Couvertures des manifestations : RFM et TFM jouent les sapeurs pompiers !

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Qui l’aurait cru en 2011 ? Pourtant, c’est bien la TFM qui tend son micro à des sénégalais pour qu’ils expriment leurs désagréments  suite à des manifestations. L’objectif est clair, mettre en mal les manifestants avec les riverains.

Aujourd’hui, la RFM et la TFM ne se précipitent plus pour arrêter leurs programmes afin de diffuser en direct les actes de violence. D’ailleurs à quand remonte la dernière édition spéciale de la TFM/RFM ?

Et puisqu’on y est, où est Monsieur Scoop de la RFM ? L’homme qui savait si bien faire interrompre les programmes pour annoncer de pseudos scoops et ensuite faire ouvrir l’antenne à de pseudos experts… Ah j’avais oublié, dans ce pays on parle beaucoup maintenant ! « On parle beaucoup », retenez bien cette expression, vous l’entendrez assez souvent… N’osant pas dire « Bayil lène Macky mou liggey », on théorise « waax dji dafa bari ».

Avez-vous, par exemple, remarqué que la campagne référendaire était la plus pauvre en débat de toutes les campagnes électorales sénégalaises depuis l’avènement du pluralisme audiovisuel ? Il n y a pas eu pratiquement aucune confrontation entre les camps du oui et du non.

Durant toute la campagne référendaire GFM n’a proposé aucun programme spécial de débats, alors que d’habitude pour la radio, par exemple, c’était des débats le matin, l’après midi et la soirée. Silence, « Macky travaille », sans avoir le courage de le dire, tel est le nouveau slogan de ce groupe de presse. Les réunions de rédaction de ce groupe de presse doivent être bien amusantes. Parce que « nak faaté xaadiou fi ».

Pour mieux comprendre son nouveau angle de traitement des manifestations et autres grèves, lisez cet extrait du livre de François Ruffin, « les petits soldats du journalisme ».

 

Sadikh DIOP

Administrateur de l’Observatoire de l’information et des médias !

                       ————-— extrait———————-

 

« J’appartenais à une unité d’élite : le Centre de formation des journalistes (CFJ).
Cette brigade produit des généraux trois étoiles : PPDA, David Pujadas, Laurent Joffrin, Pierre Lescure. Elle fournit surtout, chaque année, la chair à papier qui renforcera les garnisons de France 2, du Parisien, de l’AFP, du Monde

Les sergents formateurs – des mercenaires de LCI, de France Info, du Nouvel Observateur – dressent le troufion à coups de « On s’en fout du fond », « Tant pis si c’est de la merde », « On vend du papier comme on vend des poireaux », « Imaginez un magazine en fonction du marché publicitaire ».

A leurs côtés, j’ai connu la marche peu triomphale d’un fantassin de l’information. J’ai acquis les réflexes de survie, pour intégrer les médias et gagner ses galons : recopier l’AFP, produire vite et mal, imiter les concurrents, critiquer les livres sans les lire, ne surtout plus penser, trembler devant sa hiérarchie.

Une vie de caserne trépidante, où se découvre ce journalisme insipide, aéfepéisé, routinisé, markétisé, sans risque et sans révolte, dépourvu de toute espérance, qui étouffe les rédactions de sa pesanteur.

Extrait : un reportage ordinaire

Je le redoutais : en radio, on allait me coller aux grèves de métro. Pour échapper à ce pensum, je m’étais concocté un sujet de rechange : le nucléaire. « Vendant » cette idée, je la raccroche tant bien que mal à l’actualité : dans trois jours doivent défiler des manifs, à Paris, Lille, Lyon, Rennes, Marseille, Bordeaux. « C’est trop tôt par rapport à l’actu, tranche l’intervenant (de France Info). De toute façon, les grèves, tous les autres vont en parler. On ne peut pas faire l’impasse dessus, l’AFP sort déjà des « urgents ».
- Y aura plein de choses qui ne te plairont pas dans la vie. Tu dois d’abord penser à tes auditeurs, et ils attendent ça. »

Une autre enseignante, de France Culture, me présente aussitôt l’angle : « J’ai lu un édito de Bruno Frappat, ce matin, dans La Croix. Regarde, c’est vraiment incendiaire… Est-ce que c’est le bon moment pour une grève, alors que les gens se sentent menacés ? Les syndicats sont complètement irresponsables… Une grève des transports en pleine crise internationale, avec l’anthrax, Ben Laden, les alertes à la bombe. Donc, c’est un peu ça qu’on devrait retrouver dans ton reportage. Et place aussi un micro d’ambiance pour les colis suspects. » Il est 10 h 15. « Retour obligatoire avant 11 h 30. »

A la gare du Nord (où rien, m’avait-on dit, ne circulait), des trains partent chaque demi-heure pour la banlieue. J’interroge Aziz, déjà installé sur une banquette : son impression, « c’est que les grèves ne sont jamais suivies à 100 %. » Même réaction d’Hélène, au départ pour Mitry Claye. Je tâte le terrain côté anthrax et attentats : mes deux interlocuteurs ricanent doucement…

Ce n’est qu’aux Halles que je rencontrerai des travailleurs vraiment embêtés par la grève. Un caméraman et un journaliste de France 3 Ile de France, qui ne trouvent personne à sonder. « Merde, merde, faut qu’on se presse… » Ils se précipitent sur les quais : les voyageurs n’attendent que depuis 5 minutes… « On n’a rien, rien. On peut pas ramener ça. »

Moi, je ramène ça. Ce rien. Je détaille le contenu de mes « sonores » à l’intervenante, qui en déduit : « Donc, ton angle, ça va être que dans les circonstances dramatiques que nous vivons, la RATP s’est arrangée pour alléger les menaces qui pèsent sur les passagers. Pour qu’on puisse garder la tête hors des flots. Reprends aussi les dépêches AFP sur tous les débrayages ».

Insubordination, discrète : je monte plutôt ma bande sur le mode « trafic perturbé » et « désagréments mineurs ». Un résultat jugé « plat », à juste titre : « Quand même, quand même, tu aurais pu faire un effort… je viens d’écouter LCI, eh bien y avait des gens qui se plaignaient. Qui se sentaient pris en otage ». Une autre prof, de France Info, conseillera à un camarade : « Tu aurais dû dire à tes voyageurs : « Bon, maintenant on le refait, mais vous êtes en colère » ».

Côté technique, ou intellectuel, ce reportage ne m’a rien appris. Pas plus que des dizaines d’autres. Mais il s’agit moins d’apprendre que d’accepter. Accepter un mode de production routinier. Accepter de produire des reportages ridicules, qui « ne nous intéressent pas », sous prétexte de « devoir professionnel ». Accepter le dégoût de soi, de son travail, pour lequel on éprouve plus de honte que de fierté ».

François Ruffin

2 Commentaires

  1. Donc , le Sénégal ne compte qu’un seul groupe de presse GFM . Si , le groupe You ne pose pas le débat , il ne y’aura pas débat . On est en 2016 quant même , le gens ne sont pas dupes .On peut aussi reprocher à Macky de n’être à la hauteur des attentes mais reconnaissons qu’il y a de moins en moins de scandales , de faits divers au sommet de l’Etat . Arrêtez la haine !

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