La grève de 48 h des transporteurs est une sérieuse alerte adressée précisément au président Macky Sall. Cette grève a révélé non seulement le dysfonctionnement incontestable dans le secteur des transports, mais aussi l’inorganisation, l’archaïsme, l’insuffisance de dotation du parc en véhicules modernes et l’absence de diversification des modes de transport au Sénégal. Elle a surtout mis à nu un secteur du transport public obsolète, insuffisant, inorganisé et fragile pour être apte à
faire face valablement à des cas de grève de ce genre. La grève a réussi totalement parce le mécontentement est à son paroxysme et intenable. Il est évident pour tout le monde qu’une grande ville et, une capitale comme Dakar ne peut plus se suffire aujourd’hui d’un seul mode de transport routier. Et cela, le président Macky Sall devrait être le premier à le savoir. Et surtout encore que celui-ci est en outre largement dominé par les transporteurs privés. Soulignons au passage, comme le
dit l’adage : « gouverner, c’est prévoir. » Mais, hélas !
La grève des travailleurs du transport est bien justifiée raison pour laquelle elle a été, à juste titre, largement suivie et, a bien réussi aussi. Hé oui, le gouvernement observe depuis longtemps ces anomalies dans le secteur des transports sans aucune réaction pour y mettre de l’ordre et fin, en rétablissant les travailleurs du secteur transport dans leurs droits légitimes conformément à la législation et au code du travail en vigueur. Effectivement, les travailleurs du transport sont victimes
d’une exploitation à fond par leurs employeurs, informels et usuriers. Oui, parce que ces derniers n’appliquent ni ne respectent pas la législation du travail envers leurs employés. Mais, est-ce que d’ailleurs, il existe en ce moment au Sénégal une législation du travail que les tous employeurs notamment sénégalais appliquent strictement à l’égard de leurs employés? Non, absolument pas. D’autre part, les tracasseries que les conducteurs en tout genre, mais surtout les transports en
commun et les routiers, subissent de la part des agents de la circulation ne reposent sur aucune base légale, si ce n’est plutôt de la rakette et d’abus de pouvoir pure et simple.
Mais il est bien regrettable que sous les cieux du Sénégal d’aujourd’hui, nos gouvernants méconnaissent, le principe directeur, « gouverner, c’est prévoir », et ainsi ils ne fonctionnent qu’en informel. Ce qui dénote et justifie cette anarchie largement présente partout au Sénégal et dans laquelle nous vivons au jour le jour (jono joni) avec leurs erreurs inévitables. Ainsi, il y a bien lieu de se demander, quelques fois, si au Sénégal ceux qui nous gouvernent savent ce que veulent dire :
planification et prévision, des catégories qui aident des dirigeants en l’occurrence, gouvernants à se projeter dans le futur pour savoir.
Le Sénégal et la Côte d’Ivoire étaient, en 1960, deux colonies à peu près au même niveau de développement. Mais la Côte d’Ivoire, sur le plan des infrastructures en tout genre, malgré la guerre civile dans son pays qui a occasionné des dégâts importants, comme la destruction d’infrastructures et de catastrophes humanitaires. Elle a pu réparer ses blessures subies et parvenir à dépasser le Sénégal de loin au plan infrastructurel, notamment en transport routier, ferroviaire et souterrain (le
métro d’Abidjan est en cours et, son démarrage est prévu en 2024). Et en plus de cela, la Côte d’Ivoire dispose d’un vaste réseau routier moderne et dense. Lorsque dans le même temps, le Sénégal ne dispose même pas d’une régie nationale de chemins de fer, à plus forte raison d’un métro.
Alors que le réseau routier du Sénégal est loin de la modernité et la fonctionnalité à la satisfaction des usagers. Il ne couvre pas non plus l’ensemble du territoire national en routes bitumées. Et il faut noter surtout, cette concentration excessive d’une partie du pays à Dakar. Les populations étouffent à Dakar et n’arrivent même plus à respirer à cause d’un surpeuplement de personnes, de véhicules et autres dans une superficie si exiguë comme celle de Dakar qui n’est plus
en mesure de contenir tout ce monde dans des conditions acceptables de vie normale. Mais, hélas ! Malgré cette situation déplorable et invivable, le gouvernement n’a pas envisagé ni dans le court ni dans le moyen et moins encore le long terme, une solution radicale durable pour faire face à cette problématique. Non, au contraire il laisse, pour le moment, la situation du transport public pourrir, comme le montre le décor affligeant que nous constatons tous les jours dans la circulation des rues de Dakar et routes des régions. Personne ne peut contester que circuler dans Dakar aujourd’hui est devenu un vrai calvaire, comme disent les militaires un vrai parcours du combattant. Et tant pis pour les populations semble dire le gouvernement. C’est irresponsable et criminel !
Sans l’ombre d’aucun doute, la faute de cette situation déplorable toute proche de la catastrophe, dans le transport, incombe entièrement aux gouvernants d’hier à aujourd’hui. En effet, Abdou Diouf, Abdoulaye Wade et Macky Sall n’ont en vérité fait que du surplace. C’est comme, si ces derniers avaient signé un pacte secret avec l’anti-progrès et l’immobilisme pendant leur magistère.
Et, c’est cela qui a causé notre retard dans plusieurs domaines d’activité en l’occurrence, dans le transport. Et nous le constatons bien, notre parc automobile actuel de transport public privé n’a subi aucun renouvellement significatif et sérieux sur le plan de la modernité depuis des décennies comme le prouve incontestablement la présence des cars rapides centenaires, encore en circulation. Nous avons en grande partie dans ce secteur, des carcasses de véhicules ou des cercueils roulants dont la plupart, leur place logiquement n’est nulle part ailleurs qu’à la casse.
Ce décor affligeant de tacots servant de transport de personnes, en ce 2021, devrait être une honte pour tous les gouvernements qui se sont succédé à la tête du Sénégal, pour n’avoir pas doté ce secteur du transport public de véhicules modernes répondant à notre époque. En vérité ces derniers n’ont rien fait de positif dans ce secteur qu’ils ont abandonné et la présence des cars rapides en circulation le prouve parfaitement.
En tout cas, cette grève semble être un réveil syndical ou d’un syndicat. Il est heureux qu’elle n’ait pas fait l’objet d’une récupération politique pour le moment. Effectivement, cela fait longtemps que nous n’avions pas assisté au Sénégal à une grève aussi réussie dans le calme et la sérénité. Est-ce peut-être parce qu’elle n’est pas politisée, mais simplement corporatiste.
Mandiaye Gaye
Mandiaye [email protected]