Le Sénégal a plus que jamais besoin d’une union solide entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel. CHeikh A.B.Bousso

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Le pays traverse aujourd’hui une étape décisive dans son histoire. Les élections législatives à Touba en sont la preuve vivante.
L’Etat a une obligation à la foi positive et négative en ce qui concerne l’organisation et le bon déroulement des élections. Positive du fait que c’est à lui qu’incombe l’obligation et le devoir de prendre toutes les dispositions nécessaires pour la bonne tenue des scrutins. Une obligation négative du fait que l’Etat doit s’abstenir de tout ce qui pourrait constituer une atteinte à son bon essor.
Il s’agit là pour le citoyen de l’exercice d’un droit fondamental, inviolable et même sacré dans une République telle que la nôtre, un droit civil et politique de la première génération.
Pour l’Etat, c’est l’une des plus importantes organisations qu’il a à connaitre durant toute son existence. Par conséquent, tous les moyens sont mis à sa disposition par son créancier qui est le peuple, pour satisfaire à bien ses attentes et besoins. L’Etat se trouve ainsi dans une posture de débiteur, un débiteur condamné à réussir, il n’y a pas d’alibi valable pour justifier un quelconque manquement ou irrégularité en matière organisationnelle.
De ce fait, si de tels manquements sont constatés malgré les pouvoirs et les moyens conséquents que dispose l’Etat, des hypothèses sont de ce fait envisageables.
Assiste-t-on à un changement de stratégie du pouvoir temporel dans sa politique face au spirituel ?
Le fait par le chef de l’Etat de dire que « les chefs religieux sont des citoyens ordinaires » n’est pas du tout anodin et ceux qui au moins comprennent l’histoire de ces deux pouvoirs ainsi que la jalousie ou, je dirais, la rivalité qu’ils ont toujours connues sauront, bien évidemment, le sens et le contenu de cette petite phrase bourrées d’insinuations.
Il s’agissait bien sûr d’une stratégie de banalisation non seulement du rôle, mais également de la personne du religieux aux yeux des disciples. En tant que juriste et techniquement parlant, on connait bien sûr ce que cela veut dire « citoyen simple », mais quand on connait un peu d’histoire, il nous est indispensable de dépasser l’aspect technique des concepts et d’avoir une perception critique des choses.
Cette stratégie de banalisation ne semble pas fructueux aux yeux de l’exécutif, puisque cela a suscité chez nombreux de nos concitoyens un sentiment d’être vexés par ces propos du chef de l’Etat le président Sall, jugés outranciers et excessifs à l’endroit de notre patrimoine non seulement religieux, mais également culturel.
Mais qui connait l’Etat et le délice du pouvoir saura que cela ne le désarme pas pour atteindre ses objectifs politiques et faire face à des potentiels adversaires et menace, à plus forte raison, quand il s’agit d’une perspective électorale devant lui. Ce qui s’est passé à Touba montre aisément une mutation de stratégie du pouvoir. Si la première était jugée outrancière, excessive et vexante la seconde est tout simplement pitoyable. Il s’agit maintenant d’une tentative d’isolement galopant de la ville de Touba, faire de la cité religieuse une ville à part. Une ville où il est impossible d’organiser des élections, une ville où ses habitants ne se soumettent pas aux lois de la République.
Tout ceci consiste à diaboliser une communauté entière et à ternir son image aux yeux des populations. L’Etat avec les moyens conséquents qu’il dispose n’a pas hésité à priver une ville entière son droit le plus fondamental et absolu (le droit de vote) en sabotant tout simplement la tenue des élections et en voulant l’endosser aux populations qui ont, soit disant, saccagé des bureaux de vote. Si tel était le cas, pourquoi la machine judiciaire n’est pas mise en marche pour appliquer et dire ce qui de droit ? Pourquoi les supposés saccageurs ne sont pas inquiétés, arrêtés et traduits devant la justice ?
L’Etat doit revoir sa stratégie, gouverner ce n’est pas banaliser où diaboliser pour atteindre des objectifs politico-politiciens, ce n’est pas par ce procédé que l’Etat devient plus fort. Ces deux pouvoirs vont de pair, dans un pays comme le nôtre, ils se complètent. « Gouverner c’est prévoir » « il n’y a rien à gagner à transiger avec l’erreur ou l’injustice » dixit un grand auteur.
Ces législatives montrent clairement à quel point le pays est plus que jamais divisé. Elles montrent l’intensité de la tension dormante au sein des populations. C’est à ce moment difficile et fragile que la nation a besoin d’une union forte entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel.
Le rôle du chef religieux ne se limite pas à des élections représentatives, partielles et partiales, il est beaucoup plus important, il s’agit du rôle de régulateur social, il s’agit de servir l’intérêt suprême qui est celui de la nation, sans pour autant se focaliser sur l’appartenance ethnique, confrérique où confessionnelle de celui qui incarne cet intérêt pour bénéficier d’un probable soutien. Pour que cela se matérialise il faut qu’on se centralise sur les projets et les idées que tel ou tel candidat porte pour l’avenir de notre cher pays.
Ne trahisons pas les mémoires de nos chers défunts guides religieux mourides, Serigne Fallou et Cheikh Abdoul Ahad Mbacke qui dans leur époque avaient l’intelligence de privilégier l’intérêt du pays au détriment de l’appartenance religieuse ou confrérique des hommes politiques de leur ère.
Faute de quoi, la haine et le repli sur soi gangrèneront notre cher pays qui doit se pencher vers d’autres défis plus posés.
Pour éviter que ce qui s’est passé se reproduise, il faut une réflexion approfondie et inclusive qui réunira toutes les parties autours de la même table, oser dire les mots tel que S Abdoul Ahad le faisait avec le président Diouf en mettant le doigt où ça fait mal, désobéir aux lois iniques, s’il le faut, pour faire triompher la vérité et enfin, se libérer de la légalité pour accéder à la légitimité.

Cheikh Ahmadou Bamba Bousso
Bordeaux, France

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