La classe politique sénégalaise refuse de grandir

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La classe politique refuse de grandir. La sécurité, l’emploi des jeunes, l’industrialisation du pays subissent le funeste ascendant de l’e-politique fait de formules qui nourrissent la toile.
« Ils vont me voler mes idées ! ». Voilà ce qu’adorait dire Wade, alors opposant. Il faisait allusion aux socialistes. C’était alors sa défense pour se garder de se répandre sur « sa » solution de sortie de crise. N’empêche, le pape du Sopi distillait de temps en temps sa vision de l’école, du développement régional, etc. Une bonne trentaine d’années après, la classe politique semble se réfugier derrière ce prétexte. Comme si le remède que les leaders prétendent détenir leur tombe du ciel. Ils n’en pipent mot. Et préfèrent laisser le champ politique se débrider à coups de formules et d’invectives. Pourtant, la presse ne relayait soit des accidents, soit des agressions ou l’infinie grève des enseignants. La sécurité, l’école, ne font l’objet d’aucun débat sérieux. Ces thématiques sont laissées à la portée des forums de la bande FM. « Que de morts dans nos hôpitaux, si nos politiciens étaient des médecins ! », s’exclamait ainsi, railleur, ce rabatteur à la gare routière des taxis de « Case-Bi ». L’homme, la cinquantaine, avait l’oreille orientée vers la radio d’un taxi qui attendait de faire le plein. Et d’où partait la voix éraillée d’un « revueur de presse ». Ce 30 mai dernier, l’homosexualité occupait la une des quotidiens. Le journaliste Tamsir Jupiter Ndiaye condamné à une peine ferme de quatre ans pour acte contre nature, coups et blessures volontaires, avait fait appel. Mais le parquet, loin d’être « alangui » par le temps, a rajouté un an à sa peine. « L’avocat général « alourdit » d’un an de plus la peine de Tamsir Jupiter Ndiaye », commentait un quotidien.

Le buzz c’est le mandat de dépôt du secrétaire général de l’Union des jeunesses travaillistes (Ujtl), Bara Gaye. Il a été perdu par des propos au meeting des libéraux à Mbacké, accusant le chef de l’Etat d’avoir octroyé à l’homosexuel Babacar Ndiaye un passeport diplomatique. Quelques jours plus tard, le maire de Ziguinchor, Abdoulaye Baldé, recevant les condoléances d’Idrissa Seck le jeudi 30 mai dernier, verse dans un registre inattendu et cogne : « Il peut vous sourire le jour et vous poignarder la nuit ». Il parlait du chef de l’Etat. « Macky, on ne peut pas le situer », rapporte un autre quotidien. « Tu ne peux pas savoir si c’est ton ami ou ton ennemi », renchérit-il dans un autre canard. Puis arrive l’écœurante controverse Bara Gaye contre Ameth Suzanne Kamara. Pour s’offusquer de l’attaque de Mbacké, Kamara trouve que Gaye est bien content de retrouver son « mari \ » Karim Wade à Rebeuss. Pouvait-on s’attendre à mieux ? Sans doute, non !

La plupart des responsables qui ont investi l’espace public se cantonnent plus aux formules qu’à des élaborations sérieuses. On s’attaque ainsi, par exemple, aux prix des denrées pour constater qu’ils n’ont pas baissé. Ce qui est à la portée du Sénégalais lambda. Par contre, dire pourquoi ça peut baisser ou non, est une sorte de sanctuaire interdit pour nombre de politiciens. Ont-ils les arguments pour convaincre ? Difficile de répondre par l’affirmative. La seule fois que des hommes politiques se sont essayés au jeu des chiffres -et c’est le cas du président de Rewmi, Idrissa Seck- on a plutôt perçu des dénégations sur l’état des caisses du Trésor public. Lesquelles dénégations se sont vu ridiculiser par les mises au point du pouvoir. Le débat s’est arrêté là.

Et c’est quasiment la règle depuis que les médias instantanés ont envahi la toile. Une sorte d’e-politisation s’est emparée de nos existences. Tout se construit au fil de petites phrases inoculées par doses calculées et relayées par les sites qui s’en délectent voracement. Sur les grandes questions, les leaders se gardent de donner leur stratégie. Les mêmes questions agitent pourtant la France. Mais là, on s’efforce à coups d’argumentaires de construire une alternative crédible. La sécurité et l’emploi, élevés en thèmes de campagne électorale, sont des sujets sur lesquels les hommes politiques de l’Hexagone entretiennent un débat permanent. Ceux qui en débattent en ont souvent une perspective éclairée par une expertise respectable. Parce que l’élite politique s’est préparée à sa carrière par des études plus ou moins pointues ou une solide expérience. On n’est pas élite pour rien ! Au Sénégal, par contre, notamment depuis 2000, une forte personnalisation du débat politique compromet le dialogue des programmes. Résultat ? Les alliances politiques sont tributaires de la conjoncture politique gouvernée par une seule consigne, le départ du président de la République. Invité de l’émission « Grand Jury » de la radio Rfm, le secrétaire général du Ps en avait fait l’aveu… d’impuissance : « Il faut que nous rompions avec ce qu’on a fait jusqu’à présent. Ce qu’on a fait jusqu’à présent c’est de dire Tout sauf (Abdou) Diouf. Nous ne disons pas Tout sauf (Abdoulaye) Wade. Nous allons dire aux Sénégalais : Si vous nous faites confiance, voilà nous ce que nous vous proposons ». Des propos qui résonnent en écho de ceux du Parti de la réforme d’Abdourahim Agne. Lui qui, justifiant son départ de la Cpa, lançait à propos des alliances qu’elles sont « construites autour des enjeux de positionnement politique et de pouvoir, souvent paradoxales dans les affinités et dans la constitution. Elles n’ont jamais été que politiciennes ». Jusque-là, le débat refuse de prendre de la hauteur.

Felix DIAGNE

futurs_president_senegal

3 Commentaires

  1. TRes pertinente comme analyse messieur Diagne.C’est choquant de voir nos politiques rabaisser le debat jusqu’au cannivaux.C’est a ce demander si le patriotisme s’est exile de nos coeurs.Vivement qu’on vous entende bien pour qu’enfin axer le debat autour des politiques de developpement.Encore une fois bravo ca donne de bonnes raisons d’esperer

  2. État de droit, gouvernance vertueuse, transparence, etc. à l’épreuve des faits.
    « Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde. »

    Un recteur qui ignorait royalement l’autonomie des structures et les lois du Sénégal, avec une gestion hors norme tant décriée par les syndicats et des citoyens de tous bords se retrouve nommé Ministre de l’Enseignement Supérieur de la Recherche, sans autre forme de procès. Les faits avérés qui lui sont reprochés sont d’une telle gravité qu’il ne doit certainement son « salut » (c’est temporaire, car un jour chacun rendra des comptes, ces anciens amis du PDS ne diront pas le contraire) que grâce la transhumance du PDS à l’APR à la 25ème heure. Les « amis » avant la patrie.

    Sauvons nos universités publiques du naufrage.
    (leral.net 9 oct. 2012 de Citoyen)

    Malgré les moyens substantiels mis à la disposition de l’enseignement supérieur de notre pays, les résultats sont qualitativement et quantitativement loin des normes de l’UNESCO. Nos instituions d’enseignement supérieur ont surtout un problème de management ([b]mal gouvernance, corruption, népotisme, dépenses de prestige, gestion solitaire en lieu et place de la gestion démocratique et légale, non respect des lois et des règlements, etc.[/b]) avec la complicité active ou passive de la communauté universitaire ([b]avantages indus, intimidations, etc.[/b]), des autorités étatiques qui, jusqu’à présent, feignent de ne rien savoir (n’ont-ils pas les moyens de savoir ce qui se passe ?) pour éviter la confrontation avec ceux (les amis politiques !) qui sont nommés à la tête de ses structures et qui agissent parfois comme des monarques en gérant la chose publique à leur guise.

    Face à la démission de l’État, nos universités croulent sous le poids de dettes dues aux créanciers (banques, hôpitaux, Sonatel, Senelec, SDE, fournisseurs divers) et chaque corporation s’évertue à demander toujours plus pour « améliorer ses conditions d’existence » et parfois au détriment des intérêts de la communauté. Ainsi donc, la crise est donc une conséquence logique de l’inaction de l’État.
    En effet quand les dirigeants (nommés par les autorités) gèrent la chose publique en dehors des normes établies sans être inquiétés le moindre du monde (pour ne pas dire promus à des stations plus juteuses), les syndicats demanderont des chosent hors normes et c’est le début du CHAOS.
    A l’État de faire l’état de la gestion de ceux qu’il a nommé, punir ceux qui se sont montrés indélicats et récompenser les autres, ensuite il serait facile de demander aux syndicalistes de faire preuve de mesure et enfin sévir dans le respect de la loi si de besoin. Il est temps de restaurer l’État de droit (et donc des devoirs) ; il est indispensable, avant toute promotion, d’étudier sérieusement la gestion présente et passée du pressenti.

    L’État ne peut continuer à protéger et promouvoir ceux qui mettent à genoux nos institutions d’enseignement supérieur et jeter en pâture les syndicats. Je pense que les responsabilités sont partagées.
    Des assises de l’Éducation avec ceux qui bloquent le système pour des raisons personnelles ou émotives ne serviraient à rien, je proposent des assises des anciens (Recteurs, Professeurs ou hauts cadres à la retraites) du système pour faire des propositions objectives. Il est souvent difficile d’être juge et parti.
    Il n’est jamais trop trad pour bien faire un devoir citoyen.

    ———————-kathior, 24 novembre 2012 00:18 de nettali —————-
    DÉCLARATION SAES

    La section SAES-UGB s’est réunie en AG ce jeudi 11 octobre 2012 en vue d’évaluer la situation qui prévaut en interne au sein de notre institution universitaire.
    Devant le constat :
    d’une situation générale de mal gouvernance,
    de non fonctionnement des structures et directions démultipliées,
    de non respect des textes universitaires,
    de mauvaise gestion des deniers publics alloués à l’UGB,
    de la dégradation des conditions de travail,
    de recrutements massifs et clientélistes de personnels non prévus dans le budget en cours,
    de retard dans le paiement des salaires et de retenues sur salaires non versées.
    L’Assemblée Générale de Saint-Louis condamne avec la dernière énergie le mode actuel de gestion du Recteur Mary Teuw Niane….

    L’Assemblée générale, note avec indignation, désolation et amertume que le Recteur de l’UGB n’a respecté aucun des engagements qu’il avait pris lors de ses dernières rencontres avec le bureau de la section SAES.
    Ainsi, l’AG exige :
    le respect des textes en vigueur sur le recrutement de personnels enseignants non titulaires,
    le paiement sans délai de toutes les sommes dues :
    Heures Complémentaires du second semestre,
    perdiem de voyage d’études aux ayant droits restants,….
    le versement effectif des prélèvements opérés sur les salaires des enseignants au profit de certaines institutions financières,
    le paiement effectif des sommes dues aux institutions sanitaires,
    L’AG regrette la lecture partielle ou contextuelle que le Recteur fait des textes qui nous régissent. Elle insiste sur l’urgence de la situation désastreuse dans laquelle se trouve l’UGB et interpelle les pouvoirs publics sur la nécessité d’auditer les fonds alloués.
    Nous restons mobilisés pour la sauvegarde et la défense de notre institution.
    Vive l’Université sénégalaise, vive le SAES.

    Fait à Saint-Louis le 12 octobre 2012.
    L’Assemblée Générale
    ————-
    SYNTUS (Syndicat des travailleurs de l’UGB de Saint louis).
    Saint Louis, 22/06/2012.

    APPEL A LA COMMUNAUTÉ CONTRE LES DÉRIVES D’UNE GESTION SOLITAIRE.

    Depuis quelques années la gestion solitaire, le subjectivisme, le népotisme et les règlements de compte sont monnaie courante a l’UGB. Dans la vie des établissements ( UFR LSH, CCOS…) comme dans la gestion des ressources humaines (recrutement, traitement salarial, nominations) les exemples ne se comptent plus. Retraits de prérogatives, mises en quarantaine et tentatives d’humiliation sont le lot de ceux et celles qui qui refusent de marcher au pas et qui ont osé faire face.

    LE SYNTUS FERA FACE COMME PAR LE PASSE.

    Nous avons toujours préfère le dialogue social constructif a la confrontation. C’est pourquoi depuis la tentative avortée de licenciement dont certains de nos camarades ont été victimes en 2010 et toutes les tentatives vaines de déstabiliser notre syndicat, nous avons voulu rester sereins et positifs.
    Seulement la récidive dans l’irrespect et le manque de considération à l’ endroit des travailleurs y compris certains de ces collaborateurs attitres, du Recteur, mettent gravement en péril la gestion démocratique et la justice sociale.
    C’est pourquoi sentinelle au service exclusif de l’institution, le SYNTUS est résolu a faire face pour réinstaller la confiance et la joie de travailler ensemble toutes composantes confondues au développement concerté de l’UGB.

    VIVE LES SYNTUS, VIVE L’UGB.
    L’Assemblée générale
    _

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