La Centif a trouvé la trace de plus de 100 millions de francs Cfa que le ministre-conseiller du Président, en charge des questions financières, changés en devises par l’entremise d’un célèbre cambiste. Les limiers du ministre de l’Economie et des Finances se demandent de quelle activité M. Sarr a pu tirer autant d’argent.
Samuel Sarr aura-t-il à répondre devant la Justice des rapports d’argent qu’il a entretenus avec le cambiste Demba Hamet Sy ? Si on peut croire que certains de ses amis, nichés aux étages de l’immeuble Tamaro, au Plateau, souhaiteraient bien voir cela, le rapport établi par la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) ne prédispose pas nécessairement à le penser.
En traçant les transactions du cambiste Demba H. Sy, la Centif a pu établir que l’ancien ministre de l’Energie a changé successivement, 22 millions, 33 millions et 50 millions de francs Cfa, en devises. Pour ces différents montants, le «Wadiste éternel», comme il aime à se qualifier, a émis des chèques sur son compte, à l’ordre du cambiste. Si ces opérations ont attiré l’attention des limiers de la finance, c’est, comme le dit le rapport, que la Centif s’est étonné qu’avec le traitement salarial d’un ministre, qui ne dépasse pas les 3 millions de francs Cfa, Samuel Sarr ait pu disposer d’autant de ressources financières.
A cela, ce dernier a répliqué que, bien avant d’être ministre et même Directeur général de la Senelec, il disposait déjà de revenus confortables, et avait même «plusieurs milliards de francs» dans son compte bancaire. Il s’agira maintenant pour les enquêteurs de déterminer la licéité des activités qui lui ont permis d’accumuler tous ces revenus. En attendant, on peut déduire qu’une personne qui a l’intention de blanchir des millions, ne les fait pas nécessairement passer par circuit bancaire, en louant les services d’un cambiste ayant pignon sur rue.
Car Demba Hamet Sy n’est pas le premier venu. Certains disent même que c’est le cambiste préféré des pontes du régime. Très peu sont ceux qui n’ont pas eu recours à ses services pour leurs besoins de change. Les connaisseurs disent qu’il est le chef de file du groupe des 7 plus gros cambistes de la place de Dakar. Ce qui justifie qu’il se taille la part belle sur les opérations de change, avec des transactions de l’ordre de 60 milliards de francs Cfa.
La diversité de sa clientèle fait qu’il ne sera pas facile de faire tomber Demba Hamet Sy dans cette enquête sur le blanchiment d’argent. En plus du fait qu’il faudrait, dans le cas de Samuel Sarr, qu’il s’agisse de fonds illégaux qu’il échangeait, ce qui n’est pas évident, il y a que dans ses opérations, M. Sy travaillait avec tout le monde. Certains témoins disent qu’il a eu même à faire des opérations d’urgence, pour le compte de la présidence de la République, lors des voyages impromptus du chef de l’Etat.
Ce qui a semblé le plus intriguer les enquêteurs de la Centif, c’est le fait que le cambiste ne semble pas disposer de ressources propres à la mesure des transactions qu’il réalise. Pour une personne qui brasse des milliards de francs, M. Sy ne disposerait que d’une résidence dans la banlieue dakaroise, et a un train de vie, somme toute modeste. Cela a poussé les limiers à se demander s’il n’avait pas une vie cachée, ce qui n’a pas encore pu être démontré.
Par contre, on sait que l’homme est un fidèle talibé de Médina Gounass, et que les guides de cette localité religieuse voient avec beaucoup d’agacement l’acharnement que subit celui qui passe pour un mécène dans sa contrée.
lequotidien.sn
Personne ne peut rien contre un éternel Wadiste.