Pénurie d’eau : négligence ou malédiction? par Karfa Sira Diallo

Date:

Faut-il en rire ou en pleurer ? Une nouvelle tête hallucinée et déshydratée vient de pousser du maléfique dragon qui hante le sommeil des enfants sénégalais. Encerclées depuis presque une dizaine d’années par des trombes d’eau laissées par des inondations récurrentes, meurtrières et manifestement insolubles, Dakar et sa banlieue, privées d’eau courante depuis treize jours, descendent dans la rue pour rappeler au pouvoir ses promesses de croissance (Yokkute).

«La chair qu’en moi je porte
S’habitue à toutes les morts vécues
A la prison d’eau qui l’encercle
A la vapeur à la quête de la moindre goutte »
Matins Noirs, 2011

Si la pénurie d’eau est un phénomène mondial redouté par les Nations Unies qui ont fait de 2005-2015, la décennie internationale d’action pour résoudre les déséquilibres nés d’une inégale répartition de ce précieux liquide, au Sénégal c’est plutôt à la négligence et à l’irresponsabilité de nos dirigeants qu’il faudra chercher les causes du drame qui secoue le pays.

Après les pénuries d’électricité, de gaz, de pain, de riz, voici venu le temps de l’eau. Ce précieux liquide, unique et dernier euphorisant, autorisé par Dieu et promis par la République, d’une existence que des dirigeants désordonnés ont fini de rendre aussi insipide et désespérément asséchée.

Les discours tenus respectivement par les responsables de la SDE, chargée de la production et de la distribution (Sénégalaise des Eaux) et par les représentants du gouvernement frisent le ridicule voire l’irresponsabilité.

Le fatalisme de la pensée magique. Cette si utile opium du peuple, allant jusqu’à saisir même le Premier Ministre qui se cache derrière Dieu « nous sommes croyants et patients » pour cacher les insuffisances du pouvoir actuel. Et sa menace d’éventuelles sanctions, à l’endroit des responsables de la distribution d’eau « Les responsabilités seront situées et des sanctions seront prises… », ferait sourire s’il ne s’agissait de son baptême de feu. Récemment nommée Premier Ministre, Aminata Touré fait face à sa première crise sociale avec la naïveté d’une débutante « Lorsque l’État a décidé de passer la distribution de l’eau à des privés, on ne s’attendait pas à ce type de situation » dit-elle sur la RTS.

Quant au même moment, la SDE et son ministre de tutelle, Pape Diouf, se contredisent à coups de communiqués dont la lecture attentive révèle le désarroi d’une société et d’un pouvoir adeptes du rafistolage et du pansement.

Et la cause de tout ce remue-ménage. L’objet qui met à nu et à genou le Sénégal n’est autre, selon la Sénégalaise des Eaux (SDE) qu’un petit tuyau qui mesure 85 mètres de long et 1,20 mètre de diamètre dont la rupture inopinée et imprévue entraine cette regrettable pénurie.

En se lançant bille en tête dans les audits des finances publiques et la traque des biens mal acquis, le pouvoir n’aurait –il pas mit la charrue avant les bœufs ? Principale et pratiquement unique réalisation, d’ailleurs inachevée, du nouveau régime, l’assainissement de la gestion des finances publiques par les anciens dignitaires était t-elle une priorité eu égard au diagnostic unanime de la nécessité d’auditer l’ensemble des secteurs névralgiques du pays?

Viciée par les marchés de gré à gré, par une privatisation non maîtrisée, par l’absence de mécanismes de contrôle, de suivi et de maintenance des projets et infrastructures, la société sénégalaise paye aujourd’hui la précipitation du nouveau pouvoir et son mauvais calcul politicien reposant sur une vengeance et une liquidation maladroites de ses adversaires d’hier.

L’urgence, au Sénégal et ailleurs, n’est pas politique. Elle est sociale et économique d’abord. Laissées pour compte par les politiques publiques, abandonnées par la rénovation urbaine, les populations défavorisées de Dakar, de déceptions en privations, semblent revivre la fin de règne du Président Abdoulaye Wade.

Et les conseillers du Président Macky Sall auraient été bien inspirés de lui conseiller de rester à Dakar. Sa présence aux Nations Unies pendant que le peuple souffre est incongrue.

Karfa Sira Diallo

senenews.com

1 COMMENTAIRE

  1. En tout ma conviction est que nous devons aujourd’hui prendre conscience que tout ceux qui ont gouverné ce pays depuis les indépendances n’ont rien fait. Ils est temps qu’il se retirent tous de la gestion du pays avec des mots d’excuse pour le peuple qui les enrichi comme pas possible. En effet, comment comprendre que des gens qui ont hérité du colon un pays très en avance sur tous les autres de l’Afrique et dans tous les domaines, ont pu le transformer en un pays qui est devenu le dernier de la classe avec des infrastructures inexistantes, un secteur économique en lambeau, un secteur de la santé mourante, des coupures d’électricité quotidiennes et maintenant des coupures d’eau. Finalement es ce qu’il n’est pas temps de demander des comptes à ces gens qui continuent à ‘accrocher au pouvoir. En tout cas ma conviction est que ce que quelqu’un n’ pas pu faire en plus de 40 ans de pouvoir, il ne le fera pas au crépuscule de sa vie et il est temps de convoquer ces gens et de les mettre face à leur responsbilité car tout ce qui nous arrive aujourd’hui est de leur faute. Sur ce, WASSALAM

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

CAN 2023

DEPECHES

DANS LA MEME CATEGORIE
EXCLUSIVITE

De la saine définition des priorités (par Amadou Tidiane Wone)

En ce 21ème siècle, et dans plusieurs domaines de...

Les transhumants (Par Makane)

Du camp défait par les urnesEn rangs épars, temps...

Assemblée nationale : Échanges téléphoniques entre Macky Sall et les députés de Benno Bokk Yakaar

XALIMANEWS-L’ancien chef de l’Etat, Macky Sall a eu une...