Le port de perruques aux cheveux naturels est devenu une tendance très en vogue chez les Séngalaises. Cette nouvelle forme de coiffure alimente les débats aussi bien chez les femmes que chez les hommes. Question de goûts et de coûts. Nous avons tâté l’ambiance dans la capitale sénégalaise.
Très en vogue ces temps-ci, les cheveux naturels sont actuellement sujet à discussions. Pour être à la mode ou au diapason, certaines filles pensent qu’il faut impérativement mettre les cheveux naturels. Par contre, pour d’autres, il est impensable de s’imposer de lourdes dépenses juste pour se faire belle.
«Je ne peux pas imaginer une fête de Tabaski ou de Noël sans cheveux naturels », estime la jeune Salimata Diop. Admettant que la touffe est chère car avoisinant les 150.000 F Cfa, elle soutient qu’il faut, parfois, savoir se faire belle et se faire plaisir. « La beauté d’une femme, c’est à tout prix. Les gens ont l’habitude de dire que la santé n’a pas de prix mais, je dirai, tout simplement, que la beauté non plus. Même son de cloche chez Alimatou Sakho. Rencontrée à Dieuppeul, elle confie qu’elle aime bien mettre les cheveux naturels. « J’ai séjourné au Etats-Unis et c’est de là que j’ai pris l’habitude de les porter. Mon mari a toujours eu la gentillesse de me les payer », dit-elle. Toutefois, Alimatou est contre les filles qui s’endettent ou qui trompent des hommes pour se payer des cheveux naturels.
Henriette Fall, habitante de la cité Baobab, renchérit : « Je les vends et je les porte. C’est mon frère qui, depuis les Etats-Unis, me les envoie. Certes, les cheveux naturels sont chers mais, je les trouve jolis. Ils peuvent aussi durer s’ils sont bien entretenus », confie-t-elle avant d’insister sur le fait qu’« il faut avoir les moyens de les payer et ne pas se tracasser pour s’en procurer. Je sais que ce n’est pas le cas de toutes les filles ».
Goûts et coûts…
Si pour ces filles les cheveux naturels s’obtienent facilement, pour d’autres, par contre, le fait de les mettre est le dernier de leurs soucis.
Pour ces dernières, c’est inimaginable de dépenser, pour une coiffure, la valeur de 200.000 F Cfa voire 400.000 F Cfa.
C’est le cas de Fatma Sy qui indique qu’elle ne mettra jamais ces cheveux sur sa tête. « La preuve, je porte souvent des dreadlocks. Je déteste ces cheveux car ils ne sont pas du tout naturels », dit-elle. D’ailleurs, Fatima trouve insensé de mettre une coiffure aussi chère alors qu’il y a de belles tresses de chez nous. Rencontrée dans un salon à la Sicap Liberté 4, la jeune dame, trentenaire, confie qu’elle ne porte pas de cheveux naturels. « Ils ne m’enchante guère. Je préfère les greffages synthétiques. En plus de la cherté de la touffe, il te faut du temps pour les mettre et les entretenir », souligne-t-elle. Khoudia Tall, habitante de Castor, fait valoir une autre explication : « Je n’ai jamais porté de cheveux naturels et en tant que musulmane, je n’ose même pas en mettre. Les mèches synthétiques sont interdites par notre religion à plus forte raison les cheveux qui proviennent d’êtres humains. J’ai entendu dire que les cheveux naturels peuvent être même à l’origine de certains cancers », explique-t-elle.
Aujourd’hui, le grand débat qui tourne autour des cheveux naturels ne laisse pas indifférents les hommes. Ils sont souvent indexés comme étant les principaux bailleurs des filles qui se permettent de se payer une coiffure aussi chère.
Agent dans une boîte de nuit au Point E, Pape Amadou Thiam dit ne pas admettre que des hommes qui ne sont pas en mesure de subvenir à des besoins familiaux se permettent de payer, pour des filles, des cheveux naturels à 300.000 F Cfa. « A la limite, je peux comprendre qu’on offre de l’argent quand on a les moyens », dit-il. Revenant sur les cheveux naturels, il juge que la plupart des filles les mettent non pas pour être coquette, mais, comme un outil de travail. « Lorsqu’un homme veut faire la cour à une fille qui porte des cheveux naturels, il faut qu’il s’attende à ce qu’elle lui demande, tout le temps, de lui remettre de fortes sommes d’argent car ce qu’elle porte comme coiffure coûte cher », fait comprendre Amadou thiam.
Il conseille aux filles adeptes de ces cheveux de revenir sur terre. « Il faut arrêter de mettre des cheveux naturels. Cela ne permet pas d’avoir un mari. Remettez tout entre les mains de Dieu et soyez pudiques », ajoute-t-il.
Rencontré à Dieuppeul 3, Ibrahima Gueye pense, pour sa part, qu’il faut être fière de la race noire à laquelle nous appartenons et ne pas trop imiter les Blancs en achetant des cheveux importés d’Europe ou des Etats-Unis. « J’avoue, en toute franchise, que je n’achèterai pas de cheveux naturels pour ma femme à plus forte raison ma copine », assure Ibrahima. Son avis est partagé par Saliou Samb. « Je ne payerai jamais des cheveux naturels pour une fille car j’ai d’autres priorités, lance-t-il. J’aurai même préféré la financer pour qu’elle fasse de petits commerces plutôt que de dépenser toute cette somme pour des cheveux ».
Il insiste sur l’aspect négatif de cette coiffure que les filles ignorent. Saliou Samb pense qu’en mettant les cheveux les filles s’exposent aussi aux agresseurs qui n’hésitent pas à les couper pour les revendre. Dans ce lot d’hommes qui ne sont pas disposé à payer des cheveux naturels aussi bien pour leurs épouses que pour leurs copines, Cheikhou Tall fait l’exception. Il confie qu’il est prêt à tout faire pour sa femme. « Si elle veut des cheveux naturels, je lui ferai ce plaisir. Je trouve qu’il faut toujours honorer sa femme », argue-t-il, le sourire aux lèvres. Question de goûts et de coûts, le débat reste ouvert…