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Secteur de l’électricité : A l’heure du bilan (Par Abdou Karim Ly)

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A l’heure du bilan, portons un regard sur la pertinente et brulante question de la cherté de l’électricité et les perspectives qui se dessinent au- delà de 2024 pour le secteur de l’électricité au Sénégal.

Pourquoi Senelec a augmenté ses tarifs ?

Le domaine de l’électricité relève d’une régulation stricte, signifiant que Senelec ne détient pas le pouvoir discrétionnaire de modifier les tarifs de l’électricité sans l’accord de la Commission de Régulation du Secteur de l’Electricité (CRSE). La grille tarifaire actualisée, mise en application depuis le 1er janvier 2023, témoigne d’une réduction de 100 milliards de FCFA de la subvention étatique pour l’exercice 2023. Par conséquent, au regard des prévisions de la consommation s’élevant à 5 372 Gigawattheures pour l’année en cours, l’État a accordé à Senelec la permission d’atteindre un « Revenu Maximal » s’élevant à 696 milliards, contre 596 milliards antérieurement, afin de contrebalancer le manque à gagner de cette subvention perdue.

Il s’est avéré impératif pour Senelec de réajuster ses tarifs à la hausse afin de compenser les 100 milliards de FCFA de subvention dont l’État a choisi de se désengager. Le tableau 1 ci-dessous présente une juxtaposition des deux grilles tarifaires récentes, à savoir celle de 2019-2022 et celle actuellement en vigueur en 2023.

A noter que non seulement les tarifs ont connu une augmentation fulgurante, atteignant jusqu’à 33% entre 2019 et 2023 (concernant l’Usage Domestique de Moyenne Puissance, Tranche 3), mais ils ont également varié d’une tranche à l’autre, surpassant 50% : en 2019, pour l’Usage Domestique de Petite Puissance, le tarif de la Tranche 2 surpassait celui de la Tranche 1 de 23%, tandis qu’en 2023, cet écart s’est accru pour atteindre 50%.

L’état du Sénégal à travers le ministère des finances a défini une feuille de route pour la suppression totale des subventions dans le secteur de l’énergie à l’horizon 2025.

Cette même feuille de route, le gouvernement s’engage à diminuer les subventions de 2,7 % du PIB en 2023 à 1 % du PIB en 2024.

En résumé, si rien n’est fait d’ici fin 2024 (tel que le passage des centrales thermiques au gaz naturel domestique ou d’autres phénomènes exogènes favorables), Senelec sera une fois de plus contrainte à augmenter encore ses tarifs pour ne pas virer dans le rouge. Nous ne sommes donc pas du tout au bout de nos peines.

POURQUOI LA CHERTÉ DES FACTURES D’ÉLECTRICITÉ N’EST RESSENTIE QUE MAINTENANT ?

Bien que les nouveaux tarifs soient effectifs depuis le 1erjanvier 2023, Senelec se félicite que le tarif social, qui neconcerne que 1,2 millions de ses clients (47,8% des abonnés Senelec) dont la consommation mensuelle est inférieure à 150 kilowattheures par mois, a été épargné par la hausse effective depuis janvier 2023. Mais la Société Nationale d’Electricité ne mentionne pas souvent que ses 1,2 millions de clients, ne consomment que 10% des ventes d’Energie de Senelec, donc en effet, 90% de l’énergie vendue par Senelec subit de plein fouet l’augmentation des tarifs. De décembre à juin, nombreux sont les clients qui arrivent à se passer des ventilos, climatiseurs et autres ; donc beaucoup ne subissent que les tarifs de la tranche sociale (épargnée par la hausse des tarifs) durant ces mois. Une fois que la chaleur s’est installée et que les ventilos et climatiseurs ont été mis en marche, avec l’augmentation de la consommation, les clients ont enfin atteint les tranches tarifaires 2 et même 3, d’où l’impact ressenti depuis juillet sur les factures.

L’effet de surprise a été de taille pour les Sénégalais, maiscette hausse vertigineuse des factures était prévisible dumoment que nous avions déjà noté par exemple pour les abonnés de type Woyofal Domestique Petite Puissance (DPP),le tarif 2023 de la troisième tranche avait évolué de 32%pourcent comparé à celui en vigueur en 2022.

Quel impact sur ce jeune tailleur entrepreneur, qui a souscritau woyofal PPP (Professionnel Petite Puissance) qui devrafonctionner 24 sur 24 en période de fêtes, et dépasseralargement la tranche sociale ? Il subira de manière brutale lesaugmentations de 27% et 32% respectivement sur la 2e et le3e tranche tarifaire. Wait and See !!!

Vu la démocratisation de l’accès aux smartphones, à la fibreet à l’introduction d’appareils électroménagers dans les foyers et pour certains types de TPE (Très Petites Entreprises), il serait indiqué pour Senelec de réévaluer à la hausse le plafond de la tranche sociale à plus de 200kilowattheures par mois.

QU’EN EST-IL POUR LES CONSOMMATEURS ?

Quels préjudices pour les consommateurs post-payés supposés exposés à une facturation sur la base d’estimations de consommation ?

Nombreux sont les clients port-payés de Senelec qui n’ont jamais vu un agent/prestataire procéder à la relève de l’index du compteur chez eux pour des besoins de la facturation bimestrielle. Sommes-nous appelés à conclure que la télérelève de la consommation est une réalité ou plutôt que certaines factures sont établies sur la base de simples estimations ?

Ce qu’il faut retenir c’est que toute estimation qui place la consommation estimée dans la deuxième ou troisième tranche tarifaire est forcément préjudiciable au client. Parce que même si à un moment ou à un autre il y a correction d’une future facture par le facturier pour ajuster les kilowattheures surestimés, la surfacturation (en Francs), due à la l’application indue des tarifs des tranches 2 et 3, n’est pas corrigée à la faveur du client.

NOS COMPTEURS SONT-ILS FIABLES ?

Seul un audit technique indépendant réalisé par des cabinetsd’expertise sérieux à l’initiative d’organisations telles que lesassociations de consommateurs, la société civile et de citoyensengagés tels que Madame Oumy Ndour (Initiatrice de la pétition contre la cherté des factures d’électricité) que nousfélicitons pour son abnégation, pourrait élucider la question.

Au demeurant, il faut relever que depuis l’introduction à grande échelle des compteurs digitaux woyofal, leconsommateur n’a plus la possibilité de consulter l’index physique comme ceux qui étaient disponibles avec les anciens compteurs électromécaniques. Il y a dès lors, une énorme asymétrie d’information entre le client et Senelec surla consommation réelle.

Est-ce à dessein ?

Aujourd’hui il est pratiquement impossible pour un nouvel abonné d’obtenir un compteur post-payé. A quelles fins ?

Il est donc impératif dans ce contexte de diligenter un audittechnique qui comprendra notamment le         control de calibration (métrologie) d’un large       échantillon de compteurs prépayés et post-payés. Aussi, il serait indiquéd’auditer le paramétrage des progiciels de facturation deSenelec et de les verrouillés totalement et de les mettresous tutelle administrative et juridique de la CRSE afin deprotéger les usagers.

LA STRATEGIE DU MIXTE ÉNERGÉTIQUE ANNONCÉE DEPUIS 2014 A-T ’ELLE REELLEMENT FONCTIONNE ?

En 2014 Senelec nous annonçait en grande pompes,l’adoption du mixte énergétique comme s’il s’agissait de la découverte du siècle alors que cette approche découle naturellement d’une stratégie normale d’un opérateur desystème électrique soucieux de diversifier ses sources de production d’énergie pour des raisons de contraintestechniques, environnementales, stratégiques et économiques afin de produire de l’énergie en quantité suffisante, en qualitéoptimale et au meilleur coût pour les Sénégalais. Ce mixteénergétique était censé nous protéger de la volatilité des prix des produits pétroliers utilisés dans les centrales thermiques.

Presque 10 ans plus tard, le constat est désolant ; malgré la baisse du cours du baril de pétrole de son niveau de 2014 (avec la moyenne du cours du baril entre 2015 à 2023 s’établissant à 35% en deçà de son cours de 2014) nous nous retrouvons en 2023 avec des tarifs de l’électricité 25%+ supérieurs à ceux de 2014. Quel Paradoxe !!!

LA GROSSE OPPORTUNITÉ MANQUÉE

Dans un contexte où l’entreprise de service publique ne saurait fonctionner sans les subventions de l’Etat, il convient naturellement d’admettre que tout kilowattheure non- consommé par l’usager constitue une subvention non-octroyée par l’état et aussi une économie pour l’usager.

Une partie des 100 milliards de subvention perdue par Senelec auraient dû être investi sur la réalisation de programmes innovants de réduction de la demande et de la consommation d’énergie au grand profit de l’état et des Sénégalais.

Par exemple, pour ne citer que ceux-ci :· La mise en place d’exonérations de droits de douanes sur importation d’ampoules LED, ou sur les appareils électro-ménagers à haute efficacité énergétique.· Le lancement de programmes innovants encourageant les usagers à échanger leurs appareils énergivores (destinés à la casse) contre des appareils équivalents neufs beaucoup moins énergivores moyennant des coupons de remise offerts par la Senelec.· La distribution gratuite de lampes LED. En effet, il serait extrêmement rentable pour la Senelec et l’état de distribuer gratuitement des ampoules LED à tout usager disposé à restituer ses ampoules incandescentes ou ses ampoules dites LBC (encore fonctionnelles) à Senelec pour leur destruction effective.

À terme, les retombées des investissements dans des programmes innovants d’économie et de maîtrise de l’énergie auraient pu remplacer la subvention de l’État au secteur, pour le plus grand bonheur des Sénégalais.

Aucun expert crédible du secteur ne saurait admettre que la situation de la hausse vertigineuse des factures n’était pas prévisible à l’annonce des nouveaux tarifs. Il conviendrait donc de s’interroger sur les raisons du manque de campagne de sensibilisation et d’éducation des Sénégalais sur l’économie d’énergie. N’est-ce pas par essence la mission de l’AEME (Agence pour l’Économie et la Maîtrise de l’Énergie) d’une part, et de Senelec d’autre part ? Leur silence assourdissant de janvier à juin 2023 était-il intentionnel ?

La feuille de route de l’État pour la suppression totale des subventions dans le secteur de l’énergie à l’horizon 2025 est en marche, et les bailleurs de fonds la soutiennent. En conséquence, les Sénégalais devront malheureusement s’attendre à une ou deux autres augmentations des tarifs de Senelec (sauf introduction rapide du gaz naturel local dans le mix énergétique) d’ici fin 2025. Nous sommes donc tous au même niveau d’information. Nous savons aussi à quoi ressemblera la continuité proposée aux Sénégalais.

La grande interrogation est de savoir dans quelle mesure la facture des Sénégalais aurait été réduite si la centrale à charbon de Sendou (pourtant très critiquée durant sa conception par les riverains) avec un supposé coût de production très attractif, produisait 80% ou 85% de sa capacité nominale au lieu d’à peine 15% par moments, et si Senelec n’avait pas eu à recourir à la location d’une centrale flottante de Karpowership et de son unité flottante de stockage et de regazéification de gaz naturel liquéfié amarrée au large de l’île de Gorée ? Quel est le coût de production de ces deux outils de production ? Qui, pour éclairer les Sénégalais ? »

Ce secteur hautement stratégique, essentiel au succès d’une politique d’industrialisation et de développement économique et social, connaît actuellement un impératif criant d’une politique ambitieuse et bien pensée.

QUELLE POLITIQUE SECTORIELLE À PARTIR DE 2024 ?

Il est indéniable que la politique sectorielle en place depuis 2012 n’est pas des meilleures, en tous cas, ses effets tels que ressentis par les Sénégalais ne sont pas reluisants. Alors quelle politique pour amorcer les grands défis d’industrialisation et de développement économique et social au Sénégal ?

LE PATRIOTISME ÉCONOMIQUE ET LE COMMERCE RÉGIONAL

La promotion de grandes centrales thermiques à hautrendement au gaz naturel et de projets d’énergie renouvelable, grâce à une participation majoritaire du secteur privé national, minoritaire de l’État et accessoire d’investisseurs étrangers (détenant moins de 50% de participation au capital), permettant ainsi à l’État de conserver le contrôle de ce secteur stratégique et de protéger ses intérêts stratégiques et ceux du secteur privé national afin d’impulser une croissance endogène.

Des centrales, à l’image du projet de la centrale au cycle combiné de 300 MW du Cap des Biches, que l’auteur a lui-même conceptualisée et présenté aux promoteurs locaux du projet en 2017, alors qu’il occupait les fonctions de Directeur Pays/Directeur des Ventes de la multinationale General Electric – Power Solutions. Avec la disponibilité du gaz naturel local à un coût très avantageux, le Sénégal aura l’opportunité de devenir un exportateur majeur d’électricité dans la sous-région.

La réalisation du potentiel hydro-électrique du fleuve Sénégal à travers les organisations sous-régionales telles que l’OMVS sera une priorité. Bien que les investissements hydro-électriques soient très importants, une fois ces ouvrages en production, le coût de production du kilowattheure devient très attractif, pouvant même représenter un tiers du coût de production du kilowattheure actuellement généré par les centrales thermiques de Senelec.

LA SOLIDARITÉ SOCIALE

ÉNERGÉTIQUE

A travers des formules incitatives visant à encourager les ménages les plus aisés et les grandes entreprises à investir dans l’autoproduction d’énergie électrique à l’aide du solaire, avec la possibilité de revendre leur excédent de production à Senelec à un prix inférieur au coût de production moyen de Senelec. Les avantages seront multiples : des recettes inattendues pour les producteurs qui auraient perdu leur excédent de production, une réduction du prix de revient pondéré du kilowattheure de Senelec, une réduction des tarifs de l’opérateur du système au grand bonheur des Sénégalais, et enfin, une réduction des subventions de l’État.

Par exemple, une entreprise qui opte pour le modèle d’autoproduction se verrait attribuée des points supplémentaires lors de l’évaluation de ses offres technico-financières dans les appels d’offres publics pendant 5 ans.

Les opportunités abondent également en matière d’efficacité énergétique : Le potentiel est énorme, et une bonne politique saura le capter sans nul doute. »

L’AFRO-SOUVERAINISME ÉNERGÉTIQUE

Il s’agit de ne pas orienter notre politique énergétique en nous laissant dicter par les organismes internationaux et les nations industrialisées qui polluent à leur gré notre environnement commun, dans le seul but de poursuivre leur propre développement socio- économique, en particulier industriel. Il s’agit de développer des mécanismes de financement innovants au sein de nos ensembles et sous-ensembles économiques et monétaires pour financer les infrastructures structurantes du secteur.

Telle est la vision du Dr. Abdourahmane Diouf, Président du Parti AWALE et Leader de la grande coalition #Abdourahmane2024, candidat à la candidature pour l’élection présidentielle du 25 février 2024.

Proverbe : fool me onceshame on youfool me twice, shame on me (~ Chat échaudé craint l’eau chaude)

Abdou Karim LY ingénieur MBA/Cadre AWALE

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