Aïssata Tall Sall (Députée du PS) – « La parole en politique vaut autant sinon plus que la règle »

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En tournée politique dans la région de Kolda, avant-hier jeudi, la députée socialiste et mairesse de Podor a abordé avec EnQuête la question de la réduction du mandat présidentiel ainsi que la crise à l’Assemblée nationale. Aissata Tall  Sall a aussi évoqué ses ambitions pour les populations du Fouladou.

Que pensez-vous du débat relatif à la réduction du mandat présidentiel de 7 à 5 ans ? 

Vous savez ! Moi en politique, je fais partie des gens qui pensent qu’il y a la règle et il y a la parole. Et pour moi, la parole en politique, elle vaut autant sinon plus que la règle. Surtout quand on est en Afrique où la parole est considérée plus que la règle. Le Président Macky Sall s’est engagé devant tout le peuple sénégalais à réduire son mandat à cinq ans. J’entends dire par-ci et par-là : oui c’étaient les propos de la campagne. Je pense que quand un homme religieux ou de surcroît un homme politique parle, moi, je ne distingue pas les circonstances. La seule chose qui m’importe, c’est l’engagement qui a été pris. Macky Sall a pris l’engagement de réduire son mandat de 7 à cinq ans. Donc, il doit tenir parole.

 Quelles sont, selon vous, les modalités pratiques par lesquelles le président doit passer pour ramener son mandat de sept à cinq ans.

Des constitutionnalistes divergent sur la question. Mais quelle que puisse être la voie choisie, nous l’attendons sur le respect de cet engagement. Je pense que c’est un minimum. Il n’y a pas à s’énerver. Quand on l’interpelle sur cette question, il n’a pas à se mettre en colère. Il doit tout simplement  respecter un engagement solennel. Je crois à mon intime conviction que cet engagement fait partie des raisons pour lesquelles il a été largement élu. Pensez-vous que si le Président Macky Sall avez dit aux Sénégalais qu’il allait faire un mandat de sept ans, il aurait été élu. Qu’il respecte cet engagement majeur ! Et je ne peux pas concevoir qu’avec l’état actuel de la  démocratie au Sénégal, nous en soyons encore là à discuter de la date de l’élection présidentielle qui est une échéance majeure dans notre calendrier républicain. Je pense que le Sénégal ne mérite pas ces genres de débats-là. Voilà ma position sur cette question.

Aissata Tall Sall sera-t-elle candidate à la prochaine élection présidentielle ?

Mais quand est-ce que les prochaines joutes auront lieu ?

En 2017 ou en 2019 

On verra, le moment venu. Et croyez-moi, je suis une femme de responsabilité et de conviction. Quand je le sentirai, je le dirai à mes compatriotes sans faux-fuyant et en ne me cachant pas entre les petits doigts.

 Peut-on s’attendre à ce que vous souteniez ou ralliez le Président Macky Sall ?

Pourquoi je devrais le soutenir ou rallier son camp. Déjà Macky Sall  a beaucoup d’alliés. J’observe qu’aujourd’hui, il a réussi la prouesse de réconcilier la famille socialiste. Il en est de même pour la  famille libérale. Ce qu’on n’a pas pu faire depuis 1998. Est-ce qu’il a besoin de soutiens supplémentaires ? Je ne le crois pas. Mais je me désole un peu du champ démocratique sénégalais. J’ai l’impression que plus nous avançons dans la qualité de notre démocratie, moins la qualité des hommes qui la servent est observée. Donc ce phénomène de transhumance, de ralliement, je n’ai qu’un vœu : c’est qu’on y mette fin un jour. J’avais pensé que Macky Sall serait cet acteur-là, mais je me rends compte que malheureusement, le jeu reprend de plus belle et avec les mêmes hommes d’ailleurs.

En ce qui concerne la sensibilisation, l’animation, la mobilisation et la massification du Ps, certains des responsables politiques dudit parti disent que vous n’avez pas suivi le mot d’ordre lancé par votre secrétaire général Ousmane Tanor Dieng. Qu’en dites-vous ?

Ecoutez ! Moi, je suis une femme de liberté et de responsabilité. Et je ne crois pas que le parti socialiste soit un carcan dans lequel on veut mouiller tout le monde. Si c’était le cas, je ne serais pas restée dans ce parti-là. Maintenant, en politique les divergences doivent s’exprimer de la façon la plus sincère, objective et même enrichissante pour le parti. On est dans  un parti de débat. Cela n’a rien à avoir avec les disciplines bien sûres. Personne ne saurait tolérer l’indiscipline dans un parti organisé. Mais entre l’indiscipline et la liberté, il y a toujours une juste mesure à observer.

En tant que députée, quelle analyse faites-vous de la situation délétère qui prévaut actuellement à l’Assemblée nationale.

Je suis très sérieusement désolée. Je pense que notre peuple ne mérite pas cela. Nous sommes à l’Assemblée nationale en tant que représentants du peuple. Et le peuple sénégalais est connu comme étant un peuple digne, éduqué et un peuple qui sait observer le sens de la mesure. Donc, nous devons être à l’image de ce peuple-là que nous avons l’honneur de représenter à l’Assemblée nationale. Alors, j’ai entendu l’autre jour le Président Moustapha Niasse dire qu’il mettra fin à tout cela. Mais il est déjà de sa responsabilité première de faire fonctionner l’Assemblée nationale.

Moi qui vous parle, j’ai posé quatre questions orales au ministre des Forces Armées sur l’envoi de nos troupes au Yémen. J’ai posé quatre autres questions orales au ministre des Affaires étrangères sur l’envoi de nos troupes au Yémen. C’était au mois de mars dernier. A ce jour, je ne sais même pas si Moustapha Niasse a reçu ces questions-là. Parce que personne ne les a programmées. Et personne ne m’a même dit qu’elles ont été reçues. Quelle est cette Assemblée nationale qu’on fait fonctionner comme ça ? Je dénonce le fonctionnement. Je pense qu’avant de donner des leçons, encore faudrait-il que les choses marchent comme il le faut de son côté. Alors, il en appelle à la responsabilité des députés. Je suis d’accord. Je ne suis pas contre, mais qu’il regarde la sienne propre.

Quel est l’objectif de votre visite dans la région de Kolda ?

Ma présence au Fouladou se justifie par le fait que je suis députée à l’Assemblée nationale, je dois savoir ce qui se passe dans mon pays et le Fouladou en fait partie. La deuxième raison est qu’ici à Kolda, j’ai des amis et des camarades avec qui je partage les convictions politiques. Donc, j’ai le droit de venir leur rendre visite mais aussi visiter tous les départements de Kolda. Parce qu’on ne peut pas défendre une cause ou une idée si on ne prend pas la pleine mesure de ce que représente cette cause-là. Enfin, la troisième raison, ce sont mes camarades Oumar Kandé, Demba Seydi et d’autres encore qui depuis très longtemps m’ont lancé cette invitation.

Je devrais être là depuis l’année dernière, mais le destin a décidé que ça soit aujourd’hui. Je suis très contente et très heureuse de cette forte mobilisation et de cet accueil coloré. La région de Kolda peut être le moteur du développement de notre pays. Je ne le dis pas pour faire plaisir aux fils du Fouladou, je le dis parce que pour moi, c’est une conviction profonde. En 1998 ou 1999, j’ai accompagné le Premier ministre d’alors Mamadou Lamine Loum qui dirigeait un gouvernement dans lequel moi-même j’étais. Nous avons tenu un conseil ministériel mémorable à Kolda. Ce qui nous avait le plus frappé, c’est le contraste entre les énormes potentialités de cette région et le retard dans son décollage économique. Je pense qu’on ne peut pas être un décideur dans ce pays et ne pas s’intéresser à ce qui se passe à Kolda.

Pensez-vous que les jeunes du Fouladou sont déterminés à changer leur avenir avec le Parti socialiste (Ps) ?

 Oui. Ici au Fouladou, les jeunes sont plus que jamais déterminés à changer leur avenir avec le Ps. Ils sont déterminés à travailler dans le présent pour changer leur avenir. Et je suis là pour que le changement intervienne. Je suis là pour que le Sénégal prospère. On a toujours dit que la région de Kolda fait partie des régions les plus pauvres du Sénégal. Mais pourquoi nous devons accepter cette fatalité ? Pourquoi nous devons accepter que malgré toutes les richesses naturelles, Kolda reste toujours considérée comme une région pauvre ? Or elle dispose de l’eau, de la forêt dense, l’agriculture abondante, l’élevage, la pêche, la chasse ; on dit que Kolda est une région pauvre. Cela, le parti socialiste ne peut pas l’accepter. Si nous devons changer Kolda, c’est tous ensemble que nous changerons Kolda. Parce que nous ne pouvons pas changer le destin de la région de Kolda si ensemble nous ne sommes pas unis pour travailler à ce changement. Et je suis venue vous le dire. Le chemin peut être long, mais croyez-moi, sans notre union, il n’y a aucun développement possible. C’est ce que je suis venu dire à ces dignes fils de Kolda.

Selon vous, pourquoi Kolda ne peut pas se développer, malgré ses potentialités économiques ?

La région de Kolda a tout pour réussir. Mais ce qui lui manque, c’est un dirigeant qui est prêt à réussir avec les fils du Fouladou. C’est tout. S’il y avait un bon dirigeant, la région de Kolda qui regorge d’énormes potentialités serait déjà parvenue à amorcer son développement économique. Nous connaissons les chiffres à Kolda sur la population, sur la pauvreté, sur ce qui fonde même l’essentiel de l’économie ici à Kolda. Ce sont des leviers importants que nous pouvons enclencher pour faire décoller cette région. Kolda peut être une des locomotives des régions du sud du Sénégal.

EnQuête

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