Sénégalaiseries (Par Ibou Fall)

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Une Tabaskrise trop ordinaire…
Comme à l’accoutumée, ce lundi 17 juin 2024, la République du Sénégal enjambe l’obstacle Tabaski sans que les piliers fondamentaux de la Nation n’en soient remis en question même si le monde interlope du transport interurbain est en transes.
Certes, à Gounass, où la charia aurait conquis quelques portions de territoire en pays laïc, ça s’étripe depuis la prière. Ce n’est pas une première…
Revenons à nos moutons dakarois.
Une semaine auparavant, ce qui est de coutume depuis Macky Sall, le chef de l’Etat, sous bonne escorte, va acheter son mouton. Cette fois, le cérémonial est minutieusement programmé par les génies de la com de l’avenue Léopold Sédar Senghor, un gros lundi aux heures de bureau. Le Président est en travail buissonnier, comme n’importe quel authentique salarié bien de chez nous, qui n’hésite pas à larguer les contribuables angoissés devant son guichet, pour filer en cuisine, histoire de se jeter un p’tit encas derrière la cravate.
Mea culpa : cette année-ci, pour la première fois, polygamie au Palais oblige, question mouton présidentiel, il faudra en marchander pour deux. Au nom de la transparence dans la gestion des deniers publics, le prix d’achat est connu de tous : cent-soixante mille misérables francs CFA par tête d’ovin encorné, payés avec cette honteuse monnaie coloniale que les Patriotes authentiques menacent de bouter hors du pays avec le dernier ambassadeur de France.
Un esprit chagrin me fait tout de même remarquer qu’il faut ajouter à la note les frais de protocole : en plus de la courtisanerie inévitable, les motards, l’ambulance, la sécurité, la com’ et le protocole présidentiels qui se sont déployés dès la veille.
Ça n’a pas de prix, on reconnait. Mais comme toutes choses en ces temps impitoyables, ça a un coût.
Il faut surtout éviter que notre tout nouveau chef d’Etat ne tombe sous les balles d’un cinglé déjà nostalgique de l’ancien régime. Ne souriez pas bêtement : c’est bien à l’occasion d’une tabaski que Moustapha Lô tentera de décapiter la République en essayant de trucider le président Senghor. Le pistolet ne se serait pas enrayé, on ne sait pas si la République du Sénégal serait encore de ce monde.
Revenons à nos moutons présidentiels.
On se l’imagine, le marchandage commence dès ce moment-là, loin des oreilles et des yeux indiscrets des dix-huit millions de concierges sénégalais. Au final, le lendemain, en plein jour, devant les caméras bienveillantes de la RTS, Bassirou Diomaye Faye s’octroie d’autorité deux bêtes à cornes d’allures assez dignes pour ne pas créer de crises conjugales quand bien même la petite histoire ne dit pas à qui est réservé le bélier aux plus belles cornes.
Aucun incident officiel noté : que veut de plus le peuple ?
Tant que la paix des ménages est sauve, il n’y a pas de sottes économies, même si l’on ne nous précise pas si cette dépense follement raisonnable relève des indemnités de fonction, des fonds politiques ou des charges ordinaires du Palais.
Tant qu’à faire, et puisqu’on navigue dans le privé confidentiel, autant satisfaire toutes les curiosités, n’est-ce pas ?
Pour le reste, rien que la routine…
Comme d’habitude, le débat macroéconomique national, à une encablure de l’échéance fatidique, tourne autour de la flambée des prix : faut-il raboter cinq francs CFA au moins, et dix au plus, sur le riz, l’huile, le chou, la carotte et le bâton de pèlerin, malgré la disparition des piécettes ?
Il y a ceux qui s’en foutent, parce que depuis la nuit des temps, quel que soit le régime, leurs intrigues de couloirs dans les allées du pouvoir les exonèrent des fluctuations intempestives. L’huile, la pomme de terre, l’oignon peuvent crever les plafonds qu’ils veulent, ce sera le cadet de leurs soucis : ils ont le bras long au bout duquel s’agite cette main agile qui va chercher dans les fonds publics les quelques deniers que les angles morts du Trésor public protègent des indiscrétions nationales…
Ça demande du métier, une bonne étoile et, surtout, cette capacité très sénégalaise au reniement, quitte à ravaler son vomi au besoin.
Il y a aussi ces compatriotes au sort touchant.
L’an passé, ils sont de ceux pour lesquels la République se permet les extras les plus coûteux : pèlerinage à La Mecque en avion présidentiel comme invités du Roi, passeports diplomatiques, postes aussi prestigieux que rémunérés à la crête de quelque conseil d’administration fantoche et énorme bélier parfois offert par le Prince ou aux frais de la princesse.
On n’est pas regardant quand vient l’âge de raison.
Sortir de sa poche du vulgaire CFA, alors que l’on trône en altitude mondaine, est une insulte à ses penchants aristocratiques. Hélas, en cette lugubre année 2024, ces braves gens relégués à l’insultant statut de nouveaux pauvres, vont devoir marchander l’agnelet comme des manants, virer quelques maîtresses qui sont autant de signes extérieurs de réussite, oublier d’habiller la progéniture de la concubine la plus soumise, celle qui s’honore d’accueillir chez elle l’agneau rachitique qu’on dégote après minuit.
De l’autre côté de la barrière des destins, on s’en doute, les nouveaux riches jubilent.
Il y a un an, dans l’enceinte de leurs geôles, certains parmi eux rompent encore le pain rassis et se partagent fièrement une écuelle de « ndambé » entre détenus de droit commun. Le messianique « Projet » qui leur ramène en mars 2024 54 % de l’électorat, défendu à grands jets de pierres et de cocktails Molotov, toujours en gestation, vaut bien ce sacrifice, non ?
Pari gagnant, ils ont raison de croire en leur bonne étoile… Amnisties en tous genres, amnésie nationale, élargissements tous azimuts, puisque personne n’est coupable de quoi que ce soit et, comme dirait le poète, « les morts ne sont pas morts ». C’est ainsi que le slogan cabalistique « Diomaye môy Sonko » passe dans les urnes comme lettre à la poste et le résultat ne se fait pas attendre : du côté des nouveaux riches, des chèques s’exhibent sur les réseaux sociaux pour magnifier le combat patriotique pour la souveraineté nationale.
Elle est pas belle, la vie ?
Trêve de niaiseries : après quelques incursions dans la sous-région, le temps des choses sérieuses est arrivé. Depuis Senghor et Pompidou, un chef d’Etat sénégalais doit poser sur le perron de l’Elysée avec le sourire, s’il veut que ses relations avec le FMI, la Banque mondiale, l’Union européenne restent au beau fixe.
La fin de la récréation est proche.
Parmi les sujets qui fâchent, il sera sans doute question des foucades du Premier ministre Ousmane Sonko à l’UCAD devant son invité Jean-Luc Mélenchon, sur les ignominies endurées sous Macky Sall avec la bénédiction de la France ; il faudra également une explication de texte à propos du slogan « La France dégage », tout comme les poursuites contre l’Envoyé spécial Macky Sall accusé de « crimes contre l’humanité » par quelques illuminés dont Juan Branco. Et peut-être quelque mot de compassion ne serait pas de trop concernant le nez, que dis-je, l’appendice, la péninsule nasale de Killian Mbappé, qui se serait fracassée sur les récifs du foot européen.
Dans ces sphères-là, pour être en odeur de sainteté, il ne faut pas manquer de flair…

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