Le 26 septembre 2024, le Sénégal a fait un choix inédit depuis son indépendance, révéler la vérité sur sa situation économique, marquée par des manipulations des comptes publics héritées de l’ancien régime. Cette démarche de transparence a conduit, le 3 octobre, à une dégradation de la note sa dette souveraine de Ba3 à B1 par l’agence Moody’s.
Cependant, loin d’être un revers, cette situation marque le début d’une nouvelle ère de transparence et de fiabilité pour Sénégal. Ce choix ouvre la voie à des opportunités de croissance et de renouveau, conforment au serment du Président Bassirou Diomaye Faye de faire du Sénégal un partenaire solide et fiable, respecté sur la scène internationale.
Pour aborder cette question de manière rigoureuse, analysons les coûts et bénéfices de l’option de transparence choisie par le Sénégal. Bien que ce choix de transparence implique un relatif coût immédiat, les avantages à court terme s’avèrent nettement plus significatifs.
Un coût de la transparence à relativiser
La dégradation de la note souveraine de Ba3 à B1, désormais équivalente à celle du Nigeria, première puissance économique de la CEDEAO, et supérieure à celle du Rwanda, noté B2, découle directement de la divulgation solennelle de la véritable situation économique du Sénégal par le gouvernement sous la direction du Premier Ministre Ousmane SONKO.
Cette décision pourrait susciter une certaine réticence de la part d’investisseurs qui étaient habitués aux chiffres embellis et aux slogans creux de « belle signature » du Sénégal, chantés par l’ancien régime. En conséquence, le financement international pourrait temporairement devenir plus coûteux, augmentant les charges d’emprunt à court terme.
Cependant, il est essentiel de nuancer cette potentielle augmentation des taux d’intérêt car les notes des trois agences prives de notation de la dette souveraine ne constituent qu’un simple avis parmi d’autres pour les investisseurs, et ces derniers considèrent également des facteurs fondamentaux tels que les ressources naturelles, la stabilité socio-politique et l’environnement des affaires. À cet égard, le Sénégal possède d’importantes richesses naturelles (pétrole, gaz, or, zircon, phosphate, fer, etc.) et jouit d’une stabilité socio-politique notable, des atouts précieux qui lui permettent de négocier des conditions de financement très avantageuses.
L’exemple de l’Angola est particulièrement inspirant, malgré une faible note de dette souveraine B3 en mai 2024, ce pays parvient à obtenir des financements à des conditions compétitives grâce à ses ressources naturelles.
Ainsi, le coût de la transparence est à relativiser. Une dégradation de la note souveraine ne signifie pas nécessairement une hausse systématique et inévitable des coûts de financement.
la transparence un pari gagnant pour le Sénégal
1) Renforcement de la confiance envers Sénégal
Les crises financières, telles qu’Enron et les surprimes, ont démontré l’importance cruciale de la transparence pour la stabilité et l’efficacité des marchés. Un manque de transparence entraîne une asymétrie d’information, favorise les comportements opportunistes et nuit à la confiance des investisseurs. À l’inverse, la transparence permet une évaluation adéquate des risques, renforce l’optimisme des marchés financier et contribue à une meilleure gouvernance en facilitant la prise de décision éclairée et limite les risques de manipulation et de fraude.
L’engagement du Sénégal en faveur de la transparence financière envoie un signal positif fort aux investisseurs tout en améliorant son attractivité et en renforçant la confiance dans son économie.
2) La transparence, un facteur clé dans la restructuration de la dette souveraine
Dans un contexte de tensions sur ses finances publiques, le Sénégal privilégie la transparence financière comme vecteur d’optimisation de la gestion de sa dette souveraine et d’accès aux mécanismes de restructuration. Le cas du Ghana, où un plan de restructuration de la dette vient d’être validé ce 4 octobre 2024 par les créanciers internationaux, entrainant une réduction de l’encours de la dette de 4 milliards de dollars (soit environ 2 400 milliards de FCFA), témoigne du rôle catalyseur de la transparence.
Pour le Sénégal, cette stratégie de transparence financière vise à renforcer la confiance des acteurs des marchés financiers et des institutions internationales, condition sine qua non pour accéder à des conditions de financement plus favorables. Parmi les bénéfices attendus, on peut citer :
• L’allègement du service de la dette par le biais d’une renégociation du principal, voire d’une annulation partielle de la dette.
• La restructuration du profil d’échéances notamment par un allongement des maturités, permettant une gestion optimisée des flux de trésorerie.
• L’optimisation des charges financières qui peut se traduire par une réduction du taux d’intérêt ou une conversion de la dette dans une devise offrant une meilleure stabilité macroéconomique.
En somme la transparence financière, en améliorant la crédibilité et la solvabilité du Sénégal, contribue à la viabilité de la dette et à la création d’espaces budgétaires pour le financement des dépenses publiques prioritaires.
3) La transparence financière un catalyseur pour le recouvrement des fonds détournés
Tel un citoyen qui dépose plainte pour un vol subi, l’État se doit d’être proactif face aux dérives financières de l’ancien régime en adoptant une politique de transparence sans faille. En effet, la divulgation complète de l’information financière, tant aux citoyens qu’aux partenaires internationaux, témoigne de la volonté réelle du Sénégal de recouvrer les avoirs spoliés.
Cette transparence renforce sa crédibilité et optimise ses chances de succès du recouvrement en facilitant la coopération internationale et l’identification des flux financiers illicites.
Elle permet également de mobiliser l’assistance technique et juridique d’organisations internationales telles que l’Initiative StAR, le GAFI et Interpol, expertes dans la traque des avoirs détournés.
Le recouvrement de ces fonds représente un enjeu crucial pour le Sénégal. Ces ressources, une fois récupérées, pourront être investies dans des secteurs prioritaires comme l’éducation, la santé et les infrastructures, contribuant ainsi au développement socio-économique du pays.
La transparence, un atout majeur pour le Sénégal, bien plus qu’une simple question d’éthique, elle favorise la stabilité et la croissance économique, malgré les inquiétudes que peut susciter la dégradation de la note de Moody’s.
En misant sur la transparence, le Sénégal se projette vers un avenir prometteur en renforçant la confiance des investisseurs, optimise les ressources pour son développement et améliore bonne gouvernance.
Comme le disait Nelson Mandela, « La transparence est la clé de la confiance, et la confiance est la pierre angulaire du développement ».
En osant la transparence, le Sénégal construit un avenir solide, juste, prospère et durable, fondé sur la confiance et la responsabilité.
ISMAILA BA
Juriste Fiscaliste
Membre du Moncap
Mail. [email protected]