L’Ecole publique sénégalaise doit absolument sortir du cycle chaotique et traumatisant !

Date:

«L’éducation est l’arme la plus puissante qu’on puisse utiliser pour changer le monde»
Nelson MANDELA

Il me plait, à la suite de l’expiration de l’ultimatum du Comité du Dialogue Social/Secteur Education-Formation lancé aux acteurs de l’école, au cours de sa 5e session ordinaire tenue à Saly, pour la finalisation et de la signature du protocole d’accords entre Gouvernement et syndicats d’enseignants, de revenir sur les conclusions des ces importantes assises, de dresser la méthodologie et le déroulement des négociations, de comprendre les points d’achoppement et de formuler des propositions en vue d’installer une paix durable dans l’espace scolaire.

Les longues séries de négociations

Voilà bientôt deux ans qu’au milieu d’une année scolaire tumultueuse en proie à une longue grève des enseignants, accentuée par l’indifférence du gouvernement d’alors, plus préoccupé par des questions électorales que par la destinée de l’école publique sénégalaise, le Cadre Unitaire des Syndicats d’Enseignants (CUSE) décidait de suspendre son mot d’ordre de grève en mi-février 2012, de participer au réaménagement du calendrier scolaire et à l’organisation des examens. Les promesses et engagements des actuels tenants du pouvoir avaient entre autres raisons fini de convaincre des organisations comme la nôtre à sauver une année scolaire que tous les observateurs avertis qualifiaient de déjà perdue. De juillet 2012 à ce jour, les syndicats d’enseignants se sont engagés avec les gouvernants actuels dans des négociations interminables.

A la séance d’ouverture des négociations tenue le 13 juillet 2012, la délégation gouvernementale, sous la conduite du Ministre de la Fonction publique, du Travail, du Dialogue social et des Organisations professionnelles, a présenté aux partenaires sociaux un document de travail comprenant trois rubriques : accords réalisés, accords en cours d’étude et questions nouvelles.

L’assemblée plénière, après avoir passé en revue le document, a mandaté une commission bipartite pour sa stabilisation. Réunie le mercredi 18 juillet 2012, la commission, au terme de ses travaux, a proposé un document stabilisé comportant quatre rubriques : accords réalisés, accords en cours de réalisation, accords en cours d’étude et questions nouvelles. Aussi elle a réparti les questions nouvelles dans les différentes commissions. La 2e séance plénière a validé, le 27 juillet 2012, le rapport de la commission bipartite relatif à l’inventaire des différents points de revendications introduits par les syndicats et leur répartis entre les commissions «Statut et carrière», «Finances», «Pédagogique» et Habitat». En outre, il a été demandé à chaque commission d’examiner les points stabilisés et de faire des propositions en direction de la prochaine plénière. C’est ainsi que les 31 juillet et 7 août les séances de travail des Commissions ont eu lieu autour des ministères concernés conformément au mandat issu de la deuxième plénière. Chaque commission a examiné les points de revendications qui lui avaient été soumis.

A la 3e séance plénière de négociations du 5 octobre 2012, alors que la partie syndicale s’attendait à des arbitrages sur les questions qui n’ont pas fait l’objet de consensus lors des travaux des commissions, le gouvernement a préconisé la mise en place d’une Inter-commission bipartite chargée de réexaminer de manière approfondie les points revendicatifs contenus dans les quatre rapports des commissions. Après une série de réunions organisées le mercredi 17, les mardi 23 et 30 octobre et les mardi 6 et 13 novembre 2012), sous la présidence du Directeur général de la Fonction publique, en présence des représentants des ministères concernés et des plénipotentiaires des syndicats d’enseignants, l’Inter-commission est parvenue aux conclusions déclinées dans un rapport général. Pour étudier ces conclusions et formuler des recommandations visant à accélérer le processus de leur mise en œuvre, le CUSE a organisé une journée d’étude le mardi 27 novembre 2012.

Mais il a fallu attendre le 13 mars 2013 pour que la 4e séance plénière soit convoquée. Sans doute, le Ministère de la Fonction publique était plus préoccupé par le déroulement de l’audit physique et biométrique des agents de l’Etat initié en cette période. Malheureusement, cette rencontre tant attendue ne parviendra pas à décrisper la situation. En effet, le gouvernement, en se refusant à formuler des propositions acceptables sur les questions nouvelles et en tardant à concrétiser les points d’accord des différents protocoles et à boucler les négociations, le gouvernement s’écartait de la voie qui mène à une année scolaire paisible. A noter que ce fiasco, qui a conduit la partie syndicale à se retirer de la concertation, est la résultante de l’impréparation et du manque d’harmonisation dont a fait montre la délégation gouvernementale. Dans le même temps, les syndicats d’enseignants, regroupés dans le grand cadre et plus que déterminés, déroulent leur 1er plan d’action en observant une grève les 19 et 20 mars 2013. Pour corriger les maladresses notées au cours de la dernière rencontre, le gouvernement a convoqué la 5e séance plénière le 22 mars 2013. Cette fois, le Ministre de la Fonction Publique, a tenu à préciser que le Gouvernement a fini d’approfondir la réflexion sur les revendications des enseignants et a proposé notamment:

Valider aux 2/3 les années de volontariat, de vacation et de contractualisation des enseignants titularisés comme fonctionnaires sans paiement de rappels, avec un différé d’un an.
Faire une étude sur les systèmes de motivations et de rémunérations des agents de l’Etat pour donner suite aux revendications sur les revendications portant sur les éléments de salaires (indemnités de logement, indemnité documentaire compensatoire de surcharge horaire, prime scolaire, indemnités des Inspecteurs de l’Enseignement Moyen et Secondaire, etc.). Toutefois, le principe d’annualiser le salaire des vacataires est accepté.

Poursuivre l’immatriculation des MC et des PC au niveau de l’IPRES (23 499 agents ont été déjà immatriculés).
Attendre le vote des nouvelles lois sur l’enseignement supérieur pour l’application des réformes sur la Formation déconcentrée, les Passerelles professionnelles et les Corps des administrateurs scolaires. Le Gouvernement, se bornant à ces propositions, refuse d’accéder à la demande des syndicats qui souhaitait un peu plus d’effort pour parvenir à la pacification de l’espace scolaire. Néanmoins, ces derniers demandent une suspension de séance en vue d’étudier ces nouvelles propositions. Toujours est-il que le grand cadre des syndicats d’enseignants, faisant preuve de bonne volonté et privilégiant le dialogue et la concertation, transmis par lettre en date du 22 avril 2013 transmis au gouvernement une fiche technique contenant la plateforme minimale composée de onze (11) points et les attentes des organisations syndicales de l’enseignement en perspective de la 6e séance plénière du 29 avril 2013. Il y a lieu de signaler que cette plateforme a été déclinée avec des indications précises sur les niveaux d’exécution et de blocage, les actions à initier et les échéances. En conséquence, les syndicalistes attendaient des réponses concrètes du gouvernement sur l’ensemble des questions inscrites constituées en majorité d’accords déjà signés. Mais le gouvernement s’est limité aux propositions qu’il avait déjà formulées sans aucune précision sur les délais d’exécution.

Consciente que la mobilisation et la détermination demeurent des voies incontournables pour préserver les acquis du mouvement syndical et stabiliser l’espace scolaire, la Coalition des Syndicats d’Enseignants décrète des journées de débrayage et de grève totale les 14, 22, 28 et 29 mai 2013 dans le cadre de leur 2e plan d’action. En plus des manifestations organisées à l’intérieur du pays, une Marche nationale le mardi 28 mai 2013 à Dakar.

La Coalition des Syndicats d’Enseignants réunie le jeudi 30 mai 2013, à l’effet d’évaluer le deuxième plan d’actions et de dégager de nouvelles perspectives pour la satisfaction de sa plate forme minimale, constate une fois encore le mépris du gouvernement. Toujours est-il que le grand cadre, fort de la dynamique de lutte antérieure, lance son 3e plan d’action qui s’articule comme suit : débrayage le mardi 04 juin à partir de 10 heures et grève totale les mercredi 05 et jeudi 06 juin 2013. Au surplus les syndicalistes recommandent à tous leurs camarades militants de l’école sénégalaise d’observer scrupuleusement le mot d’ordre de la rétention des notes et des informations administratives dans toutes les institutions scolaires.

Finalement, le mardi 25 juin 2013, le Ministre de l’Education nationale rencontre les représentants des organisations syndicales pour échanger sur la situation scolaire. Cette rencontre fait suite à celle du 06 mai 2013, au cours de laquelle il avait été proposé aux organisations syndicales, soit de mettre à la disposition du Ministère leur évaluation du coût de la revendication portant sur la validation des années de volontariat, de vacation, et de contractualisation, ou de procéder à cette évaluation en liaison avec les services compétents du Gouvernement. Les deux parties ont convenu d’examiner les onze points contenus dans la plateforme minimale, d’explorer ensemble des pistes de solutions et de soumettre les conclusions à l’attention de Monsieur le Premier ministre.

Réunis en séance plénière ce mercredi 26 juin 2013, les Secrétaires généraux de la Coalition des Syndicats d’Enseignants après avoir procédé à l’analyse approfondie de la situation de l’école sénégalaise ont décidé de suspendre provisoirement le mot d’ordre et à participer aux examens de fin d’année tout en demandant au Gouvernement d’apporter, dans les plus brefs délais, des réponses appropriées aux revendications justes et légitimes, notamment celles contenues dans la plateforme minimale ;

Cette décision a été motivée d’une part, par les conclusions issues de la dernière rencontre avec le Ministre de l’Education et les avancées notées relativement à la validation des années de volontariat, de vacation et de contractualisation, à l’annualisation du salaire des vacataires, aux diverses indemnités ainsi qu’aux lenteurs administratives ; d’autre part à l’appel solennel du Président de la République à tous les acteurs du système éducatif pour un dépassement dans l’intérêt exclusif de l’école. Le vendredi le 05 juillet 2013 le Ministre reçoit à nouveau les représentants des syndicats d’enseignant pour leur faire le compte rendu de l’audience avec Monsieur le Premier ministre qui s’est déroulée en présence des représentants des ministères impliqués dans les négociations. Il ressort de la réunion que toutes les conclusions issues de la rencontre du 25 juin 2013 ont été validées.

Dès lors, on s’acheminait logiquement vers la rédaction du protocole d’accord. Le comité mis en place à cet effet se réunit pour décliner le rapport général de l’inter commission et les conclusions de la plateforme en projet de protocole d’accord. La 7e session plénière a été convoquée le 23 août 2013 pour la signature du protocole d’accord. Cependant, la mouture présentée fera l’objet d’amendements. La commission de rédaction du protocole conformément au mandat de la séance plénière s’est réunie les 30 août et 24 septembre 2013 pour finaliser le document. Ce dernier qu’on croyait définitif a hélas fait l’objet de réserves émises par une partie de la délégation gouvernementale ; ce qui retarde sa signature. Au cours de cette dernière rencontre, la délégation syndicale a tenu à marquer son accord à la mouture qui lui a été présentée et a sollicité la convocation de la séance plénière en vue de procéder à la signature du protocole avant la rentrée des classes et la tenue de la 5e session du CDS/SEF. Lorsque que les acteurs se sont retrouvés à Saly pour réfléchir sur les conditions de pacification de l’espace scolaire, ils ont recommandé principalement la signature du protocole avant fin novembre.

Le 29 novembre 2013 le Ministre de l’Education a convié les secrétaires généraux de syndicat d’enseignants, en présence d’autres partenaires sociaux autour, à échanger d’informations sur la rentrée scolaire. Interpellé sur le protocole, le Ministre a déclaré qu’il reste attaché à la ligne définie ensemble lors de la rencontre du 05 juillet 2013. L’échéance a expiré hélas sans que le protocole d’accord ne soit signé. Malgré l’engagement réitéré de la tutelle et les directives du Premier Ministre Abdou MBAYE, il y a encore des blocages qui nous amènent à nous poser des questions. Le principe de collégialité du Gouvernement est-il toujours en vigueur ? Pourquoi tarde-t-on à exécuter les arbitrages du Premier Ministre ? En tout état de cause le nouveau Premier Ministre est interpellé.

Le point d’achoppement : la validation

Nous voudrions rappeler au Gouvernement que la neutralité étant un des piliers de la Fonction publique, il ne peut refuser aux fonctionnaires ce qu’il a accepté pour les décisionnaires alors que nombreux sont les jeunes enseignants qui ont fait un long et pénible parcours avant d’accéder à ces statuts. En 1992, pour pallier la pénurie d’enseignants notamment dans le moyen-secondaire, le Gouvernement du Sénégal, de façon cavalière, a initié la politique de recrutement de professeurs vacataires. Des enseignants sont recrutés sur la base d’un diplôme académique et envoyé dans les classes sans formation initiale. Payés à l’heure, n’ayant aucun contrat et ne bénéficiant d’aucune indemnité, le vacataire est souvent muté dans des zones reculées, sans assistance aucune pour servir de bouche-trou.

A suivre

M. Ndiaga SYLLA, Secrétaire Général National de l’ADEPT
Ancien Membre du bureau du CDS/SEF et Rapporteur général de la 5e session Email : [email protected]

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

CAN 2023

DEPECHES

DANS LA MEME CATEGORIE
EXCLUSIVITE

Assemblée nationale : Échanges téléphoniques entre Macky Sall et les députés de Benno Bokk Yakaar

XALIMANEWS-L’ancien chef de l’Etat, Macky Sall a eu une...

Les ministres déchus : L’espoir brisé de retourner à l’assemblée nationale

XALIMANEWS-Des ministres ayant cédé leur siège de député pour...