“Ubbi Tey, Jàng Tey” : Dix ans après, un concept qui a réveillé l’école sénégalaise

diatiger
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Lancée en 2015, la campagne “Ubbi Tey, Jàng Tey” portée par la COSYDEP a permis à plus de la moitié des écoles sénégalaises de démarrer les cours dès le premier jour de classe. Dix ans plus tard, malgré des résultats notables, des défis structurels freinent encore l’effectivité d’une rentrée réellement synchronisée sur tout le territoire.À l’origine, une idée simple mais ambitieuse : faire en sorte que chaque rentrée scolaire au Sénégal soit synonyme de début effectif des cours, dès le premier jour. “Ubbi Tey, Jàng Tey” – littéralement “Ouvrir aujourd’hui, apprendre aujourd’hui” – est née de ce constat amer : trop souvent, les classes s’ouvrent, mais l’enseignement tarde à suivre.

Dix ans après sa mise en œuvre, le directeur exécutif de la COSYDEP, Cheikh Mbow, se félicite des “résultats probants” : plus de 50 % des écoles démarrent effectivement les cours dès la rentrée. Pour lui, le concept est devenu “un baromètre, un processus, une ambition nationale” adoptée aussi bien par les autorités que par les communautés locales.

Mais le tableau reste contrasté. Les limites sont bien connues : infrastructures déficientes, manque d’enseignants, pluies persistantes, mobilisation inégale des élèves – surtout en zone rurale – et retards liés à l’absence de fournitures ou d’aménagements de base. À cela s’ajoute une coordination souvent fragile entre les différents acteurs du système éducatif.

“Le fait que les classes ouvrent mais que les cours ne démarrent qu’un mois après compromet le quantum horaire et donc la qualité de l’enseignement”, s’inquiète Amidou Diédhiou, secrétaire général du SELS (Syndicat des enseignants libres du Sénégal). Pour lui, “Ubbi Tey, Jàng Tey” est avant tout une philosophie à ancrer durablement dans les mentalités, à commencer par les parents d’élèves.

Sur le terrain, les réalités divergent. Dans les zones rurales comme Kédougou ou Fatick, les écoles ouvrent souvent dans des conditions précaires : herbes hautes non débroussaillées, absence de mobilier, classes improvisées sous des abris provisoires, ou élèves retenus pour les travaux agricoles. “En zone urbaine, c’est plus respecté, mais à l’intérieur du pays, il faut parfois une à deux semaines pour un retour complet des élèves”, confie Mariétou Ndao Mbodji, enseignante de terrain.

Malgré ces défis, le concept a trouvé un écho régional et international. La Campagne mondiale pour l’éducation (CME) le cite en exemple, et la Guinée s’apprête à lancer une initiative similaire, avec l’appui de la COSYDEP. “La force de cette campagne réside dans son approche inclusive, communautaire et décentralisée”, souligne Doriane Tchamanbe, membre de la CME.

Lors du panel organisé pour marquer les 10 ans de “Ubbi Tey, Jàng Tey”, plusieurs recommandations ont été formulées :

  • repenser le calendrier scolaire pour l’adapter aux contextes locaux,
  • renforcer la mobilisation communautaire,
  • procéder à un recrutement régulier d’enseignants,
  • mettre en place des mécanismes d’appui aux familles modestes,
  • et institutionnaliser la campagne comme un outil de suivi éducatif national.

Car, au-delà du simple démarrage des cours, l’enjeu est plus large : il s’agit de garantir une école publique équitable, performante et attractive, capable d’offrir à chaque élève sénégalais – peu importe sa région – les mêmes chances de réussite. La route reste longue, mais le cap, lui, est désormais connu.


Ce qu’a changé “Ubbi Tey, Jàng Tey” en dix ans

Hausse de la sensibilisation au respect du calendrier scolaire

+50 % des écoles démarrent les cours dès la rentrée

Mobilisation accrue des collectivités locales

Intégration du concept dans les politiques éducatives

Inspiration d’initiatives similaires dans d’autres pays africains

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