Ousmane Tanor Dieng a mis en veilleuse les grandes conférences qu’il organise à Paris. Il a opté pour une visite de proximité dans les foyers parisiens où habitent des Sénégalais de l’extérieur. C’est ainsi qu’il a rendu visite aux commerçants sénégalais du célèbre quartier Château Rouge du 18e arrondissement de Paris. Ensuite, le Secrétaire général du Ps s’est rendu au foyer Amandiers du 20e arrondissement de Paris, à celui de Soundjata Keïta de Rosny-Sous-Bois et de Boulogne, en banlieue parisienne. A l’occasion de ces visites, Ousmane Tanor Dieng a annoncé qu’une commission formée de constitutionnalistes est en train de rédiger une nouvelle Constitution qui sera déposée sur la table des leaders de Bennoo Siggil Senegaal en octobre prochain. Dans la foulée, il a énuméré les conditions d’une candidature unique de Bennoo pour les élections de 2012.
(Correspondant permanent à Paris) – La coalition Bennoo Siggil Senegaal est en train d’élaborer une nouvelle Constitution qu’elle soumettra au référendum si elle gagne l’élection présidentielle de 2012. C’est l’annonce faite par Ousmane Tanor Dieng qui était en tournée, samedi dernier, aux foyers des immigrés sénégalais de Paris et de sa banlieue. Selon le Secrétaire général du Parti socialiste, cette nouvelle Constitution, qui est en train d’être rédigée par un groupe de constitutionnaliste, sera déposée en octobre. ‘Aujourd’hui, il y a à Dakar un comité de rédaction de la Constitution qui travaille sur la base d’équilibrer les pouvoirs, d’une nouvelle gestion du pays. Ce projet de Constitution va nous être remis au mois d’octobre. Il faut qu’on sache dans quel régime celui qu’on va choisir comme président va travailler’, a fait savoir le leader du Parti socialiste. Si l’opposition sénégalaise la plus significative a opté pour une nouvelle Constitution, c’est pour équilibrer les pouvoirs, a-t-il fait valoir. ‘Il faut équilibrer les pouvoirs pour que le Premier ministre ne soit pas à la disposition du président de la République qui peut l’enlever à tout moment. Nous voulons une assemblée qui ne soit pas une chambre d’enregistrement. Nous voulons une justice qui ne soit pas vassalisée par l’exécutif. C’est ça que nous allons mettre dans la Constitution’, insiste le socialiste en chef.
Mais il s’agit, par ricochet, d’éviter que le futur président de Bennoo, s’il est élu, ne puisse pas ‘enlever les gens comme il veut et penser même pouvoir mettre son fils’. ‘Pour ça, nous avons organisé un séminaire et des constitutionnalistes se réunissent pour élaborer une nouvelle Constitution. De sorte que celui qui sera élu comme président sache que les pouvoirs qu’il dispose sont limités, que voilà les pouvoirs du Premier ministre, de l’Assemblée nationale’. Pour le leader du Ps, c’est ce qui est normal et il en fait un ‘préalable’, pour ne pas dire une condition, dans la perspective d’une candidature unique.
Le deuxième préalable pour aboutir à une candidature unique, c’est un programme. Tanor Dieng fait savoir que ce programme doit être discuté afin d’arriver à dégager des priorités. ‘Le deuxième préalable, pour élire un président, il faut qu’on sache quel programme il va appliquer. Ce programme-là, on va le discuter. On a des orientations à partir des assises nationales. On en a discuté et on a mis en place une commission pour élaborer des mesures pour savoir si nos priorités, c’est, en 2013, qu’il n’y ait plus d’inondation dans la banlieue’, donne-t-il comme exemple. Quand on lui demande la faisabilité d’une telle mesure, il rétorque : ‘C’est possible qu’il n’y ait pas d’inondation. Dans les pays nordiques, dans les pays arabes, ils remblaient la mer pour habiter. Si la technologie peut permettre de remblayer la mer pour y habiter, la technologie peut régler les problèmes de flaques d’eau issus d’eau de pluie. Les moyens technologiques existent, ce qui manque, c’est la volonté politique et l’allocation des ressources. Si on avait mis les 300 milliards investis dans la corniche, les 200 milliards et quelques milliards qu’on met à l’aéroport Blaise Diagne – ce n’est pas une priorité, car l’aéroport de Nice qui a, à peu près la même superficie, a dix fois plus de trafic que l’aéroport de Dakar – il n’y aurait plus d’inondations. (…)’.
Ousmane Tanor Dieng dit qu’il est conscient que pour battre Abdoulaye Wade en 2012, il faut ‘être ensemble’. ‘Nous avons un adversaire commun : c’est Abdoulaye Wade et il faut le faire partir. Et la meilleure manière de le faire partir, c’est d’avoir un candidat unique. Et nous travaillons pour avoir ce candidat unique’, soutient-il. Conscient qu’un seul parti ne peut gagner les élections au Sénégal. ‘Je le sais. Si cela ne dépendait que de moi, le Ps serait le seul parti qui pourrait gagner les élections. Mais ce n’est pas possible. Ce qui est valable pour le Ps est valable pour les autres partis. Parce que nous avons quand même un parti qui a 60 ans et qui est implanté dans l’ensemble du pays. C’est ça la réalité aussi’, indique le patron des socialistes qui se réfère toujours sur les élections locales de mars 2009 à l’issue desquelles la plupart de grandes villes du pays ont été remportées par la coalition Bennoo.
‘Ousmane Ngom est l’instrument de l’immense fraude électorale de 2007’
La coalition, qui a porté Wade au pouvoir en 2000, sert toujours de leçon aux socialistes qui ne veulent pas tomber dans les travers de celle-ci. ‘L’urgence, c’est qu’Abdoulaye Wade parte. Et cela n’est possible que si nous sommes ensemble. Mais pour être ensemble, il faut le faire sur des bases claires. C’est pourquoi, nous avons commencé par un séminaire. On aura aussi un code de conduite pour être d’accord sur la manière dont nous allons gérer ensemble. Parce que quand on se bat ensemble, quand on gagne ensemble, on doit gérer ensemble. Il faut un code de conduite pour ça. Et ce code de conduite sera un pacte qui sera connu aux plans national et international et l’opinion servira d’arbitrage. Voilà le programme pour aboutir à la dernière étape qui est l’examen des alliances stratégiques. C’est-à-dire la question de la candidature’, déroule Ousmane Tanor Dieng. Pour qui le code de conduite servira d’arbitre pour la coalition et il sera porté à la connaissance de l’opinion nationale et internationale.
C’est quand tous ces préalables auront été réglés qu’il faudra penser aux alliances stratégiques. ‘Etant d’accord sur tout ça, c’est en ce moment qu’on dira : quel est le meilleur d’entre nous qui va défendre nos couleurs ? Mais tout en nous disant qu’il n’y a pas de messie’, fait-il savoir. Car il estime que c’est une équipe qui doit être formé pour gérer en cas de victoire en 2012. Estimant que ‘c’est la seule manière de pouvoir s’en sortir et non pas les individus pris isolément quelles que soient leurs qualités, leurs expériences’. Le pays étant ‘en danger’, il a appelé ‘toutes les forces républicaines politiques, démocratiques, sociales à se mettre en ordre de bataille pour aller à l’assaut du pouvoir d’Adoulaye Wade qui ne le lâchera pas comme ça’. Et il brandit comme preuve le retour d’Ousmane Ngom au ministère de l’Intérieur. ‘Le retour d’Ousmane Ngom est suffisamment éloquent parce qu’en 2007, c’est lui qui était l’âme, l’instrument de l’énorme fraude électorale. C’est ça la vérité. Le remettre c’est un signal qu’on nous envoie. Qu’on perçoit le signal comme ce qu’il faut faire’, avertit le premier des socialistes. Et pour montrer sa bonne foi sur l’utilité de l’unité de la coalition de Bennoo, Ousmane Tanor Dieng lance à ses camarades : ‘Je demande aux socialistes de ne rien faire qui puisse entraver l’unité et la coalition de Bennoo pour le départ de Wade. Il n’y a pas de double langage à mon niveau. Les choses sont claires’.
Avant de quitter ses camarades, il a tenu à rappeler l’utilité des visites de proximité. Pour lui, il s’agit de venir recueillir les différents points de vue et les problèmes rencontrés par les Sénégalais de France, notamment ceux qui habitent les foyers. Les contrecoups de cette démocratie participative, ce sont les critiques parfois acerbes contre le Parti socialiste qui, selon certains, n’a pas ‘changé’, est ‘mort’ et ne pourra plus se relever. Ousmane Tanor Dieng a expliqué comment le Ps a changé et a fait valoir l’expérience de ses leaders dans le pouvoir comme dans l’opposition qui peuvent être bénéfiques pour le pays. A toutes ces critiques, le Secrétaire général du Parti socialiste a répondu avec philosophie : ‘Nous sommes venus pour que vous nous disiez ce que vous pensez, que ça nous plaise ou que ça ne nous plaise pas. C’est ce que vous pensez qui est important. La démocratie, c’est ça aussi. C’est l’expression de positions divergentes, de positions opposantes, des positions différentes. C’est dans la confrontation des idées que l’on renforce et consolide la démocratie’, fait-il remarquer en disant qu’il est là en tant Secrétaire général du Ps, mais aussi en tant que leader de Bennoo représentant Moustapha Niasse, Macky Sall, Abdoulaye Bathily et tous les autres leaders.
Walf Fadjri