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Rencontre avec Adja Fatou Bâ, Miss Indépendance 1960 : «Mon histoire Avec Wade…

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Adja Fatou Bâ, c’est la première Miss du Sénégal. Elle a été élue le 4 Avril 1960 comme la plus belle fille du Sénégal. Elle avait alors 16 ans. Aujourd’hui, on l’appelle Miss Indépendance. Vêtue d’un grand boubou assorti de parures, sans oublier le maquillage, cette dame de 66 ans au teint clair conserve encore ses traits de beauté. C’est du haut de son 1,80 m qu’elle a accueilli «Le Quotidien» chez elle, à la Sicap Liberté 3, pour un entretien consacré aux temps forts de son sacre d’il y a 50 ans, mais également sur ses relations avec le jeune Abdoulaye Wade et le Président Senghor, entre autres.

Adja Fatou Bâ, c’est la première Miss du Sénégal. Elle a été élue le 4 Avril 1960 comme la plus belle fille du Sénégal. Elle avait alors 16 ans. Aujourd’hui, on l’appelle Miss Indépendance. Vêtue d’un grand boubou assorti de parures, sans oublier le maquillage, cette dame de 66 ans au teint clair conserve encore ses traits de beauté. C’est du haut de son 1,80 m qu’elle a accueilli «Le Quotidien» chez elle, à la Sicap Liberté 3, pour un entretien consacré aux temps forts de son sacre d’il y a 50 ans, mais également sur ses relations avec le jeune Abdoulaye Wade et le Président Senghor, entre autres. Arborant déjà un joli boubou khartoum, la première Miss Sénégal n’a pas hésité à se changer pour mettre un boubou encore plus luxueux car, dit-elle avec humour, «je ne savais pas que le photographe viendrait avec vous».

ImageMme ou Miss, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Je m’appelle Fatoumata Bâ, mais mon vrai nom c’est Adja Fatou Bâ. Je suis Miss indépendance car j’ai été élue le 4 avril 1960, au tout début du magistère de Léopold Sedar Senghor. Cela se passait au Théâtre de verdure situé aux alentours du Port autonome de Dakar. Sans vouloir me vanter, je suis la première Miss du Sénégal indépendant.
Comment se passaient les élections à cette époque ?
A l’époque, Senghor était le président de la République et le ministre de la Jeunesse et des Sports s’appelait Alioune Tall. Comme aujourd’hui, il y avait également un sponsor principal de l’élection de miss Sénégal, c’était la marque de voiture Renault. Et quand j’ai été élue et sacrée, les organisateurs m’avaient offert une voiture décapotable. De prime abord, je ne voulais pas me présenter à l’élection car je n’étais pas franchement intéressée. Mais j’ai des amies qui ont tellement insisté que j’ai fini par m’inscrire. Et ce sont elles-mêmes qui ont fait l’inscription. Aux environs de minuit-une heure du matin, la compétition démarra. Les élections se faisaient comme celles d’aujourd’hui, sauf que nous, nous ne mettions pas des tenues courtes. Nous ne portions que des robes longues accompagnées d’escarpins aux longs talons. C’était très joli ! Deux orchestres assuraient l’animation de la soirée.
Pourquoi vous ne vouliez pas vous présenter au concours ? Vous étiez belle n’est-ce pas ?
Oui c’est vrai, j’étais très belle ! Mais je ne voulais pas simplement parce que je n’étais pas intéressée par ces choses-là.
Quel âge aviez-vous ?
J’avais 16 ans et je n’allais plus à l’école après avoir arrêté très tôt les études. En classe de sixième.
Pourquoi cet arrêt ?
Parce que mes parents m’ont donnée en mariage très tôt. Je n’avais que 13 ans. A l’époque, chez nous les toucouleurs, seuls les hommes avaient le droit d’étudier et d’aller à l’école.
Quelles sont les différences entre les concours de Miss en 1960 et ceux d’aujourd’hui ?
Contrairement à aujourd’hui, nous ne nous mettions pas nues. Nous ne portions également pas de tenues courtes. C’étaient plutôt des robes longues taille princesse, ou des jupes longues. De même, nous ne nous dépigmentions pas la peau, le tout sans greffages ni perruques. Nous faisions la coiffure avec nos cheveux naturels, le plus simplement du monde. Cependant, les Miss d’aujourd’hui sont plus veinardes que nous car elles reçoivent beaucoup de cadeaux venant de différentes personnes.
Est-ce à dire que vous étiez plus pudiques que les Miss d’aujourd’hui ?
Non, je n’ai pas dis cela ! J’ai juste dit que nous mettions des robes longues, ce qui était normal car nous ne sommes pas de la même époque. Les temps ont beaucoup changé.
Comment avez-vous vécu votre sacre ?
J’étais très contente. Mais le soir même de mon élection, des gens avaient dégonflé le pneu de ma décapotable. Nous ignorions ceux qui en étaient les auteurs car nous étions tous à l’intérieur. Les gens qui avaient commis cet acte l’avaient fait par jalousie. A part cela, en plus de la voiture, Renault avait mis à ma disposition un chauffeur, et c’était un blanc. Quand j’ai été élue Miss, ma famille était à la fois surprise et très heureuse. En ce temps-là, il n’y avait pas de billets d’avion et autres récompenses comme cela se passe aujourd’hui. Mais la presse internationale était présente pour immortaliser l’évènement.
Pendant dix jours, on me conduisait tous les matins, accompagnée de mon garde du corps qui s’appelait Gambal Sarr, il habitait à l’avenue Gambetta (Ndlr : elle sourit en disant que Gambal Sarr a dû vieillir maintenant). Il me conduisait donc chez Senghor, à la Présidence, pour prendre le petit déjeuner, et aussi à l’hôtel Croix du Sud. A l’époque il n’y avait pas beaucoup d’hôtel.
50 années sont passées. Qu’êtes-vous devenue depuis lors ?
Je suis vieille maintenant ! (rire) et j’en rends grâce à Dieu. Je me suis mariée et j’ai vécu à Washington, au Nigéria, etc. car mon mari était diplomate, chargé d’Affaires plus précisément. Il est décédé à Rio de Janeiro, au Brésil, alors qu’il était ambassadeur du Sénégal au Liban. Nous avons eu cinq enfants et ils sont devenus grands maintenant. J’ai fait le tour du monde avec mon mari. Ma fille est née à Washington et elle porte le nom de Madeleine Senghor. Le premier poste diplomatique de mon mari a été le Nigéria. Ensuite, nous sommes allés en Allemagne fédérale.
Que pensez-vous du cinquantenaire du Sénégal ?
D’abord, je dois voir Abdoulaye Wade car j’estime que je dois être intégrée dans l’organisation des festivités. En tant que première Miss du Sénégal élue le 4 avril 1960, je dois faire partie de la célébration de ce cinquantenaire. Les autorités doivent au moins me récompenser. Le président de la République, Me Abdoulaye Wade, me connaît très bien et il doit m’intégrer dans la fête.
Quel rôle pensez-vous pouvoir jouer dans cette célébration ?
Normalement, je dois porter un ruban, on doit m’installer sur la tribune d’honneur et on doit me présenter aux jeunes comme la première Miss Indépendance au Sénégal !
Vous-êtes vous approchée des autorités à cet effet ?
Non, je ne l’ai pas fait. Mais j’ai une fois envoyé ma photo chez Wade et jusqu’à présent, personne ne m’a rappelée. Le Président Wade est un frère pour moi. Quand je l’ai connu, il était professeur à la Faculté de Droit de l’Ucad et il était très gentil avec moi. Je le connais très bien ! C’est un homme bon, très généreux. Il a toujours eu de la considération envers son prochain. Il a tout fait pour moi et quand il avait de l’argent, ces gens qui le dénigrent aujourd’hui n’étaient rien ! Mais quand on fait de la politique, on reçoit beaucoup de critiques. Wade me donnait d’importantes sommes d’argent, jusqu’à un million de francs même, et c’est avant que je ne sois Miss Indépendance, et même après, cela a continué. Il me remettait un chèque et je retirais l’argent au Crédit lyonnais. Un jour de l’année 1960, nous étions à l’avenue Gambetta avec d’autres amis et une belle voiture avait attiré mon attention et j’avais dit : «Cette voiture est très belle, je la veux !». Wade a répondu : «Cette voiture, je l’ai achetée et elle est à toi !». Il me l’a offerte sur le champ ! Mais moi, je croyais qu’il plaisantait. Ensuite j’ai conduit la voiture jusqu’à Mbour en compagnie de mes amis Binta Bâ et Kandji Cissé. Durant cette période, il n’y avait pas d’électricité à Dakar, on utilisait les lampes à pétrole. Ceux qui disent que Me Wade n’avait rien avant d’être Président ne disent pas la vérité. Wade a toujours eu une bonne situation financière. Je suis témoin de son époque, donc je sais de quoi je parle. Il était beau garçon et revenait de la France. Les Blancs l’appréciaient beaucoup, il enseignait dans les universités de France. Ceux qui le dénigrent n’ont aucune vergogne et ne sont que de petites gens. Pourtant, il y en a parmi eux certains dont c’est Wade lui-même qui payait leur appartement et leur scolarité. Pendant les règnes de Senghor et de Diouf, personne n’ouvrait la bouche. Mais Wade aura tout ce qu’il voudra car il a un bon cœur. Et s’il tenait compte de tout ce que les gens disent de lui, il laisserait tomber beaucoup de personnes aujourd’hui.
Et avec Senghor, quels étaient vos rapports ?
Je voyageais beaucoup à l’époque, donc nous n’étions pas trop intimes. Mon mari était diplomate et en 1962, il fut affecté au Nigeria et j’étais à ses côtés. Quelques temps après, le Président Nkrumah était venu là-bas en compagnie de Me Lamine Guèye (Ndlr : elle montre des photos ou elle est accompagnée de Me Lamine Guèye, du Président Nkrumah, de la femme de Bongo, etc.). Ensuite, nous avons été affectés en Allemagne fédérale, mais je n’aimais pas trop ce pays. A l’époque, être diplomate sous Senghor était chose aisée.
Parlez-nous de votre mari
Mon mari était diplomate, il s’appelait Samba Ndiaye. Après sa sortie d’école, il fut affecté pour la première fois au Nigeria. C’est ensuite que nous sommes allés en Allemagne fédérale où il était conseiller d’ambassade. Par la suite, le Liban et les Etats-Unis nous ont accueillis, entre autres destinations. Et même quand Abdou Diouf est devenu Président, mon mari continuait de garder son poste de diplomate avec tous les privilèges que procure un tel poste. (Ndlr : nostalgique) Malheureusement mon mari est décédé au Brésil. Dieu ait son âme !

Propos recueillis par Astou Winnie BEYE

lequotidien.sn

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