Abdoulaye Wade médiateur au Niger, « un ridicule affligeant » selon Abdou Latif Coulibaly

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Médiation de la CEDEAO dans les conflits en Afrique de l’Ouest
Un moyen pour bloquer les changements

La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) n’est pas à un paradoxe près, dans sa façon de traiter certaines questions politiques qui se posent à elle dans la sous-région. Cette organisation s’est illustrée au cours de ces dernières années par sa volonté de prendre en charge la résolution des conflits internes aux pays membres. Disons le, tout net : l’ensemble de toutes ses médiations aboutissent souvent à des situations désastreuses de blocage consacrant l’immobilisme et le refus du changement qualitatif…

La CEDEAO aura marqué à plusieurs endroits son souci de travailler à ancrer les bases de la démocratie en Afrique de l’Ouest et à faire en sorte que ses principes fondamentaux soient respectés et reçoivent, dans tous son aire géographique d’intervention, une application à la mesure des ambitions des peuples partout assoiffés de libertés politiques et désireux de bien être, tout court.

Seulement, les moyens mis en œuvre à cet effet par la CEDEAO, en particulier les ressources humaines, nous voulons parler des chefs d’Etats sur lesquels cette organisation s’appuie pour traduire en réalité cette volonté de faire triompher la démocratie, se singularisent par leur nature et leur caractère réfractaire aux exigences de la démocratie.

L’élément le plus en vue en la matière reste incontestablement le président du Burkina Faso. Ce dernier a tué avant de s’asseoir confortablement au pouvoir et travaille chaque jour à le garder le plus longtemps possible. Par son parcours et par sa façon de conduire le projet démocratique national de son pays, Blaise Compaoré ne présente nullement le profil de l’emploi, encore moins la sagesse attendue d’un médiateur qui a la responsabilité de trouver les mécanismes et les moyens de faire triompher les règles démocratiques en Côte d’Ivoire hier et en Guinée aujourd’hui. Ce n’est pas étonnant que l’homme n’ait pas réussi sa délicate mission dans ces deux pays.

En Côte d’Ivoire, par exemple, il aura fait illusion, pendant le temps (les trois années que l’accord politique global de Ouagadougou a tenu) que Laurent Gbagbo déchire, comme du papier chiffon l’acte refondateur de Ouagadougou qui devait sortir ce pays du bourbier politico-ethnique dans lequel l’irresponsabilité des hommes politiques ivoiriens aura plongé cette nation.

En réalité, Blaise Compaoré ici, comme ailleurs, se contente d’endiguer les pressions du moment des opposants du pouvoir sur place, en atténuant leurs frustrations par de petites manœuvres qui laissent entière la question fondamentale qui se trouve au cœur du conflit ouvert. Blaise Compaoré est toujours plus attentif aux préoccupations du pouvoir en place, avec qui il partage généralement une préoccupation commune : comment ne rien concéder aux opposants du régime dans leurs revendications démocratiques légitimes, tout en les maintenant dans des limites qui sauvent les formes et laissent intactes les bases du pouvoir.

En Côte d’Ivoire, Blaise Compaoré et Laurent Gbagbo se sont retrouvés et ont trouvé les moyens l’un et l’autre de travailler à rendre la rébellion du nord du pays moins exigeante et plus conciliante dans ses demandes et prétentions.

Cette politique du « containment » trouve naturellement ses limites dans les aspirations des peuples révoltés qui ne peuvent pas accepter de sacrifier des revendications aussi fondamentales que la question de la nationalité et celle de l’exercice des libertés fondamentales sur l’autel des intérêts égoïstes d’hommes politiques évoluant en marge de l’histoire. Ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire a été répliqué en Guinée.

Là également, Blaise Compaoré s’est plus soucié de la situation de la junte et celle de ses responsables impliqués dans les massacres du 28 septembre 2009, plutôt que du sort du peuple et des dirigeants de l’opposition qui luttent pour la démocratie et exigent un changement fondamental dans la conduite du destin de cette nation.

Que dire du Togo ? En vérité, la médiation de Blaise Compaoré a atteint les buts que le président de la CEDEAO lui assignait ; faire en sorte qu’il y ait moins de casse et de morts lors des élections, en particulier de l’élection présidentielle de mars 2004. Cela a été déjà le cas avec l’organisation des élections législatives d’octobre 2007.

Dans le cas du Niger, le choix du président Wade pour servir de médiateur est d’un ridicule affligeant. Comment le chef de l’Etat sénégalais qui se montre incapable de faire avancer la démocratie dans son pays, en trouvant avec son opposition les espaces de convergence et de concorde qui permettent de gérer les contradictions utiles à la marche de la démocratie, peut-il convaincre les nigériens qu’il est l’homme indiqué pour faire avancer la cause défendue par les justes et par tous les démocrates ?

Personne ne prend au sérieux la CEDEAO, quand elle nomme Abdoulaye Wade médiateur au Niger. Il va se distinguer par son activisme stérile, par ses foucades et autres prises de position qui vont définitivement discréditer sa médiation. En tous les cas, la nouvelle donne créée par le coup d’Etat perpétré contre le président Mamadou Tandja enlève pratiquement toute signification à la nomination du président Wade comme médiateur au Niger. Il est heureux qu’il en soit ainsi.

Les militaires qui ont pris le pouvoir semblent avoir compris ce qu’ils doivent et comment le faire, sans avoir besoin de la présence encombrante d’un médiateur comme Abdoulaye Wade. Ce dernier pourrait d’ailleurs rendre complexe la tâche des militaires, dès lors que les nouveaux hommes forts de Niamey se hasarderaient à lui demander son avis. Les nigériens ont tout intérêt à le tenir à l’écart de cette offre de médiation dont le principal acteur en fera d’abord un instrument de propagande interne, pour tenter de redorer le blason d’une diplomatie en souffrance ternie par les frasques de celui qui en définit les axes et les oriente sur la scène africaine.

Abdou Latif Coulibaly

Ps: tire choisi par xalima
lagazette.sn

4 Commentaires

  1. C’est irresponsable d’écrire de la sorte. Il n’y a pas de coup d’Etat salutaire. Abdou Latif Coulibaly pointe du doigt l’expérience de Tandian pour affirmer qu’il aurait dû s’y attendre. Son expérience en tant que journaliste devrait lui permettre de faire attention avant de tenir de tels propos. Mais c’est le problème de l’Afrique, on ne sait pas se mettre à contre courant. A chaque fois qu’il y a coup d’Etat, on applaudit avant de réfléchir. Aucun coup d’Etat n’a fonctionné en Afrique et pourtant on a jamais appris à en tirer les leçons.
    Certes, au Niger, il y avait une impasse politique du fait que Tandian a voulu troubler les règles du jeu. Mais en aucun cas, l’armée n’a le droit de s’immiscer dans des affaires politiques. Ce sont les leaders politiques et syndicaux qui doivent se charger de cette lutte avec le soutien de la population. Qu’importe le temps que ça prendra, qu’importe les safrices à endurer (est-on patient en Afrique?), la lutte politique concerne avant tout les politiques même si le jeu politique est troublé et que les tenants du pouvoir sont incompétents. La révolution malienne a fonctionné, non pas parce qu’elle a été menée par des militaires mais bel et bien par des civils, des enfants et des femmes y compris. Ce qui s’est passé au Burkina avec Sankara est du même ressort. Ces deux exemples sont des révolutions et non des coups d’état ! Et à l’exception de ces deux cas, il n’y a que des échecs. Vous ne pouvez pas nous citer d’autres cas, où la vie politique, sociale et économique s’en est trouvé bouleversée !
    C’est en étant complaisant vis à vis des coups d’état qu’on continuera à avoir coup d’état sur coup d’état. Parce qu’il y a des choses qui ne fonctionnent pas, certains pensent qu’un coup d’état est préférable. Il y aura toujours des choses qui ne marcheront pas, alors on continue le cercle vicieux. L’exemple de la Mauritanie est là pour nous rappeler que tous les motifs bons et c’est regrettable !
    Dans cette article, Abdou Latif Coulibaly n’a même pas le courage d’assumer. Ce qu’il veut dire, c’est qu’un coup d’état serait bienvenu au Sénégal et dans certains pays africains. C’est quand même excécrable venant d’un journaliste dont la renommée (qui s’explique par le fait que les sénégalais se contentent de la simplicité) est connue et reconnue malgré tout. Non monsieur Coulibaly et consort, nous n’avons pas besoin de coup d’état dans nos pays, quelque soit par ailleurs nos mécontentements et revendications légitimes.
    Il est temps que nous africains revoyons notre attitude face à la violence d’une manière générale. On a trop tendance à « comprendre » la violence. Je suis désolé, mais je pense qu’il faut toujours condamner vigoureusement même des violences dites mineures avant d’essayer de comprendre. Tant qu’on restera complaisant face à la violence, il y aura des groupes armés par ci par là, des manifestations avec des morts et des blessés sans perspective que cela s’arrête un jour. Nous pouvons tous être victimes de ces violences qui pour la plupart sont gratuites.
    Je ne me fais aucune illusion. Abdou Latif Coulibaly ne fait que relayer ce qui se passe dans nos mentalités. Il n’est pas le seul à penser que c’est par la force qu’on va résoudre nos problèmes même si ce n’est prouvé nulle part.
    Méfions nous de la fumisterie qu’elle vienne de l’extérieur de nos frontières ou de l’intérieur.
    Vive le Sénégal !
    Vive l’Afrique !

  2. Les moyens de bord
    Et tu pense que ce que le peuple subit quotidiennement dans sa chair, n’est pas une violence? tous ces scandales devenus quotidiens dans nos cieux dépassent de loin la violence dont tu parle, que d’ailleurs le peuple nigérien lui même considère comme salutaire. Alors Mr Diop s’il te plait, on n’en est encore à ce niveau d’intellectualisme avec les dirigeant que nous avons, on fait avec les moyens de bord, certes ce sont pas les meilleurs mais c’est tout ce qui nous restent.

  3. Certes Dial Diop a raison de fustiger les coups d’état, qui comme il le souligne ne débouchent sur rien en général, mais force est de reconnaître que dans nos situations il n’y a pas beaucoup de marge de manoeuvre : des ressources naturelles convoitées, une élite politique assoiffée de pognon, membre d’organisations transnationales (loges,mafias,finance….) et un peuple sous-éduqué, loin des enjeux réels de la situation.Il m’apparait clair que dans une telle situation, la seule institution qui puisse encore échapper au phagocytage reste l’armée : que vous appeliez son action révolution ou coup d’état, le vecteur principal reste l’armée;l e seul endroit où le citoyen lambda peut encore trouver des moyens de résistance physiques à la hauteur de l’agression perpétrée par ces puissances occultes, sans être financé par des forces extérieures.
    Je ne pense pas que Latif ne désire pas le meilleur pour le Sénégal, en particulier et l’Afrique, en général, comme je ne pense pas qu’il soit un partisan de la guerre.
    Maintenant, il s,agit d’être calme, serein, de garder son sang froid et d’utiliser son intelligence, car dans ce jeu des relations internationales, chaque pays a des services qui en sont chargés et je ne pense pas qu’on les appelle services d’intelligence pour rien ! Il faut une fois encore une très grande maturité d’esprit pour comprendre tout cela, mais aussi adopter des comportements adéquats à la situation, sans quoi on se fera encore avoir par des leurres sans apercevoir la lueur.

    Vive le monde entier !

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