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Reforme des institutions – Le «référendum politique» rejette la Constitution de Mbow

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 Le constat est amer, mais c’est la triste réalité. Les 17 mois de dur labeur de la Commission nationale de réforme des institutions (Crni) présidée par Amadou Mahtar Mbow risquent d’être vains. Le rejet des textes est presque unanime. Les réformes proposées par les membres de la commission dessinent les contours d’une nouvelle République. Une République moderne, juste et qui garantit les mêmes droits à tous les citoyens. Les changements ébauchés dans le rapport et dans l’avant projet de Constitution ouvrent l’ère d’une gestion saine et transparente. Seulement, le pouvoir politique qui doit incarner ces réformes ne semble pas très emballé par les changements. Les entités politiques approuvent ou rejettent les propositions suivant leurs intérêts. D’autres acteurs, plus neutres, regrettent leur mise à l’écart dans le processus. Et Macky Sall de se retrouver devant une situation inconfortable.
Les dispositions qui régissent la nouvelle République
C’est une nouvelle République qui se dessine. Le Sénégal tend à devenir un Etat dont les nouveaux textes qui vont le régir sont consignés dans deux documents produits par la Commission nationale de réforme des institutions (Cnri). Le rapport des travaux et l’avant projet de Constitution remis par le Président de la Cnri, Amadou Mahtar Mbow au chef de l’Etat, Macky Sall, avant-hier, concentrent l’essentiel des nouvelles dispositions qui composent la future (?) Charte fondamentale du Sénégal. Lesquelles dispositions annoncent des ruptures profondes dans bien des domaines, bouleversent des habitudes pourtant tenaces et promeuvent une nouvelle forme plus «juste et équitable» dans la gestion des affaires de l’Etat.
Les premières réformes sont relatives aux restrictions faites sur les pouvoirs du président de la République. Dans l’avant projet de Constitution, la Cnri revoit la durée du mandat du chef de l’Etat à la baisse. Elle passe de 7 à 5 ans. Une proposition qui épouse la volonté de Macky Sall de réduire son mandat de deux ans. Contrairement à la Constitution en cours où le nombre de mandats du Président est sujet à équivoque, les membres de la commission ont, cette fois-ci, levé toutes les équivoques. Le problème est réglé par l’article 57 qui dispose que le président de la République est élu au suffrage universel direct et au scrutin majoritaire à deux tours, pour un mandat de cinq ans. Il ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs.
Bulletin de santé exigé aux candidats. Les travaux de la Commission présidée préconisent la limitation de l’âge des candidats à la Présidentielle à 70 ans. Une proposition qui, si elle est passe, écarte de faite nombre de prétendants comme Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, Mamadou Ndoye, de la consultation électorale prévue en 2017. En sus de cette condition, la Cnri exige les prétendants au poste de président de la République de présenter leur bulletin de santé. L’article 59, qui règle la question, stipule que «toute candidature, pour être recevable, doit être présentée par un parti politique légalement constitué ou, dans le cas de candidature indépendante, être accompagnée de la signature d’électeurs représentant au moins dix mille inscrits domiciliés dans la moitié au moins des  régions à raison de mille au moins par région. Aussi, elle doit être accompagnée d’une déclaration sur l’honneur attestant la nationalité exclusivement sénégalaise du candidat et d’un certificat attestant son aptitude physique et mentale dûment constatée par un collège de trois (3) médecins assermentés désignés par le Conseil de l’Ordre des médecins sur demande de la Cour Constitutionnelle.»
Macky «exclu» du Conseil supérieur de la Magistrature. Le président de la République n’est plus le chef du Conseil supérieur de la Magistrature. L’article 106 du projet de Constitution élaboré par la Commission nationale des réformes des institutions (Cnri) renseigne que cet organe de gestion de la carrière des magistrats va être présidé par le Président de la Cour Constitutionnelle. Le document ajoute qu’outre le Président de la Cour Constitutionnelle et deux personnalités de haut rang, désignées respectivement  par le président de la République et le président de l’Assemblée nationale, le Conseil supérieur de la Magistrature est composé, au titre des membres de droit, du Président du Conseil d’Etat, du Premier Président de la Cour de Cassation et du Procureur général près ladite Cour, des Premiers Présidents des Cours d’appel et des Procureurs généraux près lesdites Cours. Et, au titre des membres élus, d’au moins un nombre égal de membres choisis conformément aux dispositions prévues par la loi organique sur le Conseil supérieur de la Magistrature. L’autre nouveauté concerne le ministre de la Justice qui n’est plus un membre de droit. Aussi, le cordon entre le ministre de la Justice et le Parquet sera coupé si le projet de Constitution de la Cnri passe.
L’Inspection générale d’Etat (Ige) change d’appellation et quitte le Palais. Dans le rapport remis au Président Macky Sall, la Cnri propose la délocalisation de l’Inspection générale d’Etat (Ige). Amadou Mahtar Mbow et son équipe veulent que l’institution soit une autorité indépendante. Ils ne veulent plus qu’elle soit logée au niveau de la présidence de la République. Aussi, la Cnri propose que le nom de l’Ige soit changé. La Vérification générale d’Etat (Vge) est le nom proposé par la Cnri pour remplacer l’Ige.
La Cour des comptes renforcée.
La Cour des comptes renforcée. Dans le projet de Constitution élaboré par la Cnri, les pouvoirs de la Cour des Comptes sont renforcés. D’après l’article 117 du projet de Constitution, la Cour des comptes est l’institution supérieure de contrôle des Finances publiques. Elle juge les comptes des comptables publics. Elle vérifie la régularité des recettes et des dépenses et s’assure du bon emploi des crédits, fonds et valeurs gérés par les services de l’Etat ou par les autres personnes morales de droit public. Elle reçoit des Pouvoirs publics concernés la déclaration annuelle d’emploi des fonds spéciaux attestant la bonne fin des dépenses publiques y attachées, conformément à leur nature spécifique et aux circonstances particulières d’exécution. L’article 118 renseigne que c’est le Président de la Cour Constitutionnelle qui préside le Conseil Supérieur de la Cour des Comptes.
Suppression de l’article 80. Toujours dans ses propositions faites au chef de l’Etat, la Cnri demande la suppression de l’article 80. Amadou Mahtar Mbow et Cie veulent disparaître de cet article à problème utilisé le plus souvent par les pouvoirs publics pour «éliminer» un adversaire. Les membres de la Cnri ont fait cette proposition dans le rapport de travail qu’ils ont remis au chef de l’Etat, Macky Sall.
Un gouvernement de 25 ministres au maximum. Le gouvernement est limité à 25 ministres au maximum dans la nouvelle Constitution proposée au Président Macky Sall par la Cnri. Aussi, la qualité de membre du Gouvernement est incompatible avec un mandat parlementaire et toute activité professionnelle publique ou privée rémunérée. Elle est également incompatible avec la fonction de Président de Conseil de collectivité locale.
Assistance des religieux. Les familles religieuses sénégalaises vont être traitées de la même façon si le projet de Constitution proposé par la Cnri aboutit. Dans le document que nous avons parcouru, en son article 30, Amadou Mahtar Mbow et son équipe demandent à l’Etat d’assister les communautés religieuses de manière transparente et sans discrimination dans les conditions déterminées par la loi et dans le strict souci de préserver et de garantir la Paix sociale et l’unité nationale.
Pas plus de 5 vice-présidents à l’Assemblée. Le bureau de l’Assemblée nationale est aussi concerné par le projet de réformes proposé par la Cnri. Même si elle précise que c’est le règlement intérieur de l’Assemblée nationale qui détermine la composition, les règles de fonctionnement de son bureau ainsi que les prérogatives de son Président, la Cnri propose, en son article 84 de son projet de Constitution, que le nombre de Vice-Présidents ne puisse excéder cinq (5), celui de secrétaires élus, quatre (4) et celui de questeurs, deux (2). Aussi, la Cnri demande qu’un des postes de Vice-Président, au moins, soit réservé à l’opposition parlementaire. Toujours d’après les propositions de la Cnri, les postes de questeur et de Président de la Commission de contrôle et de comptabilité doivent obligatoirement être répartis entre la majorité et l’opposition parlementaires. Il en est de même des fonctions de Président et de Rapporteur de la Commission des Finances.
Les personnes en garde à vue assistées par leur avocat. La Cnri propose, dans le projet de Constitution remis au chef de l’Etat, que toute personne en garde à vue soit assistée. Dans son article 22, il est dit que la personne en garde à vue doit être informée de ses droits, notamment le droit au silence, le droit à un examen médical et le droit de se faire assister, au terme des premières vingt quatre heures de garde à vue, par un avocat ou, à défaut, par une personne assermentée de son choix. Aussi, la personne en garde à vue doit être informée de la nature de l’infraction sur laquelle porte l’enquête, ainsi que de son droit, en cas de remise en liberté, de connaître la suite de la procédure.
Le chef de l’Etat ne nomme plus le Président du Conseil économique, social et environnemental. Le Président de la République n’aura plus la possibilité de nommer la personne de son choix pour diriger le Conseil économique, social et environnemental (Cese). Le mode de désignation du Président de l’institution va complétement changer si le projet de Constitution proposé par la Cnri aboutit. D’après l’article 137 du projet de Constitution remis au Président Macky Sall, ce sont les membres du Conseil économique, social et environnemental qui vont désormais élire en leur sein un Président pour un mandat d’une durée de cinq ans, renouvelable une fois.
NDIAGA NDIAYE ET SOPHIE BARRO
lobservateur

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