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Qui sont les nouveaux parlementaires ?

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Le jeudi 12 juillet 2012, le Conseil Constitutionnel a publié les résultats définitifs des élections législatives du 1er juillet 2012. Nous apprîmes alors que sur cinq millions 368 mille 783 électeurs inscrits, seuls 968 mille 852 ont rempli le devoir civique en allant voter. Il en résulte un fort taux d’abstention de l’ordre de 67 pour cent. Et les observateurs de s’interroger sur ce phénomène inédit de notre histoire politique. Pourquoi les électeurs sénégalais ne se sont pas rendus aux urnes ? Est-ce un manque d’intérêt vis-à-vis de la représentation nationale ou est-ce par rapport au mode de désignation de ceux qui sont censés les représenter à l’hémicycle de la Place Soweto ? Ce comportement est-il dicté par la lassitude consécutive à la forte sollicitation des électeurs pendant les deux tours de l’élection présidentielle qui venait juste de se dérouler ? Autant de questions que les uns et les autres ont tenté d’aborder pour trouver une explication à ce comportement de l’électorat.

Pour ma part, je pense que l’image que le peuple se fait de l’Assemblée nationale en ait pour quelque chose, surtout que la précédente législature a laissé dans la mémoire collective un souvenir amer avec les événements du 23 juin 2011. Quoiqu’il en soit, ces élections eurent lieu et avec un quotient national de 32 mille 696 suffrages valablement exprimés, la coalition Benno Bokk Yakaar rafla la mise avec 119 députés sur les 150 en compétition. Elle sera suivie du Pds, 12 députés ; du Mouvement républicain pour la refondation nationale (Bess du Naak) de El Hadj Mansour Sy Djamil et de la coalition Bok Guiss Guiss de Pape Diop, quatre députés chacun ; du Mouvement de la réforme pour le développement social (Mrds) de l’imam Mbaye Niang et du Parti pour la vérité et le développement (Pvd) de Cheikh Ahmadou Kara Mbacké, deux députés chacun. L’Union pour le renouveau démocratique (Urd), de Djibo Kâ le Parti de l’émergence citoyenne (Tekki 2012) de Mamadou Lamine Diallo, le Mouvement patriotique du Sénégal /Faxas de Serigne Khadim Thioune, la Coalition «Leeral» de Maitre El Hadj Moustapha Diouf, la Convergence patriotique pour la justice et l’équité de Demba Diop dit «Diop Sy», le parti And Jeef de Mamadou Diop, Deggo Souxali transport ak commerce de Alassane Ndoye, obtinrent respectivement un (01) député. Ainsi donc ce scrutin du juillet 2012 ébranla moult certitudes et remis en cause beaucoup d’ambitions. La surprise passée et les déceptions plus ou moins digérées, la question qui mérite à présent d’être posée est de savoir :

Qui sont ces nouveaux parlementaires ?

En parcourant les résultats officiels du Conseil constitutionnel et les listes des partis et coalitions de partis ayant participé aux élections législatives du 1er juillet 2012, on se fait une idée de la prochaine législature. D’abord pour ce qui est de la parité, elle n’a pas été intégrale, puisqu’avec un total de 65 élues sur un total de 150 députés, les femmes représentent moins de 50 pour cent avec un taux de 43,33 pour cent. Cependant, avec la France ou le taux est de 27 pour cent, c’est une performance à saluer.Pour ce qui est des profils, l’on note une prédominance du secteur privé dans son ensemble avec des commerçants (17), des chefs d’entreprises, (sept) et des cadres de ce secteur (27). Ils représentent respectivement 11,3 pour cent, 4,6 pour cent et 18 pour cent. Les Ménagères au nombre de neuf et les chefs religieux de sept, représentent 6 et 4,6 pour cent de l’effectif global. Quant aux fonctionnaires, essentiellement des enseignants, le taux est de 42 pour cent avec un nombre de 28 élus.

En France, ils représentent 32 pour cent. Il y a aussi la rubrique que j’appellerai «autres» ; laquelle est constituée de professions du genre représentant commercial, délégué médical, chauffeurs, animatrice, secrétaire/assistante. Elles seraient autour de 8,6 pour cent avec un nombre avoisinant treize éléments. Les avocats et les journalistes représentent 3,33 pour cent avec respectivement cinq (05) élus chacun. Les médecins affichent 2 pour cent avec trois (03) élus, alors que, dans l’Hexagone, ils sont au nombre de 21 sur un total de 577 députés. Les ouvriers au nombre de deux (02) représentent un taux de 1,33 pour cent, alors qu’ils ne font pas partie de la nouvelle législature française. On note également d’autres bizarreries comme un spécialiste. Mais de quoi bon Dieu ? Un monsieur Ousmane Tanor Dieng qualifié d’enseignant, et la fonction de sénatrice considérée comme un métier.

Il est à noter également un fort taux de non renseigné qui avoisine 18 pour cent. Pour autant, dans ce chapitre, on retrouve des connaissances de professions libérales, du secteur public ou autres. Je pense que les autorités devraient, à l’avenir, veiller à la clarification des domaines d’activités des investis des partis politiques ou coalitions de partis, sous peine d’irrecevabilité de leurs listes. Cette exigence permettrait d’avoir beaucoup plus de lisibilité sur les compétences de la représentation nationale. Cela bien entendu n’a rien à voir avec le degré d’instruction, car une ménagère peut mieux porter les préoccupations de sa base électorale qu’un agrégé d’université. Il s’agit tout simplement de rechercher l’efficacité et l’efficience dans la prise en compte des problèmes soumis aux représentants du peuple. Par ailleurs, l’âge des parlementaires n’est pas renseigné. A titre d’exemple, en France, entre les législatures de 1981 et de 2012, il se situe entre 50 et 55 ans. En est-il de même au Sénégal ? Je ne le pense pas au regard de la faiblesse du nombre de jeunes investis. En tous les cas, ces données renseigneraient sur la place réservée à la jeunesse dans les formations politiques.

Concernant spécifiquement les parlementaires femmes, on peut noter, à titre indicatif, une prédominance des enseignantes (12) suivies des commerçantes (11). Il existe aussi une représentation diversifiée des autres professions : juristes (02), journalistes (02), infirmières (03), assistantes (03), spécialiste (01), consultante (01) , étudiante (01), agent de développement (01), comptable (01), ménagères (07). Des non renseignés aussi (08).Tout compte fait, je crois que cette législature comporte des compétences diversifiées qui enrichiront les débats parlementaires. Je ne pense pas, parce qu’il y avait beaucoup d’anciens ministres dans la précédente législature, qu’il faille en déduire que celle-ci n’est point qualitative. Le niveau académique est somme toute appréciable et l’expérience supposée des nouveaux députés riche et variée. Au regard des profils, l’on peut affirmer que cette législature n’est pas composée que d’analphabètes et de ménagères qui ignorent tout du rôle et des missions du député.

Je ne crois pas également qu’il s’agisse ici d’une représentation au rabais comme ce fut le cas avec certaines législatures passées qui ont déteint négativement sur l’honorabilité de la représentation nationale. La coalition beige/marron si majoritaire soit-elle n’est pas monolithique, comme certaines majorités parlementaires connues de tous, au point de légiférer sans discernement pour juste se plier au moindre desiderata du gouvernement. Elle est plurielle et recèle en son sein de fortes personnalités. Et avec ce que cette pluralité suppose comme richesse dans l’exercice du mandat parlementaire, nous pouvons espérer l’avènement d’une Assemblée nationale de rupture qui s’acquittera convenablement de sa mission et contribuera ainsi à la réconciliation du peuple d’avec ses mandants. Mais ne préjugeons de rien ! Une législature prend fin, une autre commence. Et comme c’est à l’œuvre que l’on reconnait l’artisan, attendons de voir le produit que la douzième nous offrira pour la juger.

Alphonse DIOP

Administrateur d’Assemblée

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