Tu es vraiment tres belle
Très bel article El Hadj Modou Mamoune!
ça c’est du bien dit. Merci et bonne continuation
bravo vraiment je vous tire mon chapeau jdr certes vaidehi mais c est vraie que l ensemble des télévisions auraient pu coopérer et réunir des fonds d aider les haitiens
vrement merci \\ li varal li mooy gni yilif chene audiovisuels ci reewmi di senegal see nouk xareegne dafa dese ….li appe ci nitgny yitt dagnooy backe di kagne chene yi ak radio yi loxamni bokkout ak limou legey thi gnoom ,media ci senegal limouye diafandikoo lammegnoo jambour di vane adaye jambour di naw yafi jambour…..moo waral li appe ci noune fatte sounou dembou saggane yite liidi taye…\\ notre langue cest le wolof.
indigné la façon faite par les senegalais on dirait de l’anarchie pur et dur . Ce qu’il faut souligner c’est que le peuple part en dérive. Là ou les parents d’élèves devraient davantage se sentir concerner par l’éducation de leurs aieuls on assiste à ce desarroi . je n’ai rien c ontre l’admiration mais c’est desolant pour ces jeunes.