Par Cheikhou Oumar Sy et Theodore Cherif Monteil, anciens parlementaires
Au moment où les Sénégalais ploient sous le poids d’une crise économique sans précédent, le gouvernement semble vivre dans une autre réalité. Les familles, elles, affrontent chaque jour des arbitrages insoutenables : payer le loyer ou nourrir les enfants, honorer leurs obligations scolaires ou régler la facture d’électricité et de l’eau, tout en subissant une pression fiscale galopante imposée au nom d’un prétendu Plan de Redressement Économique et Social (PRES).
Ce plan, loin de redresser quoi que ce soit, agit comme une pompe à ressources, soutirant le peu de moyens financiers encore disponibles dans les poches déjà épuisées des citoyens. Pendant ce temps, l’État, au lieu de réduire son train de vie, augmente son budget et ses dépenses, aggravant ainsi le déséquilibre entre gouvernants et gouvernés.
Ce qui choque davantage, c’est le paradoxe d’un Premier ministre qui reconnaît publiquement une crise économique majeure, tout en convoquant un TéraMeeting politique au moment même où les Sénégalais vivent une TéraCriseSocialetÉconomique. Cette dissonance entre le discours et la réalité traduit une perte totale de sens des priorités publiques.
Une dette publique devenue abyssale
Le Sénégal est désormais le pays le plus endetté d’Afrique, avec un ratio d’endettement public réévalué à 132 % du Produit Intérieur Brut (PIB). Ce chiffre, qui dépasse largement les seuils de soutenabilité recommandés par les institutions financières internationales, témoigne d’une mauvaise gouvernance budgétaire chronique et d’une dépendance accrue à la dette extérieure. Cette situation compromet gravement la souveraineté économique du pays, puisque chaque franc collecté par l’État sert davantage à rembourser la dette qu’à financer les services sociaux essentiels : santé, éducation, emploi. Le poids de la dette est aujourd’hui une véritable hypothèque sur l’avenir des générations futures.
Une crise sanitaire qui s’ajoute à la crise économique
À cette crise économique et sociale s’ajoute désormais une crise sanitaire d’une extrême gravité : la fièvre de la Vallée du Rift, maladie zoonotique transmise par les moustiques, sévit dans plusieurs zones du pays, touchant non seulement les populations rurales mais aussi les éleveurs et les marchés à bétail. Cette épidémie, qui affecte à la fois la santé humaine et animale, risque d’avoir des conséquences économiques et alimentaires désastreuses, notamment dans un contexte où le prix de la viande et du lait flambe déjà.
Pendant que les populations attendent des réponses d’urgence et des campagnes de prévention efficaces, le gouvernement préfère mobiliser ses énergies dans des shows politiques, laissant les véritables urgences nationales dans l’ombre.
Quand la communication supplante la gouvernance
Comment justifier la mobilisation de moyens colossaux pour des démonstrations politiques, alors que les hôpitaux manquent de médicaments, les écoles sont dégradées, et que les entreprises locales étouffent sous la pression fiscale et énergétique ?
Le contraste est d’autant plus saisissant que le pays est en pleine session budgétaire : un moment où l’effort national devrait être orienté vers la sobriété, la relance productive et la justice sociale, non vers la communication politique à grand spectacle.
Le Sénégal n’a pas besoin d’un TéraMeeting, mais d’un TéraPlan d’action économique et social, d’un TéraProgramme de soutien aux ménages et aux PME, d’un TéraDialogue sur la gouvernance économique, bref, d’une vision lucide et courageuse face à la réalité.
Le peuple ne demande pas la lune, il demande simplement de pouvoir vivre dignement et en paix, dans un pays où le leadership se mesure non à la foule rassemblée, mais à la capacité de soulager les souffrances collectives.
Dakar le 3 Novembre 2025


