«Au-delà du maintien de la paix, la gestion des conflits s’impose»
Ce n’est certes pas facile de parler de soi ou plutôt de sa corporation, si c’est pour lui reconnaître ses limites. Pourtant, le capitaine Mamadou Birane Wane s’y est essayé en produisant une thèse sur le rôle des Armées, avec quelques exemples à l’appui. Dans cette production intellectuelle, M. Wane monte un argumentaire pour expliquer l’échec des missions de maintien de la paix et par la même occasion propose une alternative, qui n’est autre que la gestion des conflits.
Par Diacounda SENE
Qui parle de l’Afrique fait mention de sa pauvreté, mais aussi des conflits meurtriers et dévastateurs qui la minent. Dans ces situations, tout fils de ce continent soucieux de son avenir devrait réfléchir sur les solutions. Et en tant que militaire, juriste, et étudiant en étude et pratique des relations internationales, le capitaine des sapeurs-pompiers Mamadou Birane Wane, n’a pas attendu pour jouer sa partition. Fidel à sa réputation d’homme de tenue, il cherchait à savoir ce que les instruments juridiques internationaux, à travers les Nations unies ont consacré pour réglementer les conflits. A cet effet, il a mené une large réflexion qu’il a confinée dans une thèse intitulée : Rôle des Armées dans la gestion des conflits, quels exemples en Afrique ? Cet officier du Groupement national des sapeurs-pompiers, aujourd’hui détaché à la Direction de la justice militaire, qui est placée sous la conduite de la Gendarmerie, retrace l’historique des interventions des Armées dans les conflits africains, tout en ouvrant des perspectives.
La détermination de cet homme de tenue à apporter un nouveau souffle par sa réflexion sur la démarche des Armées dans le règlement des conflits n’a jamais été perturbée, malgré les exigences de son métier, qui souvent l’ont éloigné des amphithéâtres pendant des années. A 50 ans, celui qui s’est enrôlé dans l’Armée sénégalaise en 1974, revient à la charge pour présenter son travail.
14 PAYS AFRICAINS TOUCHES PAR DES GUERRES SOUVENT INTERETATIQUES
Dans la première partie de ce document de 59 pages, le capitaine Wane évoque la démarche des Armées visant à prévenir les conflits et leurs limites. Selon lui, sur les 53 pays que compte le continent africain, les 14 sont plus ou moins touchés par des guerres qui sont souvent interétatiques. Malheureusement constate le capitaine, «toutes les opérations de prévention des conflits entamées ont échoué». Et si on l’en croit, il en serait de même pour les opérations de maintien de la paix. A titre d’exemple, le détaché à la Direction de la justice militaire a cité dans sa production le cas des pays tels que la Somalie et le Rwanda. Selon lui, les Missions des Nations unies pour le maintien de la paix dans ces zones n’ont pas été à la hauteur des attentes. A preuve, rappelle-t-il, le Général belge Roméo Dallaire, qui assurait le commandement de la Mission des Nations unies au Rwanda (Mitoir) n’avait pu cacher son indignation fasse à l’impuissance de ses troupes. Il affirmait ainsi : «En tant qu’être humain, je suis scandalisé par le fait que la Mission (Mitoir) ait été à tel point marginalisée qu’elle n’ait pu empêcher les atrocités commises tant à l’égard des forces de maintien de la paix qu’à l’égard des millions de Rwandais.» Après ces crises qu’ont connues ces pays, regrette-t-il, le blason des Armées n’a pas été redoré. Ce qui fait qu’il est impératif de revoir la démarche des Armées dans les missions des Nations unies.
Pour avoir été membre de la Force d’urgence des Nations unies en Egypte et pour avoir fait la guerre en Casamance, cet ancien pensionnaire du Prytanée militaire de Saint-Louis fait parler son expérience.
MECANISMES DE CONSOLIDATION DE LA PAIX
Dans la deuxième partie de sa thèse, il élabore une autre stratégie qui vise la gestion des conflits. Détenteur d’une Maîtrise en droit judiciaire en 2005, suivi de plusieurs stages dont un aux Etats-Unis et couronné par un Certificat de droit international sur les conflits armés et la justice militaire, le capitaine Mamadou Birane Wane s’est toujours intéressé au rôle des Armées dans les conflits.
Fort de son parcours, le capitaine Wane estime que l’idée d’une gestion des conflits s’impose pour la consolidation de la paix. Ceci, d’autant plus que les Armées se professionnalisent. Cependant, la consolidation de la paix par cette gestion devrait passer par des mécanismes. La mise en œuvre de la diplomatie, par un déploiement des casques bleus constitue la première étape, de l’avis du juriste. S’en suit l’information afin de connaître les tendances politiques, économiques et sociales.
Autre point non négligeable dans ce processus de gestion des conflits, «le désarmement des mouvements de faction armée, suivi de leur réinsertion». Ce sont ces idéaux qui constituent le travail que ce quinquagénaire, inscrit à la Faculté des sciences juridiques et politiques de l’Ucad a soutenu le lundi 17 mai dernier à l’Université Cheikh Anta Diop Dakar. Espérant avoir abattu un bon travail, le capitaine Mamadou Birane Wane reste optimiste quant à l’appréciation qu’en fera le jury après sa délibération.
Stagiaire
lequotidien.sn