Certes, tous favorables à l’instauration de la Charia, mais d’une  »Charia à hauteur d’homme » !!!

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Au moment où tout le monde parle de retour à Dieu et donc à la Charia, comme seule alternative pour un changement de comportement du peuple, en vue de la résolution d’une demande sociale devenue de plus en plus préoccupante, il est bon de rappeler et de préciser ce qu’est véritablement la Charia et surtout de montrer sa compatibilité avec toutes les situations sociopolitiques (laïcité, état de droit et démocratie). Malheureusement, beaucoup de prédicateurs en ont une interprétation très discutable, voire rétrograde et pernicieuse. Il urge donc d’apporter les rectifications doctrinales qui s’imposent pour permettre aux musulmans – aux intellectuels en particulier, de vivre l’Islam dans toute sa plénitude sans rompre avec la modernité et les exigences de la communauté internationale.

Le Droit pénal islamique est communément appelé Charia, mais à tort ; en réalité, la Charia est plus large, moins restrictive ; elle englobe toute la législation divine : Coran et Tradition du Prophète (PSL) essentiellement ; et n’est donc pas descendue en monobloc, mais progressivement, pour apporter un éclairage sur le culte et sur toute chose d’une manière générale. (25. Le Discernement : 30-33 – Al-Furqâne). Et avant la fin de la mission terrestre du Prophète Mouhammad (PSL), toute la Charia était descendue et l’Islam agréé comme religion, il y’a déjà quatorze siècles [(5. La Table Servie : 3-5 – Al-Mâ’idah) ; (16. Les Abeilles : 88-90 – An-Nahl)]. Il ne reste plus qu’à l’actualiser, à apporter donc à chaque instant l’interprétation la plus appropriée, et ceci jusqu’à la fin du monde.

En effet, le Prophète Mouhammad (PSL) est le ‘’Sceau des Prophètes’’, envoyé à toute l’humanité [(33. Les Factions : 40 – Al-Ahzâb) ; (34. Les Saba’ :28)]. Le message coranique est donc universel et éternel, et Dieu en a facilité la compréhension à ses pieux serviteurs, en vue d’un Rappel [(15. Al-Hijr : 9) ; (54. La Lune : 16-17 – Al-Qamar) ; (2. La Vache : 282 – Al-Baqarah)].

Oui, Dieu nous a envoyé le Prophète Mouhammad (PSL) avec la Direction et la Vraie Religion pour la faire prévaloir sur toute autre religion (48. La Victoire : 28 – Al-Fat.h). Et c’est dire donc que nous sommes dans une logique d’expansion intangible de l’Islam, mais sans contrainte et donc dans le respect strict de la liberté de conscience – principe sacro-saint de l’Islam [(109. Les Incrédules : 1-6 – Al-Kâfirûne) ; (2. La Vache : 256 – Al-Baqarah)]. Oui, cette expansion n’incombe qu’à Dieu et ne passe donc que par la persuasion (41. Les Versets clairement exposés : 53). Il n’incombe même pas à un Prophète de contraindre les hommes à être croyants, car personne ne peut croire sans la permission de Dieu (10. Jonas : 96-100 – Yûnus).

Cet exposé préliminaire devrait tranquilliser tous les non – musulmans et les persuader définitivement que l’Islam est une religion de paix, de tolérance et de justice. Et la Charia n’a pour objectif que de réconcilier l’homme avec son Créateur et avec tout son entourage ; elle est véritablement miséricorde et guérison pour tous les croyants [(17. Le Voyage Nocturne : 81-82 – Al-Isrâ’) ; (10. Jonas : 57 – Yoûnous)].

Et certes, la Charia est globalement la même pour tous les musulmans, mais elle renferme des dispositions qui permettent de l’adapter à tous les contextes. Il existe donc une « Charia à minima » et une « Charia à maxima », avec autant de formes intermédiaires que de situations particulières (rapports de forces). Et il est important de préciser que le Coran n’est pas une constitution  « prêt à l’emploi », applicable de façon univoque à tous les musulmans. En réalité, elle renferme tous les principes qui permettent aux juristes de légiférer, et donc d’établir une constitution et des lois, en fonction du contexte et essentiellement des rapports de forces, comme dans toute démocratie, en préservant donc la liberté de tous, dans les limites de l’acceptable.

En vérité, le message coranique qui s’adresse à tous les hommes, en tout temps et en tout lieu, ne peut qu’être parabolique, adaptable donc à toutes les situations. Il s’adresse donc à ‘’ceux qui réfléchissent’’, ‘’ceux qui sont doués d’intelligence’’ [(29. L’Araignée : 41-44 – Al-Ankaboût) ; (35. Le Créateur : 28 – Fâthir) ; (16. Les Abeilles : 44 … 65 … 67 – Azn-Nahl)]. Oui, selon le Prophète (PSL), « la religion, c’est la raison, celui qui n’a pas de raison n’a pas de religion ». Dès lors, toute interprétation littérale ou décalée peut être source d’incompréhension et entamer même la crédibilité de l’Islam.

En principe, il ne devrait pas y avoir de problèmes pour les différentes communautés confessionnelles à s’entendre sur une constitution. En effet, les obligations religieuses des trois religions monothéistes sont quasi-identiques (42. La Concertation ou La Délibération : 12-15 – Ach-Chûrâ’). Oui, la Thora et l’Evangile révélés respectivement à Moise et Jésus fils de Marie, sont aussi Direction et Lumière (5. La Table Servie : 44-50 – Al-Mâ’idah). Et à l’évidence, une loi d’inspiration islamique ne devrait pas nuire un chrétien ou un juif ; de même qu’une loi d’inspiration biblique ne devrait pas déranger un musulman en quoique ce soit. Dès lors, si les membres de la communauté, toutes confessions confondues, se concertent, ils devraient trouver un consensus large à défaut d’une convergence parfaite. C’est dire toute l’importance de la concertation et du dialogue en Islam (42. La Concertation ou La Délibération : 36-43 – Ach-Choûrâ’).

En Droit pénal, communément appelé « Charia », la sentence capitale (peine de mort, amputation de membre, flagellation etc.) annoncée dans un premier verset est toujours tempérée par le verset suivant, ou d’autres versets dans la même sourate ou d’autres, qui préconisent ou proposent la grâce aux repentants [(2. La Vache : 178-179 – Al-Baqarah) ; (5. La Table Servie : 33-34 … 38-40 – Al-Mâ’idah) ; (4. Les Femmes : 15-16 – An-Nisâ’) ; (24. La Lumière : 2-5 – An-Noûr)]. Ainsi, entre la peine capitale et la grâce, il y a un gradient de peines. Et suivant le contexte, le législateur peut choisir une peine suffisamment dissuasive, mais aussi tenant compte de la clémence et de la miséricorde de Dieu. Il ne faut pas être plus royaliste que le roi !!!

A la lumière de tout ce qui précède, on perçoit très clairement qu’il ne s’agit point de couper les mains des voleurs, de tuer systématiquement ceux qui ont tué, de condamner à mort ou de flageller les fornicateurs et les calomniateurs. Il ne s’agit que de juger les délinquants selon la réglementation en vigueur établie par consensus par le peuple, toutes confessions confondues ; ce qui, dans les principes, n’est pas très différent du ‘’Droit positif’’  adopté par la quasi-totalité des pays du monde. Et en réalité, le ‘’Droit positif’’ (laïc) n’est pas une invention des occidentaux ; elle dérive de la Thora qui comme le Coran est lumière, guide et éclaircissement de toute chose (6. Les Troupeaux : 154-155 – Al-An’âm) ; c’est ce qui explique sa conformité avec la Charia, dans ses principes. En effet, l’Islam s’inscrit dans la tradition biblique ; les prophètes se succèdent mais la loi fondamentale ne change pas, dans ses principes. Ce Droit positif est cependant susceptible d’évoluer, de se parfaire en se spiritualisant et d’atteindre à terme l’idéal islamique. Mais toute modification devra être consensuelle, en conformité donc avec les principes de démocratie et de droits de l’homme que tous nos pays ont ratifiés – respect des engagements oblige ! (5. La Table Servie : 1 – Al-Mâ’idah)

Et en cette ‘’fin des temps’’, la priorité doit être à la clémence, à l’indulgence et à la réhabilitation, conformément au Hadith :

– Abû Hurayra rapporte ces paroles de l’Envoyé de Dieu – sur lui la grâce et la paix – : « Vous êtes dans une époque où celui qui aura négligé le dixième de ce qui lui a été ordonné périra. Mais viendra un temps (‘’fin des temps’’) où celui qui aura fait le dixième de ce qui lui a été ordonné sera sauvé ». (Tirmidhî)

Qui était plus pervers que Pharaon ? Et pourtant Dieu lui a envoyé Moïse pour le réhabiliter ! (79. Ceux qui arrachent : 15-25 – An-Nâzi’âte) ; (20. Tâ.Hâ : 42-44)].

Il faut garder à l’esprit que l’Islam est une religion d’équilibre ; il condamne donc toutes les formes d’extrémisme (7. Al-Araf : 31). Oui, la juste mesure fait partie des qualités attribuées aux « Serviteurs du Miséricordieux » (Ibadourahmânes) qui, selon le Coran, sont les musulmans modèles (25. Le Discernement : 63-73 – Al-Fourqâne). Il faut aussi que les sceptiques comprennent pour de bon que la Charia est une miséricorde et n’a d’objectif véritablement que l’épanouissement de l’homme – Dieu ne veut pas nous imposer des charges supplémentaires supérieures à nos capacités (2. La Vache : 285-286 – Al-Baqarah). Et donc en tant que musulmans, nous sommes tous favorables à l’instauration la Charia, mais d’une ‘’Charia à hauteur d’homme’’ !!! Oui, selon le Prophète (PSL), « La religion n’est que facilité, quiconque la rend difficile en sera la victime ». (Bukhari) …  « Facilitez les choses et ne les rendez point difficiles ; annoncez la bonne nouvelle et ne faites pas fuir (les gens) ». (Bukhari)

 

DOCTEUR MOUHAMADOU BAMBA NDIAYE

Ancien Interne des Hôpitaux de Dakar

Pédiatre à Thiès

Recteur de l’Université Virtuelle ‘’La Sagesse’’ de la Fondation Serigne Babacar SY Ihsaan -Bienfaisance (Thiès). http://sites.google.com/site/universitevirtuellelasagesse/

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