-Au début, c’était Jololi. Puis le label mua en « Prince Arts », avec beaucoup d’artistes produits. Pour être précis, Prince Arts règne sur le marché de la production locale des musiciens, depuis de nombreuses années. Le label compte à son actif, les œuvres des plus grandes célébrités du moment, mais ne fait pas toujours dans la production de qualité.
Célébrité du moment, égale-t-elle performance ? Dans son travail quotidien, le label Prince Arts, prospecte t’il, encadre t’il, et détecte t’il des jeunes talents, avant de les produire et d’assurer leur promotion ? Si tel est le cas, il lui resterait beaucoup de travail à faire. Car, même si régulièrement, de nouveaux musiciens apparaissent et inondent le marché d’œuvres musicales qui font un tabac devant un public médiocre, force est de reconnaître que la plupart du temps, ce sont des petits singles ou des albums passagers. Autrement dit, le fruit d’inspiration artistique accidentelle et très limitée dans le temps, mais qui ne traduit guère un travail soutenu, une maturité et une ébauche de carrière solide, si réellement l’objectif est de permettre à l’auteur de vivre plus tard de son art. En revanche, si comme cela se passe dans la plupart des maisons de productions confirmées, « Prince Arts » attend simplement qu’un interprète lui propose une œuvre, pour se contenter de la commercialiser et d’en assurer la promotion, le label n’a presque aucune responsabilité sur l’avenir du produit proposé et la carrière de l’artiste. C’est ce dernier qui serait responsable de tout, et malheureusement, viendrait gonfler la liste des « One man tube », comme c’est la tendance.
Il serait fastidieux de dresser la liste des tous ces artistes qui n’ont sorti qu’un seul album ou un single avant de disparaître de la scène musicale, mais les seuls exemples d’un Abou Thioubalo, d’un Abdou Raass ou d’un Assane Gaye de Kaolack, suffisent pour édifier sur l’après album et les carrières éphémères. Qui entend encore parler de ces chateurs depuis qu’ils ont réussi à s’imposer aux mélomanes sénégalais avec un seul titre ? Ils ne sont pas les seuls menacés cependant. Car, si le tir n’est pas rectifié à temps, le même sort risque d’arriver aux nouvelles coqueluches que nous montre la télé du matin au soir, et que sont Aida Samb (petite fille de Samba Diabaré) et Baba Hamdy, le pianiste. Actuellement, ces deux là font le buzz, mais à les écouter de près, on ne peut s’empêcher de penser qu’ils se sont précipités à sortir single ou album. Ils auraient du attendre un peu de confirmation. Aida Samb peut très bien se prévaloir de l’héritage de ses ancêtres pour se lancer dans la musique, surtout quand on sait qu’elle a également fait l’école des Arts. Mais pour autant, peut- elle s’imposer en si peu de temps, et avec un ou deux seuls titres dont légitimement elle peut se prévaloir ? Nous ne le croyons pas. Il ne faut pas chercher coute que coute à grandir en une seule année. D’abord par ce que le legs traditionnel, fut-il d’un Samba Diabaré, compte peu dans une carrière (on a vu des chanteurs non « castés » comme Baba Maal ou Titi) ensuite, ce n’est pas le nombre de titres qu’on peut sortir à la fois, qui détermine l’intérêt que peut susciter un album.
Certes, Aida Samb a une voix du tonnerre, a commencé à percer et peut voir l’avenir avec beaucoup de sérénité. Mais le seul fait de démarrer sa carrière, non pas avec une chanson qu’elle a créée, mais avec un titre aussi éculé que « Saraba » que toutes les générations de griots ont chanté, est déjà signe d’une indigence en matière de révélation. Et cette intrusion, ajoutée à la sortie précoce d’un album de 1O chansons et de « lula Nekhe » un single douteux qui a requis le concours de beaucoup de musiciens pour être audible, devrait suffire à convaincre la chanteuse qu’elle est encore en apprentissage. Et en apprentissage, on fait doucement, même si ce n’est pas très rentable. La même remarque est valable pour le pianiste Baba Hamdy. Lui aussi a commencé sa carrière de façon peu originale en reprenant instrumentalement la presque totalité des morceaux de Youssou Ndour. Mais alors qu’on croyait qu’il s’était aperçu qu’un artiste s’impose d’abord son propre produit, pour se faire son vrai nom, voilà qu’il laisse tout tomber son piano ( provisoirement ? ) pour s’essayer laborieusement à la chanson, même s’il a choisi la langue anglaise, pour peinturlurer une voix rocailleuse pas spécialement convaincante. Franchement, les nouvelles sorties de ces deux musiciens pleins de talent, paraissent précoces après leurs premiers albums. Ils auraient du un peu attendre et travailler davantage, avant de prétendre accéder à la cour des grands. Mais comme nous croyons qu’ils ont un encadrement suffisamment responsable pour redresser la barre, ces petites erreurs de départ peuvent être rapidement corrigées.
REWMI QUOTIDIEN