L’affaire Madiambal Diagne, du nom de l’éditorialiste et patron du journal Le Quotidien, prend une nouvelle tournure. Inculpé pour des soupçons de malversations autour du Programme de modernisation des infrastructures judiciaires (PROMIJ), un vaste chantier de rénovation des bâtiments judiciaires au Sénégal, le journaliste serait actuellement en fuite en France. Pendant ce temps, plusieurs membres de sa famille ont été mis en examen, et les regards se tournent désormais vers la société française Ellipse Projects, prestataire principal du programme.
Selon des informations relayées par Jeune Afrique, la société est soupçonnée d’avoir collaboré avec la SCI Pharaon, une structure immobilière détenue par Madiambal Diagne et ses proches. La Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF) a mis en lumière des flux financiers jugés suspects entre ces entités, évoquant des risques d’enrichissement illicite et de passation de marchés irrégulière.
Ellipse Projects brise le silence
Interrogée par Jeune Afrique, Victoria Jaunasse, directrice de la communication d’Ellipse Projects, a fermement rejeté toute implication dans des irrégularités. « L’entreprise est injustement mentionnée dans un conflit d’apparence politique et médiatique qui ne la concerne pas », a-t-elle déclaré, soulignant qu’aucune notification officielle ne leur a été adressée par la justice sénégalaise.
L’entreprise affirme avoir respecté l’ensemble de ses obligations contractuelles, notamment les mécanismes de contrôle instaurés par l’État dans le cadre du PROMIJ. Toutefois, l’absence d’une convocation formelle soulève des interrogations : peut-on mener une enquête complète sur le PROMIJ sans auditionner l’un de ses principaux prestataires ?
Vers une nouvelle phase judiciaire
Pour plusieurs observateurs, la prise de parole publique d’Ellipse Projects pourrait pousser la justice sénégalaise à accélérer le processus, afin de donner une visibilité claire à l’enquête. Car tant que l’entreprise française n’est pas formellement intégrée au dossier, le contour réel des responsabilités reste flou, et les soupçons demeurent.
Le cas de la SCI Pharaon, au cœur du dispositif supposé, semble jouer un rôle pivot. Les liens capitalistiques entre cette société et la famille de Madiambal Diagne, combinés aux transactions relevées par la CENTIF, renforcent les hypothèses d’un usage personnel des fonds alloués au projet de modernisation.
Une affaire à la frontière du judiciaire et du politique
L’affaire intervient dans un contexte politique tendu, marqué par une volonté affichée des nouvelles autorités de rompre avec les pratiques du passé. Pour certains soutiens de Madiambal Diagne, l’affaire relève d’une manœuvre politique visant à affaiblir une voix critique de la presse. Mais pour d’autres, il s’agit d’une épreuve de vérité pour la justice sénégalaise, qui doit démontrer son indépendance en menant une enquête complète, y compris à l’international.
Reste à savoir si les autorités judiciaires prendront acte des déclarations d’Ellipse Projects et engageront une coopération judiciaire avec la France pour faire la lumière sur les flux financiers, les responsabilités contractuelles et les éventuelles complicités.