La politique est un jeu de planification opéré à partir d’une compréhension des faits en cours et des actes posés, sans lesquels il est impossible de s’adapter aux situations pour s’imposer. C’est ce qu’Idrissa Seck a compris. Il a lancé un assaut bien planifié et, en conséquence il est attaqué en retour partout et par tous, particulièrement par la mouvance présidentielle et par le Pds.
Pour une partie de la presse, il aurait commis une erreur. Pour d’autres, il mène un combat de survie politique. Mais son objectif est atteint. Futé et astucieux, longtemps oublié en raison de ses longues absences répétées à dessein, il a réussi à concentrer et à centraliser tous les regards sur lui en s’imposant finalement comme le principal opposant de Macky Sall.
De 2013 à 2015 et, durant la première moitié de 2016, deux personnalités politiques s’imposaient comme les principaux et potentiels adversaires crédibles de Macky Sall : Karim Wade pour les libéraux et Khalifa Sall pour des socialistes. Malick Gackou émergeait. Abdoul Mbaye surgissait.
Rewmi, le parti d’Idrissa Seck subissait en ce moment une crise interne, conséquence d’une incompatibilité d’humeur et d’une série d’apostasie qui amenait certains à rôder aux portes du Macky, arguant de raisonnements triviaux et peu pertinents pour légitimer une imminente transhumance comprise par tous.
Idrissa Seck fut inaudible. Mais l’intendance de son parti, Rewmi, gérée par le duo Bocoum-Déthié, est restée inflexible malgré les attaques de frères de parti qui pliaient déjà bagages pour transhumer. Pendant cette menue crise vite passée comme un bref souffle sahélien, Idrissa Seck est demeuré invisible, se taisant et se terrant jusqu’à susciter même toutes sortes d’interprétations.
Mais le Président de Rewmi est de la « Wadie » : comme l’homme du 19 mars 2000, il a l’art de transformer les déboires, les vapeurs chaudes et les revers en opportunités d’envol politique. Les départs d’Oumar Guèye, Pape Diouf et Oumar Sarr n’ont ainsi point ébranlé son parti.
Et, aujourd’hui, une situation nouvelle secoue l’arène politique : la libération de Karim Wade. Contrairement à ce que pensent des observateurs, Idrissa Seck est le plus grand gagnant dans cette situation politique. Il a vite su mettre à profit politique la controverse de cette libération nébuleuse en raillant stratégiquement la traque des biens mal acquis que les Sénégalais considèrent comme l’expression d’une justice d’exception téléguidée et de règlement de comptes politiciens. Il les convainc.
Le PDS, proche du Macky
Le PDS a été la principale force d’opposition. Mais il a commis deux erreurs dues à ses limites génétiques.
D’abord, n’ayant jamais songé durant son épopée politique à la relève, il s’est retrouvé dans l’obligation de confirmer la dévolution monarchique du pouvoir contre laquelle les Sénégalais ont voté en 2012. En faisant de Karim Wade son candidat afin de l’élever au rang de prisonnier politique pour incommoder Macky Sall, il poursuit la volonté impertinente de Wade de faire de son fils son héritier. Mais ce Karim en a-t-il le charisme, la légitimité sociale, politique et historique ? Finalement, il appert que le PDS est devenu un parti sans leader. Son erreur de faire de Karim Wade son candidat est amplifiée par l’échec de la sortie de celui-ci de prison, un moment qui devait être une période d’affirmation d’un halo politique. Ce fut un deal et il a perdu.
Ensuite, le PDS et l’APR se mettent sur une voie de retrouvailles. Ils défendent depuis la libération de Karim Wade les mêmes causes et ont pour seule cible Idrissa Seck. Contre celui-ci, le PDS défend même Macky Sall. En conséquence, il déserte l’arène de l’opposition et Idrissa Seck s’y installe.
Idy est, d’ailleurs, le premier homme politique à qualifier la libération de Karim de « deal », installant un gros malaise dans la majorité. Les tirs groupés qui s’en sont alors suivis contre lui ne le desservent pas. Au contraire, ils le galvanisent. Ils sont à son avantage. Le débat démocratique devant être bipolaire ou tripolaire, un opposant gagne à être attaqué par l’adversaire au pouvoir plus qu’à être ignoré. Idrissa Seck a mené ce jeu et l’a réussi.
Il a provoqué le pouvoir et l’a forcé à se focaliser sur sa personne. Politiquement, il met le PS en apnée, fait oublier Khalifa Sall, efface Malick Gackou, gomme Abdoul Mbaye et fait l’actualité.
On ne parle que de lui. La presse nationale et la presse internationale en font la personnalité politique qui intéresse. Mieux, il comprend l’effet de la parole dans la conscience publique d’une société sénégalaise de civilisation orale. Ses répliques et ses attaques, spontanées, brèves et incendiaires, ne laissent personne indifférent.
« Macky Sall a tous les défauts de Wade et n’a aucun de ses talents », le résume-t-il si adroitement. Et l’APR réagit par un langage maladroit et injurieux qui l’éloigne de l’éthique et des idées. Aucune de ces réactions provenant de Ministres, Députés, DG de Sociétés et autres ne charrie en elle des idées mais des assauts axés uniquement sur la personne de Idrissa Seck.
Quand celui-ci évoque l’intercession du Qatar, le lobby pétrodollar, la souveraineté nationale, la situation sociale et les crises de société, le pouvoir APR et parfois le PDS rétorquent par la voix de personnes peu futées dans la réplique politique et promptes à la riposte rudimentaire.
Macky Sall a le génie d’imposer des reniements par une gymnastique de la Loi fondamentale. Mais Idrissa Seck a l’intelligence politique d’en profiter pour unir en diphtongue les impairs de sa gouvernance et les bourdes de sa politique afin de l’attaquer là où ça fait toujours mal.
Il a d’ailleurs réussi aujourd’hui à mettre l’APR et le PDS dans le même lot, celui de partis de dealers qui négocient en cachette pour aboutir à un dénouement dont ils sont les seuls bénéficiaires.
La réplique du Protocole de Rebeuss qui lui est opposée passe peu. « Ce prétendu protocole engage aussi la responsabilité de Macky Sall qui, à l’époque, était avec Wade », explique un analyste politique. Le régime PDS était donc indubitablement un régime dealer.
Un enjeu politique familial
Le combat politique actuel ne met pas la gauche dans une orbite d’attaque et de lutte. C’est un combat interne à une famille politique. Il met en marge le Parti socialiste (PS) et l’AFP. Il efface Abdoul Mbaye et fait oublier Malick Gackou. Il oppose uniquement les fils de Wade : Idrissa, Karim et Macky. Toute la géopolitique nationale future se définira par rapport à ce trio.
Et c’est justement là qu’Idrissa Seck marque un grand coup. Il a réussi à mettre en selle un raisonnement causal : il dénonce la louche libération de Karim Wade en la diluant au désenchantement national des Sénégalais sur la traque des biens mal acquis, sur leur partialité et leur arrêt imminent et apodictique.
En réalité, Idrissa Seck est différent de Macky Sall. Son intelligence verbale lui donne la capacité d’attaquer avec un jeu de calembour qui lui permet de conquérir l’esprit public. Cet atout n’est pas en Macky et n’est nulle part en Karim qui traine un grand handicap en communication.
Idy, Macky et Karim : différemment pareils
Karim Wade, Idrissa Seck et Macky Sall ont ceci de commun : ils sont malins, drôles et ingénieux. Ni l’un, ni l’autre, ni l’élu de 2012 n’acceptent d’être enfermés ou freinés par des règles, des instructions ou des conventions. Chacun croit être supérieur à l’autre. Ils ont tous les trois du mal à se plier aux normes et veulent toujours avoir raison.
Mais Karim et Macky diffèrent d’Idy. L’ancien Maire de Thiès aime le travail qui aboutit à des résultats à ovationner. Il est plein d’humour et de gentillesse contrairement à Karim toujours aphone et à Macky au faciès spartiate, taciturne et austère. Mieux, Idrissa Seck aime voir les gens rire et les convaincre. C’est pourquoi, il dépasse Karim et Macky en communication politique et sait s’imposer.
Il a l’esprit fertile. Il partage avec Macky Sall la passion du travail appliqué et fiable. Mais quand Macky murit une décision, il va jusqu’au bout, advienne que pourra. Ce n’est pas le cas d’Idrissa Seck qui a la propension de peser le pour et le contre avant de se lancer. Mais les deux anciens Premiers ministres sont loin de Karim Wade. Ce dernier est ingénieux. Mais son insouciance dans la quête du plaisir lui joue toujours des tours comme avec ce qu’il a vécu. Il est ouaté et manque de sociabilité. Il lui est même reproché de penser peu aux autres. Son envol au Qatar laissant ses militants dans le frimas nocturne du Point E en dit long.
Idrissa Seck le connait autant qu’il comprend Macky Sall. Il se bat contre tous les deux. L’enjeu est la force libérale. Il ne cesse d’ailleurs de dire être l’actionnaire majoritaire du parti. Et il réussit toujours à perturber des sommeils comme il en est ainsi.
Pape Ndiaye Rewmi Quotidien
Comparaison n’est pas raison. Il ne faut jamais caresser les mots et comparer ce qui n’est pas comparable. Dans une compétition olympique, un classement s’est toujours imposer pour savoir le premier et le dernier: l’or, l’argent et le bronze.
Dans une compétition de foot européenne, africaine, américaine au mondiale, c’est encore pareil: la coupe et médaille d’or au champion (1er), la pauvre médaille d’argent au 2e et la misérable médaille de bronze au 3e.
Dans une classe d’école au primaire ou collège ou université on fait la même chose: on sait toujours le 1er ou major et aussi le dernier ou ndaré.
Eh, bien qu’attendez-vous pour faire ce classement aussi simple pour ne confondre personne par des gymnastiques verbales aux multiples acrobaties qui finissent par perdre plutôt que d’éclairer les gens.
BRAVO PAPE ANALYSE OBJECTIVE ET PERTINENTE