C’est un coup de tonnerre dans le paysage médiatique et judiciaire sénégalais. Deux journaux majeurs, Yoor-Yoor Bi et Libération, ont levé le voile ce vendredi sur l’identité présumée de l’homme derrière le tristement célèbre site Kocc Barma : El Hadji Babacar Dioum. Celui que l’on surnomme désormais « l’homme-mystère » serait à la tête d’un vaste système de chantage sexuel numérique, impliquant des milliers de contenus à caractère intime.
Une machination bien rodée
Selon les révélations du journal Yoor-Yoor Bi, plus de 9 000 fichiers ont été retrouvés, retraçant des paiements effectués par des victimes afin d’empêcher la diffusion de vidéos compromettantes. Les montants extorqués variaient entre 2 millions de francs CFA et 10 000 euros. Le dossier « Newgirl », au cœur de l’affaire, recensait à lui seul plus de 4 000 contenus à caractère sexuel, auxquels s’ajoutent 147 vidéos pornographiques organisées dans un répertoire spécifique.
Entre juillet 2017 et avril 2025, les sommes encaissées via ce système dépasseraient les 93 millions de francs CFA.
Un suspect récalcitrant
Libération complète l’enquête en offrant un aperçu troublant « dans la tête de El Hadji Babacar Dioum ». Refusant catégoriquement de signer le procès-verbal lors de son troisième interrogatoire, Dioum a affirmé n’avoir que des notions basiques en informatique. Il aurait également exprimé une opposition ferme à l’exploitation de son téléphone portable et de son ordinateur sans la présence de ses avocats. L’accusé s’est retranché derrière ses droits tout en déclarant : « Je me répète, je n’ai pas consenti à l’exploitation de mon ordinateur portable qui a été faite sans ma présence et celle de mes avocats. »
Une traque numérique de longue haleine
Les enquêteurs, qui poursuivent leurs investigations, ont retrouvé dans l’ordinateur de l’accusé des fichiers nommés « Newgirls », « SeneG », « cbz », « Nouveau dossier » ou encore des répertoires administratifs contenant des codes d’accès à des plateformes comme Seneporno et Bapimor. Ces éléments accréditent l’idée d’une structure bien organisée, opérant depuis plusieurs années dans l’ombre du web sénégalais.
Des centaines de victimes et une onde de choc
L’annonce de l’arrestation d’El Hadji Babacar Dioum a entraîné un afflux de témoignages de victimes présumées, qui se sont manifestées auprès de la Division spéciale de la cybercriminalité (Dsc) et du parquet. L’affaire prend une ampleur nationale, avec des répercussions profondes sur les débats liés à la protection de la vie privée, à l’éthique numérique et à la régulation des plateformes en ligne.
Une affaire emblématique
Ce scandale soulève des questions de fond sur la sécurité numérique, le consentement et l’impact du chantage sexuel à l’ère des réseaux sociaux. Si la présomption d’innocence demeure de mise, les preuves accumulées semblent accabler l’homme derrière Kocc Barma, longtemps insaisissable.
Le procès à venir promet d’être l’un des plus suivis de l’histoire judiciaire sénégalaise, révélateur des dérives de l’ère numérique et du pouvoir destructeur de la sextorsion.


