L’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) est loin d’être favorable à la taxe sur les appels entrants instituée par le Sénégal et dont la gestion est confiée à Global Voice Group. Ce que l’institution sous-régionale a fait savoir en demandant au Sénégal une dérogation pour les Etats membres. Déjà, la Côte d’Ivoire affiche la couleur en refusant de collecter des profits pour le Sénégal. Une démarche que compte également adopter d’autres espaces monétaires africains.
À la lumière des recommandations du communiqué final de la réunion sectorielle des ministres en charge des Télécommunications et des Tic des Etats membres de l’Uemoa (Ndlr : 29 juillet à Bamako), il y a une forte probabilité que le Sénégal suspende la surtaxe sur les appels entrants. En fait, pour ce qui est de l’instauration d’une taxe sur les communications internationales entrantes, les ministres, après concertation, «invitent les Etats qui appliquent une taxe ou un tarif sur les communications internationales entrantes à veiller, par esprit de solidarité, à ce que cette mesure ne s’applique pas aux Etats membres de l’Union». Ce, poursuit le communiqué dont nous avons copie, «en attendant qu’une étude approfondie soit menée sur la question relative à une taxe ou un tarif sur les communications internationales entrantes/sortantes».
Par ailleurs, la conférence des ministres déclare qu’«un avis technique de l’Union internationale des télécommunications (Uit) sur la question sera requis». Pour convaincre l’Uemoa de la nécessité de suspendre la surtaxe sur les communications internationales, des experts des télécommunications et des Tic des Etats membres de l’Uemoa ont transmis leur compte-rendu aux ministres sur la question. Dans le document dont nous détenons aussi copie, ces experts rappellent que la Côte d’Ivoire a suspendu la surtaxe suite aux plaintes des acteurs des télécommunications en 2009. De même, notent-ils, le Burkina Faso, qui avait inscrit la taxe sur les communications internationales entrantes dans la loi des finances 2010, a également suspendu la mesure. Ils ont également signalé le cas du Mali où des réflexions sont en cours depuis 9 mois. Alors qu’au Sénégal, écrit le compte-rendu, «un décret instituant un seuil minimal du tarif des communications téléphoniques internationales entrantes entre en vigueur à partir du 1er août».
La Côte d’Ivoire refuse de renflouer les caisses du Sénégal
Que le directeur général de l’Agence de régulation des télécommunications et des postes (Artp), Ndongo Diao, ne compte pas sur les opérateurs de téléphonie en Côte d’Ivoire pour renflouer les caisses du Trésor public sénégalais, via la surtaxe sur les appels internationaux. Dans une note circulaire n°001/08-10 datant du 5 août 2010, les directeurs généraux des sociétés de téléphonie membres de l’Union nationale des entreprises de télécommunications (Unetel) ivoirienne refusent de collectionner des fonds pour le Sénégal. «Nous avons eu connaissance du Décret pris par les autorités sénégalaises portant relèvement des coûts d’accès au territoire du Sénégal, aux fins de constituer une taxe fiscale au profit de l’Etat sénégalais, et cela à la charge des citoyens de tous les autres Etats», lit-on dans la circulaire signée par le directeur exécutif, André A. Apete. Pour l’Unetel, une question s’impose aux entreprises ivoiriennes de téléphonie, dans le cadre de leurs relations d’échanges de trafic avec les entreprises sénégalaises : Faut-il appliquer cette taxe unilatérale qu’impose l’Etat du Sénégal et la répercuter sur le consommateur ivoirien en bout de chaîne ? Se référant à la convention régissant les relations de télécommunications internationales, l’Unetel demande «à tous les opérateurs de services de téléphonie, membres de notre Union patronale de (…) ne point accepter de s’ériger en collecteurs d’impôts au profit d’Etats étrangers, et cela à la charge des clients et citoyens résidant en Côte d’Ivoire».
Hausse de 3 euros sur les appels en Italie
Par ailleurs, les immigrés sénégalais en Italie commencent à casquer fort pour communiquer au téléphone vers le Sénégal. À preuve, depuis l’entrée en vigueur de la mesure, ils accusent une hausse de 3 euros (environ 2000 FCfa) sur les communications. À en croire l’immigré sénégalais en Italie Mame Thierno Birahim Niang, «avant la surtaxe sur les appels entrants, on payait 3,5 euros les 30 minutes. Maintenant, les 30 minutes nous reviennent à 6,5 euros». «Quant tu appelais au Sénégal de l’Italie, le premier appel coûtait 30 centimes, et la première minute suivante 9 centimes. Mais, le décret de Wade nous fait payer 15 centimes pour le premier appel et toutes les minutes qui suivront seront facturées à 22 centimes», tempête Mame Thierno Birahim Niang, leader du mouvement Sénégal Dieum Kanam. Et pour crier leur ras-le-bol, les membres de ce mouvement se réunissent le 15 août à Bordeaux (France) pour décliner leur plan de riposte au régime de Me Wade. «Les Européens n’appellent pas au Sénégal, c’est plutôt nous immigrés qui allons souffrir avec la taxe sur les appels entrants. On nous a interdit les voitures de moins de 5 ans, maintenant on augmente nos tarifs de communication. Où allons nous ?», s’interrogent les membres du mouvement Sénégal Dieum Kanam.
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