‘Les lamantins vont boire à la source de Simal’… Ainsi en a décidé, au soir du premier jour, le poète Léopold Sédar Senghor, l’enfant du pays sérère, l’enfant de Joal et de Djilor, celui-là même que Yandé Codou Sène a chanté la nuit au milieu des étoiles qui scintillaient dans le ciel du Sine… Qui chantera désormais, le soir, l’enfant de Joal et de Djilor ?
Yandé Codou Sène n’est plus… La voix, haute comme les palmiers du Sine, de Yandé Codou Sène s’est tue : c’était son dernier matin… ‘Le chant reprendra’, a écrit l’autre poète sénégalais, car les poètes rendront hommage à Yandé Codou Sène au milieu de la nuit qu’ils choisiront… Le royaume du Sine où est née Yandé Codou Sène gardera le souvenir ému de la chanteuse aux lunettes noires qui a chanté mieux que personne le poète de la négritude, son poète éternel : à poète éternel, voix éternelle !
Le théâtre national Daniel Sorano a souvent vibré aux mille sons de la voix profonde de Yandé Codou Sène, celle qui avançait debout dans les travées et qui tendait les bras à la poésie, cette belle créature… Notre cantatrice s’en est allée : sa voix ne retentira plus le soir, au clair de lune, dans le royaume du Sine…
Sédar – le fils de Gnilane – et tous les autres poètes arrachés à notre affection (je n’oublie pas David Léon Mandessi Diop) ne sont plus là pour écouter les chants du Sine : Yandé Codou Sène a traversé en chantant les siècles des hommes et des femmes et la lumière du temps, celle qui éclaire la nuit mystérieuse où les initiés rendent l’oracle…
Les poètes d’ici et d’ailleurs chantent aujourd’hui à l’unisson pour rendre hommage à Yandé Codou Sène : ils lui tendent ‘de leurs mains périssables’ la dernière ‘ hostie noire’ de leur calice d’argent…
Adieu Yandé Codou Sène et que la terre du Sine te soit légère…
Paris le 19/7/10 Jean-Michel SECK