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Trois ans à la tête de l’Etat, quel bilan de la démocratie sénégalaise sous Macky Sall ? (Par Adama SADIO ADO)

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Le Sénégal, une vieille démocratie
Ce tableau d’honneur, le Sénégal le doit à la conjugaison de plusieurs dynamiques. Le Sénégal a une riche et longue culture électorale (1848) et une forte tradition démocratique. Il est le premier pays d’Afrique subsaharienne à connaitre le bicéphalisme (1969), le multipartisme (depuis 1974) et l’élection pluraliste (depuis 1978) y sont une réalité. Ce pays, qui n’a jamais connu de coups d’Etat, a réalisé deux alternances démocratiques. Il est vrai que l’histoire politique du Sénégal postcolonial est jalonnée de faits susceptibles de ternir l’image de marque de sa démocratie. Mais force est de constater que chacun des trois prédécesseurs du président Macky Sall a eu à apporter sa contribution à faire du Sénégal une des « puissances démocratiques » du continent africain.
La consolidation de la démocratie sénégalaise fut l’une des fortes aspirations du peuple en portant Macky Sall à la présidence de la République. A mi-mandat, le bilan démocratique du Sénégal sous Macky Sall pouvait être plus reluisant.
Va-t-on vers une crise politique ?
Depuis 2012, l’opposition est systématiquement ignorée par le président Macky Sall. Ce manque de dialogue politique fait du Sénégal une démocratie plus d’affrontement que de consensus. L’arène politique se transforme en un véritable « ring » où les contradictions se règlent par des forcings, invectives, menaces, emprisonnements, etc.

Le renforcement de la stabilité politique exige un dialogue entre les acteurs politiques. Malheureusement, certains assimilent toujours dialogue politique à l’instauration d’un gouvernement d’union nationale (qui ressemble à un partage du gâteau) ou à un « deal » politique. Le dialogue politique permet plutôt aux acteurs politiques d’avoir des convergences fortes sur des questions supra partisanes. L’institution du statut du Chef de l’opposition tel que prévu par la Constitution de 2001 et proposée par la Commission nationale de réforme des institutions participera à instaurer le dialogue politique.
Apparemment les armes non conventionnelles semblent être bonnes pour le chef de l’Etat en vue de réaliser sa volonté de « réduire l’opposition à sa plus simple expression ». Les différentes initiatives du parti Rewmi et, aujourd’hui, du front de l’opposition significative de former un groupe parlementaire ont toutes connu un échec. Il est très difficile de ne pas y voir un coup de Jarnac du régime. La modification du règlement intérieur de l’Assemblée nationale le 30 juin 2015 portant le nombre de députés exigés pour former un groupe parlementaire de 10 à 15 et interdisant tout député démissionnaire de son groupe de rejoindre un autre déconsolide la démocratie sénégalaise. L’encouragement de la transhumance politique par le Président de la République anéantit la moralisation de la vie politique, principale motivation de ladite modification à en croire à la majorité parlementaire.
Libertés individuelles menacées ?
Le renforcement des libertés individuelles par le régime laisse encore à désirer. Depuis 2012, plus d’une vingtaine d’opposants ont séjourné en prison pour divers délits dont l’atteinte à la sûreté de l’Etat et offense au chef de l’Etat, délit abrogé par de nombreux Etats africains dont le Zimbabwe et le Madagascar. Le mi-mandat du président Sall est aussi fortement marqué par l’emprisonnement « arbitraire » (avis n° 04-2015 du groupe de travail de l’ONU) de Karim Wade par une juridiction d’exception, la CREI. La non-conformité de la CREI à l’évolution des droits humains est reconnue par le Président. A cela s’ajoute l’interdiction de sortie du territoire de certains barons de l’ancien régime. En dehors de Madické Niang, cette interdiction est toujours maintenue malgré son « illégalité » (arrêt de la Cour de justice de la CEDEAO du 22 février 2013).
« Immunité médiatique et de la société civile »?
Le pluralisme médiatique au Sénégal a toujours été accompagné par l’existence de média faisant office de sentinelles de la démocratie. Depuis son élection, le Président bénéficie d’une « immunité médiatique » d’une bonne partie de la presse au point que des média jadis très critiques à l’égard du pouvoir politique soient caricaturés aujourd’hui, à tort ou à raison, de « presse du palais ». A la faveur de la seconde alternance, bien des acteurs de la société civile ont soit rejoint la mouvance présidentielle soit s’abstiennent de toute critique contre le régime. Cette tentative d’instaurer de fait une vision unique est rendue possible par l’accointance entre le régime et des propriétaires de groupes de presse.
L’image de marque de la démocratie sénégalaise est à rechercher moins dans le génie du leadership politique que dans la maturité démocratique du peuple. La marche vers la liberté étant irréversible, espérons que le président Macky Sall saura accompagner ce grand peuple à relever d’autres défis dans sa marche vers la LIBERTE.
Adama SADIO ADO
Chercheur en Sciences Politiques
[email protected]

4 Commentaires

  1. LE SÉNÉGAL N’EST PAS UNE VÉRITABLE DÉMOCRATIE !!! Oui, le Sénégal n’est pas une véritable démocratie puisque notre Constitution interdit la formation de partis politiques se réclamant d’une confession (religion), tels les partis ‘’démocrates-chrétiens’’ observés dans les ‘’grandes démocraties’’ ; il s’agit-la d’une violation manifeste de la liberté d’opinion qui est le premier pilier des droits de l’Homme. Et à l’évidence, ne sera jamais une véritable démocratie tant que les dispositions restrictives imposant la laïcité ne seront pas abrogées. Oui, la laïcité ne se décrète pas ; c’est une question de rapport de forces – Que les démocrates le reconnaissent !!! En vérité, l’attachement indéfectible de notre pays aux valeurs de démocratie et de justice devrait nous imposer à mentionner explicitement dans notre constitution notre ancrage irréversible aux valeurs de l’Islam, la religion majoritaire. Oui, si nous n’étions pas hypocrites, nous l’aurions mentionné explicitement et imposé à nos élus la prestation d’un serment devant le Coran (ou la Bible pour les chrétiens, comme cela se fait aux États-Unis) – un gage de bonne gouvernance irremplaçable ; et nous aurions toujours recherché la conformité de nos lois aux principes de l’Islam qui, du reste, ne sont guère différents de ceux des autres religions monothéistes (Christianisme, Judaïsme). Ainsi, nous ne serions plus interpellés par les occidentaux sur l’opportunité d’une dépénalisation de l’homosexualité et de l’interruption volontaire de grossesse (IVG) ; la prostitution serait pénalisée et tous les lieux de débauche fermés – quand ont sait les conséquences redoutables de la généralisation de la turpitude freineront toutes nos velléités de développement. Malheureusement, nos hommes politiques ont délibérément opté d’ignorer Dieu dans leurs démarches ; ils ne croient qu’à leur expertise (raison), quoique se réclamant croyants (musulmans ou chrétiens) ; oui, ils ont mis ‘’Dieu entre parenthèses’’ et ont délibérément choisi les libres-penseurs (agnostiques et autres incrédules), comme guides, modèles et maîtres à penser. Comment pourraient-ils donc agencer une cité juste et nous faire accéder à l’émergence véritable ?

  2. Comme disait le Pr Ismaila Madior Fall en 2011 lors d’un séminaire à Dakar, la démocratie sénégalaise est une démocratie conflictuelle ». Partageant cet avis, j’ajoute qu’il y a un désir implacable du pouvoir de museler l’opposition politique pour obtenir un second mandat. Une bonne démocratie en marche à besoin d’une opposition démocratique forte. Ce qui n’est pas le cas pendant ces trois dernières années. Une société civile absente, le principal parti d’opposition harcelé par le pouvoir en place, tout cela au détriment du peuple qui est le grand perdant. Tout ça pour ça.

    • c’est une perte de temps au lieu de travailler.
      les sénégalais ne sont pas dupes. ils ne peuvent museler l’opposition car leur manque de plateforme a l’AN ne fera que doper leurs opportunites mediatiques dans la presse sensationnelle.
      c’est plutôt une reaction imbecile pour l’accès aux privileges de ceux qu’ils pensent leur seront favorables et porter une méchante estrade revancharde. En tout cas, le Senegal n’y gagne rien et ils auront tout a perdre.
      On ne se rappelle que de l’arrogance de A.R Agne, l’imbicilite de Doudou Wade et ils sont aux oubliettes pour le reste du pays. La roue de l’histoire écrasera M Diakhate aussi.
      La caste de politiciens nous tiens bien en otages, malheureusement.

      Xalasss!

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