Quelques jours après avoir présenté à Dakar le Plan de redressement économique et social “Jubbanti Koom”, le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko entame, du 6 au 10 août 2025, une visite officielle en Turquie, à l’invitation du président Recep Tayyip Erdoğan. Cette étape diplomatique majeure s’inscrit dans la logique de l’Agenda national de transformation “Vision Sénégal 2050”, qui ambitionne de repositionner le Sénégal sur les rails de la souveraineté économique et de l’industrialisation progressive.
Un déplacement stratégique dans un moment clé
Ankara n’est pas un choix anodin. Située à la croisée de trois continents, la Turquie occupe une place centrale dans les nouvelles chaînes d’alliance qui émergent au sein d’un monde multipolaire. Entre diplomatie d’influence, puissance industrielle et ambition géopolitique, le pays d’Atatürk est devenu un acteur incontournable pour nombre de pays africains en quête de partenariats alternatifs aux circuits occidentaux traditionnels.
Le Sénégal, qui cherche à diversifier ses partenariats économiques et réduire sa dépendance aux institutions financières internationales, voit en la Turquie un allié industriel de poids. En 2024, l’économie turque affichait un PIB nominal de 941 milliards de dollars, la classant au 20e rang mondial, selon les chiffres de l’OCDE.
Vers un partenariat économique renforcé
Dans ses valises, Ousmane Sonko emmène une délégation multisectorielle chargée d’explorer les possibilités de coopération dans plusieurs domaines clés : industrie, agroalimentaire, textile, infrastructures, tourisme, électronique et agriculture. Autant de secteurs dans lesquels la Turquie dispose d’une expertise reconnue et que le gouvernement sénégalais place au cœur de son programme de relance.
Cette visite vise à négocier des accords bilatéraux mais aussi à s’inspirer du modèle turc de développement industriel, basé sur la montée en gamme, l’autonomisation des PME, et un certain volontarisme étatique.
DEPECHES
Une convergence politique et culturelle
La visite s’inscrit également dans un cadre de coopération culturelle et diplomatique. Le Sénégal et la Turquie partagent des valeurs de solidarité sud-sud, ainsi que leur appartenance à l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI). Des échanges sont également prévus sur des dossiers de sécurité, de formation, d’enseignement supérieur et de défense, des domaines où la Turquie a multiplié ses interventions sur le continent africain ces dernières années.
Ankara, un test pour la diplomatie économique de rupture
Pour Ousmane Sonko, ce premier déplacement majeur hors du continent africain dans son rôle de chef de gouvernement est aussi un test : celui de sa diplomatie économique “de rupture”, qui entend replacer les intérêts stratégiques du Sénégal au centre des négociations bilatérales.
Face aux partenaires traditionnels, parfois accusés d’entretenir des relations inégalitaires, la Turquie offre un champ d’expérimentation pour une coopération plus symétrique, dans laquelle le Sénégal entend défendre des accords mutuellement avantageux.
