Quand ils ne leur sont pas favorables, les classements du FMI, de la Banque mondiale et consorts ont le don de les irriter. Après le Cameroun, le Rwanda ou la France, c’est le Sénégal qui fait la tête.
Pour la deuxième année consécutive, le président sénégalais s’est mis en colère à propos d’un classement mondial. En 2014, c’était le rapport « Doing Business » de la Banque mondiale qui avait provoqué son ire, parce qu’il reléguait le Sénégal dans les derniers rangs en matière de climat des affaires.
Cette fois, il s’agit de celui du FMI, qui, selon le site lejournaldunet.com, placerait son pays parmi les vingt-cinq États les plus pauvres de la planète.
Confusion
En réalité, le site a présenté comme une nouveauté un statu quo : le Sénégal n’a pas régressé depuis un an. Cette annonce alarmiste n’est que le fruit d’une confusion entre le PIB par habitant calculé en dollars, qui a baissé pour des raisons de change, et le même PIB calculé en parité de pouvoir d’achat, donc en francs CFA. Lequel n’a pas changé depuis un an.
Les gouvernants devraient voir dans ces chiffres des avertissements utiles.
Macky Sall n’est pas le seul dirigeant à s’indigner d’un classement qui lui est défavorable. À chaque publication de chiffres du FMI, de la Banque mondiale, de l’OCDE ou de la Fondation Mo Ibrahim, des protestations s’élèvent contre des palmarès qui, selon ceux qui s’en estiment victimes, ne tiennent pas compte de leurs efforts. On a ainsi entendu crier à l’injustice le Rwanda, le Cameroun… ou la France, quand l’agence Eurostat a fait savoir que le Royaume-Uni l’avait doublée en matière de pouvoir d’achat.
Alertes
Tous souscrivent à la boutade attribuée à Disraeli, Premier ministre britannique au XIXe siècle : « II existe trois sortes de mensonges : les mensonges, les affreux mensonges et les statistiques. » Sauf quand le classement leur est favorable…
Plutôt que de prendre au premier degré des chiffres forcément grossiers (notamment en Afrique, où les services et les procédures statistiques laissent à désirer), les gouvernants devraient y voir des avertissements utiles, les alertant sur des problèmes que ne leur exposent pas toujours les flatteurs. Dans le cas du Sénégal, classé cette année par « Doing Business » parmi les dix États les plus réformateurs du monde, sa présence parmi les 25 pays les plus pauvres lui indique que la route vers l’émergence sera encore longue.
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