Cherté du loyer
Chercher un abri pour sa famille est le souci de tous les parents. Mais vivre sous le toit d’un autre n’est pas toujours chose facile. Car chaque propriétaire dicte sa loi aux locataires qui subissent souvent sans un mot. Méconnaissance des textes, fuite en avant ou apathie ? Intrusion dans les relations entre immobiliers, bailleurs et demandeurs.
Le problème de la location est un phénomène que vivent les Sénégalais au quotidien. L’offre s’adaptant à la demande, les prix sont jugés trop élevés aujourd’hui. Les chambres et appartements mis en location devenant rares alors que les demandeurs augmentent, certains prennent tout ce qui leur est proposé sans vérifier au préalable leurs droits. Un sujet qui n’est pas souvent maîtrisé par la plupart des locataires.
Ils semblent n’attendre que d’être interpellés pour déballer ce qu’ils avaient sur le cœur. La dame Mariétou Seck loue vit en location avec sa famille depuis plus de 10 ans. Trouvée dans la cour de sa maison à Bopp assise sur un banc, en l’absence du maître des lieux, elle affirme ignorer totalement les textes. « Je ne savais même pas qu’il y avait un code pour les locataires, ni une association pour défendre nos intérêt ». Elle se plaint, bien sûr, de la cherté du loyer. «Le loyer est vraiment très cher, surtout maintenant que tout est devenu hors de prix dans ce pays », dit-elle. Quelques maisons plus loin, un immeuble à 4 étages fissuré, sale et en très mauvais état. Le locataire du premier ne veut pas parler. Il se contentera d’expliquer que le maître des lieux est absent. Une visite au 4ème permet de retrouver une jeune dame du nom d’Aïssatou Bathily qui dit que son mari est absent. Elle aussi ignore l’existence de lois concernant les locataires. Toutefois, elle s’indigne : « l’électricité et l’eau sont payés chers alors que l’on nous approvisionne rarement». Elle explique qu’il n’y a du courant que soit le matin, soit le soir. Quant à l’eau, le propriétaire ouvre le robinet le matin pour leur permettre de faire le plein. « Vers 11 h, il coupe son compteur », dit-elle. A la question de savoir la raison pour laquelle ils supportent cela. Elle soutient que la location est devenue très chère et que c’est le seul lieu à un prix accessible qu’ils ont pu avoir.
L’ignorance des textes défavorise les locataires
Au quartier des Hlm, loge une grande famille Diola. Pauline, qui a ouvert la porte, précise que ce sont tous des travailleurs venus à Dakar et qu’ils sont colocataires. Rares sont ceux qui ont des liens de parenté dans la maison. Elle présente Mariama qui faisait la lessive. Elle ne se plaint pas trop de la location parce qu’ils sont une dizaine de locataires à se cotiser pour payer. « Chacun participe pour la paie», dit-elle. Mais la maison n’est pas approvisionnée en eau. «C’est cela notre unique souci », souligne-t-elle. Le sieur Sèye rencontré dans la rue a quitté Kaolack depuis 6 ans. Il affirme connaître les textes, mais avoue y prêter peu d’attention. « De toute façon, ici c’est le Sénégal. Si tu veux suivre les textes à la lettre, tu risques de te retrouver dans la rue avec ta famille. Je préfère subir des injustices et vivre tranquille avec ma famille», dit-il. Le président de l’Association des consommateurs du Sénégal «(Ascosen), Momar Ndao et son homologue de l’Association de défense des locataires (Adels) Elimane Sall, ainsi que les responsables d’agences immobilières, mais aussi de nombreux locataires sont d’accord sur un fait : les textes sont méconnus.
M. Ndao pense que le plus gros problème, c’est que les locataires méconnaissent leurs droits. Et que cette ignorance est source de multiples tensions avec les bailleurs qui procèdent souvent à l’augmentation illicite du loyer. Elimane Sall le déplore aussi, parce que, selon lui, un investissement dans l’immobilier ne peut être amortis en 2 ans.
Revenant sur la notion de surface corrigée, Momar Ndao explique que le prix du loyer soit être déterminé par le bailleur en tenant compte du barème du prix du terrain, de la qualité de la construction, de l’éclairement de la zone, mais aussi du voisinage de la maison. Il explique que ce prix ne peut être remis en question qu’au bout de trois ans. C’est dont pour l’application stricte des surfaces corrigées, la fermeture des agences de location illégales, la suppression immédiate des trois mois d’avance et de la caution, la baisse des locations de 25 que l’Adels compte se battre. En effet, l’association est sidérée par l’exploitation dont sont victimes les locataires. Le président Elimane Sall met les difficultés des locataires également sur le compte d’un manque d’organisation dans le secteur. Il est plus que nécessaire d’après lui de débuter une campagne de sensibilisation pour informer les locataires de leurs droits. La plus grande difficulté chez les locataires au Sénégal, c’est le fait de signer des contrats sans pour autant maîtriser les textes. Ils n’exigent pas non plus de quittance.
Une loi dans le circuit depuis deux ans
Toutefois, d’après M. Sall, cela se comprend avec une demande qui est supérieure à l’offre. Ce qui fait que l’on ne puisse pas compter sur les bailleurs qui ne sont là que pour gagner de l’argent. Selon M. Sall d’ailleurs, « la législation est mal faite ». Se voulant explicite, il affirme que dans le contrat, le bailleur n’écope d’aucune faute après une effraction parce que dans les clauses du contrat, il n’est mentionné nulle part une quelconque sanction à son encontre.
L’Etat aussi à tout intérêt à régler ce secteur, selon Elimane Sall, parce que c’est un frein économique pour le Sénégal. L’Ascosen serait prête à accompagner ses membres dans tous les combats. Mais ils ne peuvent le faire que si ces problèmes lui sont exposés. Les conflits seront ainsi réglés, selon les dispositions règlementaires. Pour davantage de transparence, l’Association des consommateurs préconise une campagne de sensibilisation des consommateurs sur leurs droits en tant que locataires. Momar Ndao souligne qu’en collaboration avec d’autres organismes, l’Ascosen est en train de voir avec l’Assemblée nationale une éventuelle baisse des prix des loyers. « Le projet de loi a été déposé depuis environ 6 mois et on attend toujours», souligne Elimane Sall.
Il vise à diminuer le prix du loyer, c’est-à-dire en réduisant le coût des terrains, des matériaux de construction, etc. Pour M. Sall, toutefois, tous les acteurs ont leur part de responsabilité dans la désorganisation de ce secteur. Les agences immobilières y compris.Interrogées, les agences immobilières refusent de polémiquer sur certaines déclarations. Mme Seck, gérante d’Espoir immobilier, situé à Keur Massar, déclare : « ce sont les clients qui viennent nous voir ; nous, on se contente simplement de faire notre travail». Un autre qui a ouvert son agence avec une clientèle déjà affirmée abonde dans le même sens en arguant de son honnêteté. « Je suis à Mbao depuis 1998. J’ai aidé la plupart des propriétaires à choisir leurs maisons», confie M. Mané. « Je suis en bons termes avec mes clients», dit-il, en précisant ne jamais profiter de l’ignorance de ses clients ».