Si la grandeur d’une pensée se mesure assurément à ce que nul ne peut éviter de la croiser, d’y séjourner un jour ou une vie entière, de l’habiter en apprenti, d’en ressortir la splendeur, Senghor est bien installé dans l’histoire de la pensée contemporaine.
Il fait donc partie des intellectuels qui ont contribué à modifier profondément et durable- ment le paysage intellectuel et politique mondial. Théoricien et novateur, jamais coupé des enjeux de son époque mais jamais réductible à eux, son œuvre est devenue une clé de lectu- re du temps présent.
Elle démontre la nouveauté et la force de l’impact du Président-poète sur l’Histoire.
Quinze ans après sa mort, sa voix n’a cessé de s’affermir. Elle porte aujourd’hui plus loin qu’il y quinze ans. La cause est sans doute à chercher dans le fait que sa pensée était visi- onnaire comme sa villa futuriste de la corniche à Dakar.
Le poète à l’esprit créatif avait l’intuition de l’avenir. Il était capable d’anticipation.
On l’appelait, on sollicitait son avis, ou lui confiait des missions. On lui décernait un diplôme honoris causa ou lui accordait une citoyenneté. On inscrit en France, sa réflexion aux pro- grammes de l’agrégation de lettres.
En 2006, pour fêter les 100 ans de Senghor, l’UNESCO publiait, sous la plume d’éminents intellectuels du monde, 50 écrits en hommage au poète-président.
Mais accuser SENGHOR de tel ou tel renoncement n’a aucun intérêt, pas plus que vouloir le rallier à l’intellectuel universel que représente Marx. Sans doute, il a eu des impasses : ses concepts contradictoires: négritude et francophonie, sénégalité et francité, dialogue et autorité (il savait mordre, réprimer)…..
En réalité, il était plus « l’homme des confluences » que des contradictions ou des compro- missions. Il appréciait ce thème pascalien de l’accordement des contraires. Il maîtrisait l’art de la nuance.
Il y a bien plus passionnant: retracer sa trajectoire, ses luttes dans son champ de spécificité et comprendre l’écho reçu par ses thèses, jusqu’à aujourd’hui inclus.
Tout ce que nous pouvons dire a déjà été dit sur ce Président politique et culturel.
Modestement, nous tenterons d’analyser combien les idées senghoriennes forgées au 20ème siècle sont encore actuelles.
Comment a-il- pu jeter sur le monde d’aujourd’hui les ailes de sa pensée ? Comment ses thè- mes récurrents voire ses concepts contradictoires ont pu trouver leur traduction au sein de la communauté internationale ?
Sans nous livrer à un ordre spécifique de tous les points, nous étudierons, pour avoir une li- gne générale, sûrement volontaire, le contexte réel dans lequel une œuvre d’exception née au siècle dernier traverse encore ce siècle nouveau.
-la Civilisation de l’Universel
Senghor en imaginant la Civilisation de demain, symbiose vivante de tous les continents, de tous les peuples et toutes les races pressentait la Mondialisation( Globalisation).
Roger DEHAYBE, écrivain belge, Commissaire de l’année de Senghor et Ancien Adminstra-teur de la Francophonie affirme: « le père de l’alter-mondialisme, c’est Senghor .»
La Civilisation de l’Universel surgissant du rendez-vous du donner et du recevoir devait en effet donner naissance à la rencontre de toutes les civilisations particulières.
Penser qu’on a des valeurs communes, des savoirs communs, on doit donc construire et par- tager ensemble.
Dans cette mondialisation devenue irréversible, l’Afrique pourrait y apporter grandement son sens de la communauté, de solidarité et de partage et lui, l’humaniste, forcément une touche de fraternité.
-la détérioration des termes de l’échange
Senghor fut le premier à dénoncer dans un célèbre discours à l’ONU en 1962 la détériora- tion des termes de l’échange appauvrissant les producteurs agricoles du Sud.
L’inégalité des pouvoirs de négociation entre les petits producteurs des pays en voie de développement et les filiales des grosses sociétés agricoles des pays développés était de nature vertigineuse.
Les recettes à l’exportation des pays du Sud en baissant considérablement entrainaient des conséquences graves sur l’investissement, les dépenses publiques, l’emploi et le pouvoir d’achat des populations, d’où leur endettement.
Senghor n’a cessé de marteler tout le temps et partout, cette notion de détérioration des termes de l’échange.
Il était déterminé à créer des opportunités pour les producteurs économiques du Sud en situation de désavantage, à mener le combat contre la pauvreté et à instaurer de l’équité, de la transparence et de la solidarité dans ce système mondial trop injuste.
Sa revendication pour un système d’échange dont l’objectif était de parvenir à une grande égalité dans le commerce mondial, à utiliser le commerce comme un levier développement et de réduction des inégalités en veillant à la juste rétribution des producteurs a fini par don- ner naissance au commerce équitable.
Son combat contre la dégradation des termes de l’échange démontre que le nègre doit avant tout se faire respecter pour se faire entendre et pour obtenir réparation de l’injustice engendrée par le pacte colonial.
– le dialogue des cultures
Pour Senghor, la pensée se constitue dans l’échange, dans l’altérité ou la contradiction, ce qui suppose un dialogue : dialogue des cultures et dialogue des religions.
Concernant le dialogue des cultures, le message ne variait jamais. Il avait une vision universa liste de la culture. La refondation du monde passerait fondamentalement par le métissage culturel.
La culture supérieure à la politique demeure un élément primordial dans toute approche de développement.
D’autre part, il a théorisé le dialogue des religions : le dialogue islamo-chrétien. Il a vite compris que la religion est un sujet sensible, où on est confronté à une diversité de cro- yances. Sans le dialogue, la religion restera l’accélérateur de la violence, le ressort, le pré- texte, l’inspiration de la plupart des violences et des conflits.
Le 21ème siècle en tournant le dos à ses recommandations lucides porte malheureusement en lui les folies des nations et des peuples.
-les cercles concentriques
Le monde qui se construit, sera constitué de grands ensembles autour de l’Europe, des Etats- Unis d’Amérique et de la Chine. C’était le constat de Senghor
C’est pourquoi, il pensait aussi que l’Afrique devait être un grand rêve nourrissant espoirs et passions. Il rappelait que le continent maternel est condamné à se réaliser, que ce soit pas à pas, ou au moyen de marchandages diplomatiques. C’était sa théorie des cercles concentri- ques (une intégration régionale)
Son sursaut d’audace pour éviter une Afrique balkanisée n’a pas eu un grand succès. Houphouet a manifesté une absence de générosité. Au final, l’Afrique n’a pas accompli cet esprit de dépassement.
-le marxisme
Senghor n’a jamais été marxiste. L’ancien séminariste n’y trouvait pas Dieu. L’idéologie marxiste excluant la spiritualité. Mais il a libéré la terre pour la confier aux paysans sénéga- lais.
Au moment où les peuples se ruaient vers le marxisme, il a refusé de subir l’envoûtement, se cramponnant sur un système de pensée humaniste d’inspiration négro-africaine : sa négritu- de
Néanmoins, il n’a pas tout rejeté du marxisme. Il a retenu la dialectique comme méthode. Plus tard, Foucault témoignera lui-aussi s’inspirer de la philosophie sur la genèse du capita- lisme dans l’idéologie marxiste.
L’Histoire n’a-il-pas donné raison à Senghor avec la chute du mur de Berlin en 1989 ?
Quel le pays se targue maintenant d’être communiste ?
Edgar FAURE, son grand ami, Immortel comme lui, disait: « avoir raison très tôt, c’est avoir tort.»
-la démocratie pluraliste
Senghor a été le précurseur de la démocratie pluraliste au Sénégal et en Afrique. Il a instauré le multipartisme limité avant qu’il ne soit intégral sous la présidence d’Abou Diouf.
Sortir du parti unique en ce temps fut une décision novatrice et surtout de haute portée politique.
-l’environnement
Contrairement à la plupart des responsables du monde, Senghor, lui, avait compris très rapidement les défis environnementaux. Dès son accession au pouvoir, il a crée une di- rection des parcs et des espaces verts rattachée à la Présidence de la République.
A cette époque, où l’écologie était un fait marginal, il avait déjà la conscience civique du risque de la disparition de la faune et de la flore. La finitude des ressources devenait une donnée. La Terre n’est ni rechargeable ou extensible.
Il était animé par le sentiment d’une responsabilité à l’égard des générations futures
-l’organisation et la méthode
Senghor avait le sens de l’organisation et de la méthode. Il est même rapporté que son emploi du temps était un modèle de rationalité.
Il avait crée le Bureau d’Organisation et de Méthode(BOM) sis à la Présidence de la Républi- que, qui a su impulser qualité et efficacité à l’administration et aux services publics du SENEGAL.
Il présageait l’ère du management administratif. On ne saurait mieux dire de ce poète qui envoyait à l’époque, les futurs hauts cadres sénégalais se former dans ce domaine au Canada
Sous le pouvoir du Président WADE (qui lui a rendu un hommage digne lors de ses obsè- sèques), la culture administrative sur laquelle reposait l’appareil d’Etat s’est affaiblie
Senghor n’improvisait pas et s’en tenait à son agenda. Wade a l’esprit fonctionnant en arborescence, une idée amène l’autre, les faits s’emboitent les uns les autres.
Incontestablement, sous le règne de Senghor, il était inimaginable qu’un Sommet international (OCI ) fût reporté plusieurs fois pour impréparation
Lorsqu’on peut tirer sur les théories d’un Homme si largement, on a la preuve expérimen- tale de toute sa dimension intellectuelle.
En définitive, Senghor a réussi à sortir l’opinion internationale de son lieu naturel, la faire aller en un point, où elle ne saurait jamais aller d’elle-même, lui retirer toute évidence pour la remplacer par d’autres évidences.
Il a opéré à ce déplacement historique avec probité, séduction et conviction
Par sa vision globale et lucide, l’Humanité forte de ses valeurs impérissables marchera encore dans le sillage de sa lumière.
Maître Mamadou DIALLO
Avocat au Barreau de Paris
docteur en droit
Auteur des Eclats du Temps (Poésie)
Responsable des Cadres AFP-FRANCE
oui le negre de service qui s’est employé à mort à detruire le peuple noir.
il faut pas deranger senghor dans la poubelle de l’Histoire
Anonyme, tu es un con et un ignorant, Wakh gnou lou sa baay deff !!!
Bien repondu.
Merci Me Diallo,
Belle analyse dans une perspective historique mais actuelle .
Cet homme SEDAR SENGHOR que tous les grands leaders sprirituels de son temps ont confirmé et consacré .
Pour celui qui veut s’émanciper de toute naiveté , il faudrait éviter de critiquer la pensée de Sédar sinon en apportant la contradiction aux grands souteneurs de Senghor à partir de 1946….
Qui peut se croire plus intelligent que les preux proches des grands hommes Ababacar Sy, Seydou Nourou TALL, Baye Niass et son père père El Hadj FAlilou MBACKE .
Le Sénégal est fier d’avoir eu un grand premier serviteur respecté de par le monde, dpuis les Amériques jusqu’en extrème -Orient: j’ai nommé Sédar Léopold SENGHOR.
Vive le Sénégal
Senghor, l’auteur de cette triste citation : » L’émotion est nègre, la raison est hellène. «