La présidence de la République, selon des sources généralement bien informées, s’est soustraite du contrôle à priori de la Direction centrale des marchés publics (Dcmp) et de celui à posteriori de l’Agence de régulation des marchés publics (Armp). Le chef de l’Etat aurait signé récemment, un décret mettant hors du champ de compétence de ces structures de contrôle et de régulation des marchés publics, ou à tout le moins une dérogation à ses services, ses services rattachés et agences logées au palais. Désormais, au Palais, « l’appel d’offres n’est plus la règle », se désolent plusieurs observateurs.
(Re)bonjour, le gré à gré à la pelle ! Bienvenue aux marchés à la tête du client ou à l’importance de sa « générosité », doit-on se dire désormais à la présidence de la République qui se serait, selon des sources généralement bien informées, soustraite du champ de compétence de la Direction centrale des marchés publics (Dcmp) et de l’Agence de régulation des marchés publics (Armp). Selon les mêmes sources, le chef de l’Etat aurait récemment signé « après plusieurs hésitations cependant », confient-elles un décret dispensant ses services, services rattachés et agences logées au Palais, (Dieu sait qu’elles sont nombreuses !) du contrôle à priori de la Dcmp et à posteriori de l’Armp pour tout ce qui concerne la passation de marchés publics ou à tout le moins leur offrant dérogation à ce niveau.
Une situation qui si elle venait à se confirmer porterait selon plusieurs observateurs interpellés, une atteinte grave à la « seule révolution » de l’alternance réalisée avec l’assentiment et le soutien de tous : le Code des marchés publics avec ses structures opératoires que sont la Dcmp et l’Armp. Si le décret dont on a entendu « parler » ici et là, venait à prendre effet, ni la Dcmp encore moins l’Armp n’auront plus à s’occuper des marchés de la présidence de la République.
L’Armp qui, forte de sa mission de régulation du système de passation des marchés publics et des conventions de délégation de services publics joue les gendarmes de la transparence et de la régularité au point d’en séduire plus d’un et d’avoir l’estime grandissante des masses populaires qui voient en elle, le gardien de leurs pauvres deniers, ne pourra plus approuver ou désapprouver un marché du palais. Un coup dur au modèle sénégalais si envié, qui commençait même à faire tâche d’huile dans la sous région.
Si la dispense ou dérogation présidentielle se confirmait, le chef de l’Etat aura suscité « une zone de non droit » dans la gestion des commandes publiques, entraînant forcément une gouvernance préjudiciable au pays, se désole-t-on dans les milieux préoccupés par les questions de gouvernance et de transparence dans la gestion des deniers publics. On y fait remarquer que pendant « qu’on oblige les petits ministères à se conformer à la réglementation ou à se laisser épinglés par l’Armp, on s’offre à la présidence de la République dérogation pour passer les marchés qu’on veut et dans les conditions qu’on veut ». Ce qui crée une réglementation à géométrie variable à leurs yeux et une violation même de la constitution de janvier 2001 du Sénégal, où « la transparence dans la gestion et la bonne gouvernance » sont bien inscrites. En tous les cas, un coup d’arrêt à l’exemple sénégalais dans ce domaine.
Quand on sait par ailleurs que la valeur des marchés publics représente 5% du PIB, on peut imaginer d’ici, le volume qui risque d’être distrait du contrôle avec une présidence de la République qui, malgré le sévère réquisitoire en 2000 contre les prédécesseurs, est devenu aujourd’hui plus qu’hier, le siège des structures de gestion opérationnelle de l’économie nationale. Avec ses multiples agences et services, qui échappent à toute législation, laissant la désagréable impression d’un immense Bazar où la tontine des imams, la valse des valises (celle de Ségura entre autres) et autres billevesées peuvent se passer sans déranger personne, la présidence de la République semble inviter l’Etat et ses démembrements à la mal gouvernance assurément. On s’attendait pourtant à l’inverse à l’avènement du régime issu des urnes de mars 2000.
Pendant que l’on soustrait le palais tranquillement de toute surveillance sur les passations de marchés publics, secteur porteur de toutes les suspicions de corruption et de concussion, on instruit son Garde des sceaux pour une information sur les délibérations d’autres élus, ceux de la Commune de Dakar également plébiscités par le même suffrage universel du peuple, le seul dépositaire du pouvoir en République.
sudonline.sn