Très tôt ce dimanche, 27 juin, jour historique du scrutin présidentiel, les habitants de la commune de Kaloum, à l’instar de ceux d’autres endroits, ont pris d’assaut les différents bureaux de vote de leur one géographique afin d’accomplir leur devoir civique. Il est 9 heures et demi. Nous voilà au collège 1 de Boulbinet où sont installés trois bureaux de vote distincts qui sont : bureaux No 011, 012, 013. Dans le calme et la sérénité, les électeurs ont formé une longue file derrière leurs bureaux de vote respectifs. Dans cette ambiance bon-enfant qui régnait sur les lieux, deux officiers militaires entrent et viennent annoncer au président du bureau de vote 012 que c’est dans ce bureau que le président de la République par intérim, le général de brigade Sékouba doit voter. Et par conséquent, le président du bureau N0 012 doit accepter le transfert provisoire dudit bureau avec tout son personnel pour le palais Sékoutoureya, histoire de permettre au président de s’acquitter de son devoir civique. Le président du bureau de vote qui ne pouvait rechigner à l’injonction des officiers, accède au principe du transfert. Informés de cette décision, les délégués des 9 partis politiques ainsi que la longue file d’électeurs qui attendaient leur tour de vote, ont vivement manifesté leur désaccord. Après un bref exercice de persuasion vainement tenté par les militaires, l’urne sera finalement transportée pour le palais Sèkhoutoureya, situé à moins de 10 minutes. Ils seront suivis par la suite par tout le démembrement de la CENI, l’ensemble des représentants des partis politiques qui y étaient présents. Pendant ce temps, les électeurs, impuissants, exprimaient leur furie et leur mécontentement par des cris de protestation. ‘’ Ce n’est pas normal ce que vous faites. Nous n’avons jamais vu ça, transférer une urne en pleine opération de vote d’un lieu à un autre. Ce n’est vraiment pas de la transparence cela. Pourquoi ne pouvez-vous pas venir ici pour voter comme tout le monde ’’, s’est indigné un jeune électeur. ‘’Pourtant, il a été annoncé par le chef d’état major que l’Armée devait voter le samedi 26 juin pour éviter que les militaires créent la confusion pendant ce vote. Et Voilà !…’’, rétorque un autre jeune d’à peu près de la même tranche d’âge. Arrivée à Sekhoutoureya, l’urne sera installée dans l’imposante salle de conférence du palais sous les regards des différents délégués et autres membres de la CENI. La secrétaire générale de la commune de Kaloum qui était un des superviseurs de l’administration demande si tout ce qu’il faut pour garantir la transparence du vote est réuni. Après s’être rassurée que tout est effectif sur place, sous la supervision des membres de la CENI et des 9 délégués de partis politiques, la secrétaire générale a indiqué que le vote pouvait se poursuivre par dérogation pour les éléments de la garde présidentielle qui étaient de service en attendant l’arrivée du général Sékouba Konaté. Cette option va se heurter au refus des délégués de partis politiques. Le président du bureau de vote ira chercher son code électoral pour leur indiquer le passage autorisant le vote par dérogation. Après avoir été mis sur les mêmes longueurs d’onde, les différents membres du bureau ont finalement permis le vote des éléments de la protection présidentielle. Interrogé sur les raisons de cette délocalisation de l’urne du bureau numéro 012, le Président de la CENI a développé les arguments qui sont les suivants : ‘’On aurait souhaité que le président vote sur place dans ce bureau de vote. Mais le président avec toute sa garde rapprochée, on ne peut pas les envoyer dans le quartier. Sinon, cela pourrait démobiliser le quartier. Quand tout le monde est en uniforme militaire, ça pourrait effrayer, intimider l’ensemble du quartier. On préfère que le président et sa garde rapprochée votent ici au palais Sèkhoutoureya. Dès qu’ils auront fini, dans une heure de temps, ils vont retourner à Boulbinet pour poursuivre leur vote. Quitte à reculer légèrement les horaires pour Boulbinet pour que tout le monde puisse voter là bas.’’, justifiera Ben Sékou Sylla. Si, en mi-journée, le président de la CENI se réjouissait du déroulement globalement satisfaisant du scrutin présidentiel de ce dimanche, 27 juin, faut-il indiquer que ce fait insolite et particulièrement controversé survenu au Collège 1 de Boulbinet, a suscité de vives tensions et contestations ce matin qui auraient failli complètement entacher la crédibilité et la transparence des votes effectués dans ce bureau transféré. Pour nombre d’observateurs, rien ne peut justifier le transfert de ce bureau de son lieu initial pour le palais de Sèkhoutoureya. Selon eux, le général Sékouba devait accepter de voter au même endroit que tous les citoyens inscrits sur la liste de ce bureau. Car, soutiennent-ils, feu général Lansana Conté, malade et pratiquement ‘’paralytique’’ a effectué le déplacement pour accomplir son vote en 2003 à bord de sa voiture de commandement. Une image qui a été, à l’époque reprise en boucle par toutes les chaînes de télévisions du monde. | |
Amara Moro Camara |
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